Vous souhaitez donner du sens à votre épargne mais il est difficile d'y voir clair : labels obscurs, fonds d'investissement pollués par les entreprises qui financent les énergies fossiles, greenwashing, messages marketing trompeurs... Donner du sens à son épargne n'est pas si facile. Il existe pourtant une première étape accessible à tous : le choix de votre banque.

« Pour une grande partie des Français, la majorité de l'épargne reste les livrets réglementés ou le compte courant. Pour connaitre son impact, il faut donc se renseigner sur les engagements climatiques de sa banque », explique Julie Sansoucy, cchargée de campagne Engagement Société Civile chez Reclaim Finance, qui a récemment quitté la Commission Consultative des Épargnants de l'Autorité des marchés financiers (AMF) « après avoir à de nombreuses reprises alerté sur le greenwashing persistant des produits financiers, sans que l'AMF ne réagisse. »

Entre 2021 et 2024, selon un rapport publié très récemment par Reclaim Finance, les grandes banques mondiales ont accordé seulement 1 368 milliards de dollars aux énergies soutenables comme l'éolien, le solaire, et les infrastructures permettant leur développement, contre 3 285 milliards aux énergies fossiles.

Les banques françaises meilleures élèves

Les banques françaises ne font pas exception mais font tout de même partie des établissements ayant diminué leur investissement dans les énergies fossiles et augmenté la part allouée aux énergies renouvelables. BNP Paribas, Crédit Agricole, BPCE ou encore la banque SG... « Toutes ces banques financent l'expansion fossile mais à des degrés différents », explique encore Julie Sansoucy.

« Avec 96 milliards d'euros de financement des énergies renouvelables (EnR), les banques françaises sont les leaders mondiaux, avec une hausse de 28% en 2024 », a fait savoir récemment la Fédération bancaire française (FBF) dans un rapport. « Aujourd'hui, pour 1 € de financement de la production d'énergies fossiles, 2,6 € financent les EnR ou plus de 12 € financent les crédits verts et durables ».

Parmi les banques plus vertueuse, selon Reclaim Finance, on retrouve La Banque Postale et le Crédit Mutuel. D'après l'ONG, entre 2021 et 2024, la part de financement des énergies renouvelables par La Banque Postale a augmenté de 20% et celle dédiée aux énergies fossiles a diminué de 58%. Du côté du Crédit Mutuel, la part dédiée aux énergies vertes a augmenté de 6%, le financement des énergies fossiles a lui, diminué de 39%.

« Ce sont des acteurs qui se sont engagés, c'est le cas de la Banque Postale, du Crédit Coopératif ou du Crédit Mutuel Arkea, à ne plus financer les projets de production, de transport, de stockage ou de transformation d'énergies fossiles, les projets de centrales à charbon ainsi que les entreprises qui les développent. », détaille Julie Sansoucy, avant d'ajouter, « ouvrir un compte dans une banque comme celles-ci, c'est soutenir un modèle bancaire plus durable et encourager d'autres banques à suivre le même chemin ».

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Les livrets réglementés aussi concernés

Près de quatre ménages sur cinq (78,1%) possèdent au moins un Livret A. La proportion passe à 39,7% pour le Livret développement durable et solidaire (LDDS) et à 21,5% pour le Livret d'épargne populaire (LEP). Vous l'aurez compris, la très grande majorité des Français détient au moins un livret d'épargne réglementée...

« Les gens ont tendance à penser que l'argent est plutôt neutre alors que l'endroit où il va être placé a beaucoup d'importance »

« Entre 50% et 60% des livrets réglementés (Livret A, LDDS ou le livret d'épargne populaire) est directement gérée par la Caisse des dépôts et des consignations qui les utilise en grande partie pour financer différents projets d'intérêt général, mais pas que ... puisqu'elle peut toujours investir dans des entreprises qui développent de nouveaux projets fossiles comme TotalEnergies. Les 40-50% restants sont eux gérés librement par la banque. D'où l'importance de bien la choisir. On a tendance à penser que l'argent est neutre alors que l'endroit où il va être placé a beaucoup d'importance ».

Les banques sont d'ailleurs obligées d'utiliser au moins 5% de l'épargne réglementée déposée dans leurs coffres au financement de l'économie sociale et solidaire. Selon la Banque de France, en 2024, ce taux était de 17%, soit 41,2 milliards d'euros de prêts en faveur de l'ESS. Sans préciser les noms des bons et mauvais élèves parmi les établissements.

Le problème de la transparence

L'épargnant a donc la possibilité, par le choix de sa banque, de ne pas participer (du moins en partie) au financement de l'expansion fossile. Reste le problème de l'accès à ces informations. L'épargnant devra en effet, rechercher par lui même les stratégies mises en place par sa banque ou les montants alloués aux énergies fossiles et aux énergies renouvelables... Quand elles sont accessibles. C'est le cas notamment de BNP Paribas ou encore du Crédit Mutuel.

Toutefois, les épargnants ont la possibilité de vérifier sur le site créé par Reclaim Finance, « Change de banque », quelle banque est impliquée dans le financement des énergies fossiles. Chaque banque référencée est notée :

  • Rouge si elle « aggrave le chaos climatique » ;
  • Jaune si elle « n'en fait pas assez pour climat » ;
  • Vert si elle « agit pour le climat ».

Le Crédit Mutuel se voit attribuée une pastille jaune, la Banque Postale se retrouve en vert, BNP Paribas est en rouge, tout comme le Crédit Agricole. Sur le site, l'épargnant a aussi la possibilité de voir les alternatives responsables. « Change de banque » recense dans cette catégorie Le Crédit Coopératif, Hélios, la Nef ou encore Green Got.

Ce site a été pointé du doigt, dès son lancement en 2022, par BNP Paribas, qui lui reprochait de ne pas tenir compte de la réalité de son engagement climatique.

« Changer de banque aujourd'hui, c'est facile. Par ailleurs, il ne faut pas hésiter à expliquer à la banque pourquoi vous la quittez. C'est un bon moyen de faire bouger les choses et de pousser les acteurs financiers à devenir plus vertueux », plaide Julie Sansoucy.

« Les banques françaises, en réponse au défi majeur de la transition environnementale, ont engagé depuis plusieurs années une adaptation de leurs politiques de financement et intensifient leurs efforts dans ce domaine », estime de son côté la FBF.

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