Le phénomène inquiète certaines mairies, comme celle de Lauris, dans le Vaucluse. Gérard Larrive, conseiller municipal, y ressent une « asphyxie » créée par la réhabilitation des logements vacants pour en faire des locations saisonnières, a-t-il expliqué lors d'une conférence au Congrès des maires, qui se tient jusqu'à jeudi à Paris.

À Lège-Cap-Ferret, « les jeunes ne peuvent plus rester, les actifs vont habiter à 30 ou 40 km de la commune, une classe d'école ferme tous les ans et les agences immobilières ont remplacé les boucheries », raconte Jean-Paul Lebas, habitant de cette commune de Gironde et membre du Collectif national d'habitants permanents (CNHP).

« Une spéculation immobilière effrénée » sur les logements dédiés à la location saisonnière et sur les résidences secondaires

La faute selon lui à « une spéculation immobilière effrénée » sur les logements dédiés à la location saisonnière et sur les résidences secondaires et à l'inaction de la municipalité, « contrairement à d'autres communes du littoral qui ont pris des mesures pour essayer de freiner ».

Selon le collectif, une dizaine de communes se sont saisies d'un nouvel outil qui permet d'interdire sur certaines zones la construction de nouvelles résidences secondaires, instauré par la loi Echaniz-Le Meur de novembre 2024, qui vise aussi à réguler la location meublée touristique.

Parmi elles Bayonne, Biarritz, Bonifacio, Cancale, Chamonix, ou encore Saint-Malo, dernière en date, qui constate dans son plan local d'urbanisme, adopté début novembre, que « son attractivité touristique est à l'origine de nombreux atouts, notamment économiques, mais impacte aussi les capacités d'accueil de population ». Saint-Malo comptait 27% de résidences secondaires en 2022, selon l'Insee.

Avant cela, la mairie avait déjà pris des mesures pour réguler la location meublée touristique sur son territoire, avec des quotas de locations autorisées dans la vieille ville intra-muros, et par personne physique.

« Hémorragie des résidences secondaires »

Dans la préservation du logement permanent, Paris serait « probablement le meilleur élève », selon Jean-Paul Lebas du CNHP, qui a lancé une évaluation des politiques de quelques mairies en la matière.

« On est en train de gagner la bataille » contre les locations meublées touristiques illégales, mais il reste celle de « l'hémorragie des résidences secondaires et des logements vacants », relève Jacques Baudrier, adjoint PCF chargé du logement à la mairie de Paris, qui espère pouvoir relever les taxes imposées sur ces habitations.

Les mairies situées en zone tendue d'un point de vue du logement peuvent appliquer une taxe sur les logements vacants et majorer de 5% à 60% la taxe sur les résidences secondaires.

Une surtaxe qui agace de plus en plus les propriétaires de résidences secondaires, qui se réunissent en collectifs un peu partout sur le territoire. Certains s'organisent même pour s'inscrire sur les listes électorales de leur commune de villégiature, voire pour constituer une liste et se présenter à l'élection, comme à Argelès-sur-Mer.

Grogne aussi de la part des professionnels de la location touristique. « Certaines communes se sont emparées des outils (de régulation des meublés de tourisme, NDLR) dans une approche idéologique et aujourd'hui c'est instrumentalisé dans la campagne municipale », dans « une logique électoraliste », critique Frederick Seidita Aires, vice-président du syndicat des professionnels de la location meublée.

Il défend les impacts économiques positifs de son secteur et la recherche d'un « équilibre » entre lutte contre la crise du logement et attractivité touristique.

Un « équilibre » que le CNHP dit rechercher aussi. « Il ne s'agit pas de s'attaquer au tourisme, mais de faire en sorte que les communes puissent vivre à l'année », soutient Jean-Paul Lebas.

Preuve de l'enjeu à l'échelle communale : la présence depuis trois ans au Salon des maires d'Airbnb, avec un stand aux allures d'appartement de vacances présentant les outils de la plateforme pour séduire des élus.

La question du logement dans les zones touristiques est « très spécifique », estime cependant Véronique Pouzadoux, co-présidente de la commission aménagement urbanisme de l'Association des maires de France (AMF), qui doute que la préoccupation pour les résidences secondaires constitue un programme politique complet lors des élections municipales.