La Cour des comptes, l'Assurance maladie, les Hauts Conseils pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM), de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA) ou encore du financement de la protection sociale (HCFIPS), les membres du gouvernement... Dans les médias ou à travers des rapports publiés ces derniers mois, de nombreux ministres ou organismes ont fait des propositions pour faire des économies en matière de santé.

François Bayrou a annoncé un objectif de plus de 5 milliards d'euros d'économie sur les dépenses sociales en 2026. Voilà les principales mesures sur la table et ce qu'elles impliquent.

Une augmentation des franchises

1 euro par boîte, c'est le montant actuel de la franchise sur les médicaments. Autrement dit, à chaque fois que vous allez chercher une boîte de médicament à la pharmacie, 1 euro est déduit du remboursement prévu par la Sécurité social et cette somme n'est pas remboursée par les complémentaires santé. Ce dispositif, qui s'applique aussi au transport sanitaire et aux actes paramédicaux (kiné, infirmière, podologue...), avait déjà été revu à la hausse en avril 2024.

Le gouvernement a annoncé que cette franchise allait passer à 2 euros par boîte de médicaments. Autre proposition, revoir à la hausse la somme qui pourrait être demandée chaque année à chaque assuré. Actuellement, au titre de ces franchises médicales, le plafond est fixé à 50 euros par an. Il passerait alors à 100 euros, tout comme celui des participations forfaitaires.

Autre volonté du gouvernement, faire payer ces franchises directement à la pharmacie. Jusqu'à maintenant, elles sont souvent déduites plus tard, notamment si le patient bénéficie du tiers payant.

Une loi anti-fraude

Outre le budget, une autre loi va impliquer du changement : celle promise par le Premier ministre pour lutter contre la fraude et qui devrait être examinée à l'automne. Exemple de mesures, l'intensification des échanges entre les caisses d'assurance maladie et différents organismes : fisc, douanes, ou encore les complémentaires santé.

« Parallèlement, nous souhaitons que les caisses de Sécurité sociale aient accès à l'ensemble du patrimoine du bénéficiaire, par exemple ses propriétés, données bancaires ou assurance vie, afin de s'assurer qu'il n'a pas des revenus non déclarés », a indiqué Catherine Vautrin, au Parisien.

Autres annonces concernant les taxis en charge du transport des patients, profession qui était déjà montée au créneau au printemps, pour protester contre l'évolution des rémunérations. Le projet de texte mentionne l'obligation de passer à un système de facturation intégré et de posséder un logiciel de géolocalisation.

Les arrêts maladie dans le viseur

Quant aux arrêts maladies, Catherine Vautrin indiquait au Monde la volonté de les limiter à 15 jours, pour un premier arrêt prescrit par un médecin de ville ou à 1 mois, après une hospitalisation. Une proposition qui rejoint celle de l'Assurance maladie, dans son rapport Charges et produits, « de limiter la durée de l'arrêt de travail pouvant être prescrit ».

Les affections longue durée (ALD) limitées

La reconnaissance d'affection de longue durée (ALD) permet, pour les maladies nécessitant des traitements lourds ou coûteux, d'être mieux remboursé par l'Assurance maladie. Le gouvernement a confirmé son intention de limiter l'accès au dispositif. « Est-ce que c'est un gros mot de dire que par moments, il faudra réévaluer l'affection longue durée, quand par exemple un patient est considéré en rémission complète ? », indiquait déjà Yannick Neuder, ministre en charge de la Santé et de l'Accès aux soins, en juin, sur LCP.

Le rapport de l'Assurance maladie suggère aussi d'« évaluer régulièrement la consommation de soins des personnes bénéficiant du dispositif afin de réévaluer l'exonération pour les personnes en situation de guérison ou de rémission de certaines pathologies (cancers en phase de rémission, certaines affections cardio-vasculaires après une période active de soins lorsque la personne se retrouve sans incapacité) ».

« Nous allons interroger le maintien du remboursement à 100% des cures thermales et des médicaments dont le service médical rendu est faible pour les patients en ALD », précisait aussi Catherine Vautrin au Monde.

Les complémentaires santé touchées ?

Des mesures sont aussi en discussion concernant les complémentaires santé, souvent appelées mutuelles. Par exemple, une refonte des contrats dits « responsables », à l'image de ce que proposaient déjà les sénateurs en septembre 2024.

Autre sujet déjà évoqué en début d'année : une nouvelle taxe imposée aux organismes de complémentaires santé, qui devrait permettre à l'Etat de récupérer 1 milliard d'euros. Catherine Vautrin a confirmé en juin, lors du congrès de la Mutualité Française, qu'elle serait inscrite au projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026.

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Des mesures décriées

« Cette mesure viendra pénaliser les personnes malades qui ont réellement besoin de traitement, avec des risques de renoncement aux soins encore plus importants. Nous rappelons que les personnes en ALD sont déjà celles qui supportent le plus de restes à charge », alerte l'Union nationale des associations agréées d'usagers du système de santé, France asso santé, à propos du doublement des franchises médicales.

Comme le montrent les statistiques publiées par la Drees, les dépenses de santé sont en moyenne bien plus élevées pour les personnes ayant une ALD : 9 305 euros par an, contre 2 900 euros sans (1).

« Revoir le périmètre des affections de longue durée (ALD) ne diminuera ni la prévalence des maladies chroniques, ni le coût des traitements : cela reviendrait uniquement à réduire la protection sociale des patients concernés », indique par ailleurs le Syndicat des médecins généralistes.

Le syndicat a par ailleurs dénoncé les agréments des ministres pour limiter les arrêts maladie. Ces derniers affirmaient que « 50% des arrêts maladie longs seraient injustifiés ». « Ce chiffre, repris sans nuance, est tiré du rapport Charges et Produits de l'Assurance maladie. Il ne concerne qu'un échantillon ciblé d'arrêts, sélectionnés pour leur contexte particulier, et non l'ensemble des arrêts longs. Parmi les arrêts qualifiés d'injustifiés, beaucoup relèvent en réalité d'une autre prise en charge : invalidité ou reclassement professionnel ».

Enfin, de nombreux acteurs regrettent des mesures ciblant essentiellement les malades. « Quand on regarde dans le détail, sur ces 13 milliards, la moitié relève de la fraude liée aux cotisations sociales, ce qui supposerait d'aller voir du côté des employeurs », explique à l'AFP Nicolas Da Silva, économiste des politiques de santé.

(1) Ces sommes prennent en compte les remboursements de l'assurance maladie, des complémentaires santé et le reste à charge du patient.