
Depuis 2017, le dispositif Ciclade a été mis en avant à de nombreuses reprises. Mais avant qu'un contrat d'assurance vie ne se retrouve sur Ciclade, il peut être retrouvé via Agira pendant 10 ans. Avez-vous senti un « effet Ciclade » depuis 2017, avec une hausse des demandes ?
Aurélien Cressely : « Je ne saurais dire s'il y a un effet Ciclade, mais nous observons depuis une dizaine d'années une augmentation constante du nombre de saisines, notamment par les particuliers. Pour donner un ordre d'idée, nous étions à plus de 80 000 saisines en 2018, et nous approchons désormais les 130 000 en 2024. »
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« L'Agira et son dispositif de recherche des contrats est de plus en plus visible et identifié sur les différents moteurs de recherche »
Comment expliquez-vous cette hausse du recours à l'Agira ?
A.C. : « L'Agira et son dispositif de recherche des contrats est de plus en plus visible et identifié sur les différents moteurs de recherche. Par exemple, si vous saisissez “comment rechercher un contrat d'assurance vie”, le site de l'Agira arrive à la première position. Il en va de même sur les différents “chats” d'IA, où l'Agira est immédiatement identifiée. »
Et une fois que vous arrivez sur Agira Vie, la démarche est simple de votre point de vue ?
A.C. : « Le formulaire répond aux besoins des assureurs pour retrouver un contrat d'assurance vie. Dans l'ensemble, la saisine par le biais du formulaire de l'Agira est très simple, dès lors que le demandeur peut justifier du décès du souscripteur du contrat.
« La saisine par le biais du formulaire de l'Agira est très simple, dès lors que le demandeur peut justifier du décès du souscripteur du contrat »
C'est souvent “l'après saisine” qui fait l'objet d'interrogations de la part du public. L'Agira agit comme un guichet unique : nous recevons l'ensemble des saisines et vérifions que le dossier a été correctement complété. Puis, si la saisine est complète, nous la transmettons à toutes les entreprises du marché pour identification du contrat. Le rôle de l'Agira s'arrête là. S'il existe un contrat, ce sera aux entreprises d'assurance de contacter elles-mêmes les bénéficiaires. Elles disposent d'un mois pour les informer de l'existence d'un capital ou d'une rente. L'Agira, elle, ne dispose pas d'informations sur les suites données aux saisines qu'elle a transmises.
« Si une personne physique ou morale n'est bénéficiaire d'aucun contrat d'assurance vie, elle ne sera pas contactée »
Il est important de préciser que si une personne physique ou morale n'est bénéficiaire d'aucun contrat d'assurance vie, elle ne sera pas contactée par les assureurs sollicités par l'Agira. L'Agira adresse toutefois à chaque demandeur un accusé de réception confirmant la transmission de la demande de recherche aux organismes d'assurance concernés. »
Cette absence de réponse est la principale différence avec Ciclade, puisque l'on sait immédiatement si la requête est négative.
A.C. : « Le dispositif Ciclade, mis en œuvre par la Caisse des dépôts, répond à une logique totalement différente de celle de l'Agira. Lorsque le décès du souscripteur d'un contrat d'assurance vie est identifié, les assureurs disposent de 10 ans pour en rechercher les bénéficiaires. Au-delà de ce délai, les sommes doivent être déposées à la Caisse des dépôts. Ciclade est donc un dispositif totalement intégré, de la recherche à la restitution des fonds. Ce qui n'est pas le cas de l'Agira qui intervient comme un guichet unique, en centralisant les demandes de recherche de contrat d'assurance vie et en les transmettant à tous les assureurs. L'objectif du législateur en créant l'Agira était de simplifier la démarche des bénéficiaires en leur permettant d'effectuer une seule demande. »
« L'objectif du législateur en créant l'Agira était de simplifier la démarche des bénéficiaires en leur permettant d'effectuer une seule demande »
Vous envoyez donc chaque demande à tous les assureurs ? À combien d'établissements ?
A.C. : « Oui, exactement : les demandes sont transmises dans un délai de 1 et 15 jours à tous les assureurs du marché, soit environ 150 entreprises. Les assureurs vérifient alors l'existence éventuelle d'un contrat au nom de la personne décédée et, le cas échéant, prennent directement contact avec les bénéficiaires. »
Lors d'une succession, c'est le notaire ou le bénéficiaire qui questionne Agira ?
A.C. : « La loi prévoit que toute personne physique ou morale peut saisir l'Agira, ce qui inclut également les notaires et les associations par exemple. »
Pourquoi les assureurs ne sont-ils pas au courant du décès ? Malgré l'informatisation et l'accès à de nombreux fichiers, dont celui des décès...
A.C. : « L'Agira constitue justement un moyen d'informer l'assureur d'un décès. Soit par le dispositif Agira 1, un guichet unique que peuvent utiliser les bénéficiaires potentiels. Soit par le biais d'Agira 2, qui repose sur le croisement entre le portefeuille de l'assureur et le fichier RNIPP [Répertoire national d'identification des personnes physiques] des personnes décédées. »
« Le stock de contrats non réclamés est en phase d'extinction : en 2024, près de 90% des saisines de l'Agira ont été effectuées dans l'année du décès »
Mais alors, si l'Agira offre un double filet, pourquoi y a-t-il encore des contrats non réclamés ?
A.C. : « L'Agira n'est pas synonyme de déshérence. Bien au contraire, il s'agit avant tout d'un outil permettant d'enclencher le processus de remboursement. Par ailleurs, le stock de contrats non réclamés est en phase d'extinction : en 2024, près de 90% des saisines de l'Agira ont été effectuées dans l'année du décès. Aujourd'hui, les mailles sont suffisamment efficaces pour prévenir la déshérence des contrats. »
« Aujourd'hui, les mailles sont suffisamment efficaces pour prévenir la déshérence des contrats »
Cela signifie que, petit à petit, la Caisse des dépôts ne recevra plus rien ?
A.C. : « Dans les années à venir, il y aura probablement de moins en moins de contrats en déshérence qui seront transférés à la Caisse des dépôts. Bien sûr, il pourra toujours subsister des failles liées à des bénéficiaires non retrouvés par les assureurs, mais il s'agira d'exceptions. »
Pourquoi n'est-ce pas possible de faire une recherche sur le nom du bénéficiaire ? Ce qui serait plus simple...
A.C. : « La plupart des clauses bénéficiaires des contrats sont rédigés sous une forme générique. La formule la plus courante est par exemple “Mon conjoint, à défaut mes enfants, nés ou à naître, vivants ou représentés, par parts égales ; à défaut mes héritiers”. Les bénéficiaires ne sont donc pas directement nommés. Il est donc difficile d'initier une recherche sur cette base. C'est pour cette raison que les recherches sont faites sur la base du nom du souscripteur du contrat. Parmi les recommandations, il est donc important de mettre régulièrement à jour la clause bénéficiaire de son ou ses contrats, notamment en cas de changement de situation, et de préciser autant que possible les coordonnées des bénéficiaires. »
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Est-ce qu'un jour, on améliorera la recherche, grâce à l'intelligence artificielle (IA) ou grâce aux développements informatiques, en permettant une recherche par bénéficiaire ?
A.C. : « Il est inéluctable que l'IA contribuera à améliorer les recherches dans l'avenir. Mais en attentant, il faut faire confiance à l'intelligence humaine pour appliquer les recommandations visant à mieux identifier les contrats. Premièrement : mettre régulièrement à jour la clause bénéficiaire (en cas de changement) en mentionnant les coordonnées des bénéficiaires le plus précisément possible. Deuxièmement : tenir informé son entourage de l'existence de son ou ses contrats, en précisant le nom de l'assureur. Troisièmement : lors de la saisine de l'Agira, fournir un maximum d'informations afin de faciliter et d'accélérer les vérifications effectuées par l'assureur. »
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Dans le bilan annuel de l'Agira, quasi 70 000 contrats sont listés comme à régler, en tout, fin 2024. C'est votre stock de contrats en attente de bénéficiaires ?
A.C. : « Il s'agit des contrats identifiés par les assureurs comme dénoués par décès à la suite d'une saisine de l'Agira. Cela signifie que le processus de règlement est en cours. Ce délai peut notamment être lié à des vérifications complémentaires que l'assureur doit effectuer afin de s'assurer que l'ensemble des bénéficiaires de la clause ont bien été identifiés. »
Communique-t-on assez sur l'Agira ?
A.C. : « Je constate que plusieurs millions de personnes nous ont saisi au cours des vingt dernières années, ce qui montre que l'Agira est désormais bien identifié. Aujourd'hui, l'essentiel est que toute personne souhaitant savoir comment retrouver un contrat d'assurance vie puisse accéder rapidement à l'Agira. »