Bientôt un projet de budget ?
Sébastien Lecornu a renoncé vendredi à recourir à l'article 49.3 de la Constitution qui lui aurait permis de faire adopter un budget 2026 sans vote. Redonnant ainsi la main au Parlement, sans pour autant écarter les menaces de censure, il pourrait transmettre les textes budgétaires dès la semaine prochaine au Parlement, où ils pourront évoluer au gré des débats.
« Il n'y a (...) plus aucun prétexte pour que ces débats (parlementaires) ne démarrent pas la semaine prochaine », et pour que chaque député puisse « prendre ses responsabilités », a-t-il indiqué vendredi, après avoir reçu les chefs de file des oppositions.
Avant d'arriver au Parlement, le projet de loi de finances (PLF) notamment doit être présenté en conseil des ministres et être au préalable examiné par le Conseil d'État et le Haut Conseil des finances publiques (HCFP). Ce dernier a été saisi jeudi.
Le Parlement doit disposer des 70 jours prévus par la Constitution pour en débattre. A défaut, le PLF peut être mis en vigueur par ordonnances ou une loi spéciale peut reconduire les crédits de 2025 à l'identique au début de 2026, comme ce fut le cas au début de cette année pour le budget précédent. Mais le Premier ministre ambitionne toujours de faire voter un budget pour l'an prochain avant l'échéance fixée au 31 décembre pour sa publication au Journal officiel.
Moins de dépenses
Quoiqu'il ait dit vouloir partir d'une « feuille blanche », certaines orientations du nouveau Premier ministre semblent s'inspirer de celles de François Bayrou. Il souhaite ramener le déficit public « aux alentours » de 4,7% du produit intérieur brut (PIB) en 2026, alors que son prédécesseur visait 4,6%, après 5,4% attendus en 2025. La cible d'un déficit de 3% du PIB en 2029 est confirmée.
Sébastien Lecornu a récemment indiqué au Parisien que la priorité irait à « la réduction des dépenses », notamment une diminution de six milliards d'euros du « train de vie » de l'État et « une meilleure maîtrise des dépenses sociales et des collectivités locales ». Dans le même temps, il dit rejeter l'idée d'un « budget d'austérité et de régression sociale ».
L'équation budgétaire pourrait toutefois être encore plus complexifiée en cas de révision à la baisse de la croissance, actuellement prévue à 1,2% pour 2026.
« Taxe sur le patrimoine financier »
Côté recettes, le nouveau locataire de Matignon ne veut pas de la taxe Zucman réclamée par la gauche pour taxer à 2% minimum les patrimoines des 1.800 contribuables les plus riches : il la juge « dangereuse » pour l'économie. Mais se disant sensible aux appels à « plus de justice fiscale », il souhaite des efforts « partagés et justes ».
C'est en ce sens qu'il a proposé vendredi la création d'une « taxe sur le patrimoine financier » des holdings familiales, parfois utilisées pour contourner l'impôt. Par ailleurs, il étudie aussi une baisse de l'impôt sur le revenu pour les couples payés « légèrement » au-dessus du Smic, une baisse de prélèvements en faveur des salariés ou le rétablissement d'une prime Macron défiscalisée.
Les entreprises ne seraient pas oubliées. Selon Les Echos, le projet de budget prévoirait une baisse de 1,3 milliard d'euros d'un impôt de production, la CVAE, réclamée de longue date par les milieux économiques.
Relèvement du prélèvement forfaitaire unique
Parmi les options envisagées, sont aussi citées dans la presse un relèvement du prélèvement forfaitaire unique (« flat tax ») sur les revenus du capital, actuellement de 30%, une reconduction de la surtaxe d'impôt sur les sociétés appliquée aux plus grandes en 2025, officiellement pour une seule année, ou un rabot du pacte Dutreil sur les transmissions d'entreprises familiales.
Les Echos mentionnent aussi une possible restriction de l'avantage fiscal pour les stagiaires, apprentis et jobs étudiants et pour certains malades chroniques (ceux qui bénéficient actuellement d'un allègement fiscal au titre de l'Affection longue durée).
Sur le front social, Sébastien Lecornu, qui s'oppose à la suspension de la réforme des retraites de 2023, compte améliorer les pensions des femmes dans le prochain budget de la Sécurité sociale, comme proposé par le conclave sur les retraites.
Déjà acté
Sébastien Lecornu a d'ores et déjà renoncé à supprimer deux jours fériés. Cette mesure était défendue par François Bayrou et censée rapporter 4,2 milliards d'euros.
Il a aussi installé une mission « État efficace » pour réduire les dépenses des administrations, et symboliquement, annoncé la suppression des « avantages à vie » des ex-Premiers ministres.