L'essentiel

  • Les frais de notaire sont souvent source de confusion pour les héritiers.
  • Il est obligatoire de passer par un notaire pour régler une succession, sauf en l'absence de bien immobilier et pour une épargne restreinte.
  • Les frais de notaire ne sont pas négociables et sont fixés selon un barème réglementé, sauf en cas de « diligences particulières ».

« Quels sont les frais que je vais payer au notaire pour toucher la succession ? » Soyons honnête. Nous n'avons pas reçu cette question concise telle quelle dans notre boîte « questions de lecteurs ». En revanche, à l'occasion de notre appel à témoignages sur l'héritage, nous avons reçu quantité de remarques sur ces frais, témoignant notamment d'incompréhensions notables.

Pêle-mêle, une héritière déçue : « Les notaires sont très expéditifs pour les petites successions... pas très disponibles, font traîner, envoient les documents sans explications... en fait ça n'est pas très transparent. » Un héritier mécontent : « Acte erroné malgré des coûts exorbitants. » Un autre désabusé : « On ne tient jamais compte des frais prélevés par le notaire, passage obligatoire pour clore toutes successions. » Ou encore, plus généralement : « Tout le monde se sert lors d'une succession », en faisant référence à l'État, le notaire, l'agence immobilière...

« Tout le monde se sert lors d'une succession »

Les droits de succession sont systématiquement au cœur des débats. Toutefois, et c'est normal car c'est la loi, les frais de notaire sont cités en premier dans la liste des dépenses en cas de succession, dans le sondage réalisé en octobre par YouGov pour MoneyVox. À quoi correspondent donc ces frais rognant une partie de l'héritage ?

SONDAGE. Le calcul des droits de succession est très souvent incompréhensible pour les héritiers

Régler la succession via un notaire, c'est obligatoire ?

Marie-Jo, lectrice de MoneyVox, nous a posé une première question centrale le 31 octobre dernier : « Est-ce qu'on est obligé d'avoir un notaire pour une succession d'un parent décédé ? Si la banque connaît les héritiers... » Obligatoire, non, pas dans tous les cas, sauf « lorsqu'il y a un bien immobilier, un testament, une donation entre époux ou lorsque les liquidités dépassent les 5 910 euros [au-dessus de ce seuil, l'acte de notoriété est obligatoire, NDLR] », explique le Conseil supérieur du notariat.

En clair : pour une petite succession, simple, sans immobilier, sans donation passée... le recours au notaire n'est pas obligatoire, à condition toutefois d'avoir une vision claire des dettes du défunt, et de l'existence ou non de comptes dans d'autres banques. « Si l'épargne est inférieure à 5 000 euros, alors les héritiers n'ont pas à passer par le notaire et peuvent se limiter à une déclaration sur l'honneur signée par tous les héritiers », explique Nathalie Couzigou-Suhas, notaire à Paris et chargée d'enseignement à l'École nationale de la magistrature.

Héritage : « Faut-il passer par un notaire pour débloquer Livret A, LDDS et compte courant ? »

Quels sont les frais incontournables à régler au notaire lors d'une succession ?

Dans tous les cas, chercher à vous passer du notaire est-il vraiment un bon calcul ? Les frais incompressibles sont-ils si importants ? « S'agissant du notaire, sa rémunération est déterminée par décret », explique Me Couzigou-Suhas. « C'est un barème strict et identique pour tous les notaires de France, quelle que soit sa localisation. »

« Un barème strict et identique pour tous les notaires de France, quelle que soit sa localisation »

« Pour une succession, trois actes principaux sont à prévoir », poursuit la notaire parisienne. Le premier : l'acte de notoriété, qui « liste les héritiers légaux et les héritiers par testament ». Ce document vous permettant de justifier de votre qualité d'héritier dans toutes les démarches administratives suivant le décès, auprès de la banque, de l'assureur, des caisses de retraite, etc.

« L'acte de notoriété coûte environ 150 euros », au total, explique Me Couzigou-Suhas, donc en intégrant « la rémunération du notaire, fixée par un tarif réglementé [56,60 euros HT soit 67,92 euros TTC, précisément, NDLR] ainsi que les diverses pièces nécessaires à la régularité de l'acte dont la consultation du fichier des testaments ». Voilà, pour une petite succession sans bien immobilier, le seul acte incontournable et donc les seuls frais incompressibles.

Un deuxième acte est nécessaire « en cas de biens immobiliers dans la succession » : « il va devoir être fait une attestation de propriété immobilière pour inscrire le bien immobilier au nom des héritiers ». Tarif ? Variable, en fonction de la valeur du logement concerné. Le barème des émoluments du notaire est là encore réglementé mais de multiples subtilités peuvent compliquer le calcul. En plus de ces émoluments, plusieurs formalités coûteuses doivent être réalisées par le notaire pour rédiger cette attestation, ce qui gonfle la note.

« Enfin, le troisième acte est la déclaration fiscale de succession, détaillant l'actif et le passif au jour du décès », explique Me Couzigou-Suhas. « Ce 3ème acte est envoyé aux impôts ; au vu de cet acte sont acquittés les droits de succession dus au trésor public, si la succession est taxable. » Là encore, même principe : un barème réglementé selon la valeur du patrimoine.

Frais de notaire : avez-vous une marge de négociation ?

Alors... Pourquoi les frais du notaire atteignent parfois des montants élevés ?

Les barèmes d'émoluments étant progressifs, le montant de la facture grimpe mécaniquement si l'héritage est important. Me Couzigou-Suhas pointe en outre les frais « à prévoir selon les situations particulières ». Par exemple, « en cas de présence d'un testament dit olographe [rédigé de la main du défunt, NDLR] et d'absence d'héritiers réservataires [les enfants, la famille proche, etc., NDLR], une formalité dite d'envoi en possession est requise », explique la chargée d'enseignement à l'École nationale de la magistrature.

Autre exemple : « Si le défunt avait prévu une donation au dernier vivant, un acte d'option au profit du conjoint survivant est requis, un inventaire des meubles meublants [tables, lits, chaises, armoires, etc., NDLR] et un partage des biens de la succession si les héritiers ne souhaitent pas vendre ou se maintenir en indivision. »

« Tous ces actes sont tarifés à un prix fixé par décret. Les seuls tarifs variables sont à prévoir en cas de diligences particulières réclamées par le notaire dont il est tenu de vous informer au préalable », cadre la notaire parisienne.

« Les gens peuvent payer les droits de succession par eux-mêmes s'ils le souhaitent. C'est néanmoins déconseillé tant cette déclaration fiscale peut comporter de spécificités et écueils fiscaux qu'il est impératif de connaître »

Pouvez-vous vous passer de notaire pour payer d'éventuels droits de succession ?

« En cas de droits de succession à régler, la déclaration de succession est le plus souvent rédigée par le notaire même si ce n'est pas une obligation », nuance Me Couzigou-Suhas. « Les gens peuvent les payer par eux-mêmes s'ils le souhaitent. C'est néanmoins déconseillé tant cette déclaration fiscale peut comporter de spécificités et écueils fiscaux qu'il est impératif de connaître. Donc effectivement, dans 98% des cas, on demande au notaire de le faire. Cela permet aussi de se reposer sur la responsabilité professionnelle du notaire ainsi que sur ses conseils. »

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