Ce n'est pas un mystère, ces dernières années, l'inflation a fortement touché la France : les prix ont augmenté de 1,6% en moyenne en 2021, puis de 5,2% en 2022 et 4,9% en 2023. Les salaires ont-ils suivi la tendance ? Pas vraiment, montre l'Insee dans son étude « Emploi, chômage, revenus du travail » 2024, publiée ce lundi.
Un point positif, le salaire minimum s'est quasiment maintenu en raison du mécanisme d'indexation, protégeant aussi un peu les plus bas salaires. Mais en moyenne, « les salaires n'ont pas augmenté aussi vite que l'inflation et ont accusé un recul de leur pouvoir d'achat », annonce l'Insee.
Les salaires reculent
Cette baisse du pouvoir d'achat n'est pas anodine. « Ce recul est le plus fort observé sur les vingt‑cinq dernières années, hormis les évolutions en trompe‑l'œil en 2020 et 2021, qui résultaient en grande partie de modifications dans la composition de l'emploi pendant la crise sanitaire », constate l'Insee.
Dans le détail, en euros constants, c'est-à-dire si on enlève l'effet de l'inflation, en 2022, « seuls les salaires en bas de la distribution se sont presque stabilisés (‑0,1% pour le 1er décile), parce qu'ils dépendent directement de ces revalorisations, et les autres ont baissé, de plus en plus fortement à mesure que l'on grimpe dans le reste de l'échelle des salaires (‑0,5% dès le 2e décile, ‑1,3% pour le salaire net médian et ‑1,4% pour le 9e décile) », détaille ainsi l'Insee.
Quelles conséquences sur le salaire moyen, le salaire médian et le salaire de base ?
Le salaire moyen en équivalent temps plein (EQTP) s'élevait en 2022 à 2 630 euros. Une augmentation de 4,1%, mais moins importante que l'inflation. Résultat, en euros constants, le salaire moyen a diminué de 1% par rapport à 2021.
Concernant le salaire médian (c'est-à-dire que 50% des Français gagnent moins et 50% gagnent plus), il s'élève à 2 091 euros, soit + 3,8% en euros courants, mais une fois l'effet de l'inflation corrigé, l'Insee note une diminution de 1,3%.
Salaire : êtes-vous sûr d'être si mal payé que ça ?
Les 10% des Français les moins bien payés, qui font partie du premier décile, gagnent moins de 1 436 euros (-0;1% en euros constants), quand les 10% des Français les mieux payés gagnent plus de 4 162 euros par mois (-1,4% en euros constants).
« L'accélération des prix en 2022 et les revalorisations automatiques du Smic qui ont suivi ont tassé l'échelle salariale : en euros constants, seuls les salaires en bas de la distribution se sont presque stabilisés (...) et les autres ont baissé, de plus en plus fortement à mesure que l'on grimpe dans le reste de l'échelle des salaires (‑0,5% dès le 2e décile, ‑1,3% pour le salaire net médian et ‑1,4% pour le 9e décile) », précise l'étude.
Les primes exceptionnelles à l'avantage des salaires les plus élevés
Quel est l'effet des primes exceptionnelles de pouvoir d'achat (Pepa) remplacée ensuite par la prime de partage de la valeur (PPV) ? Cette dernière permet à une entreprise de verser jusqu'à 3 000 euros par an (6 000 euros si l'entreprise a un accord d'intéressement) aux salariés. Elle est défiscalisée pour les salariés rémunérés moins de trois fois le Smic.
« Hors versements des primes Pepa et PPV en 2021 et 2022, la baisse du salaire net moyen atteint 1,6% en euros constants, ce qui signifie que ces primes ont limité pour 0,6 point le recul du salaire réel », indique l'Insee.
Ces primes ont davantage profité aux plus hauts salaires. « Elles ont permis de majorer la hausse (en euros courants) du premier décile de salaire net de 0,2 point, et leur effet s'accentue à mesure que l'on grimpe dans la distribution des salaires nets (+0,4 point dès le 2e décile, +0,5 point pour le 3e décile), pour se stabiliser entre +0,6 point et +0,9 point au‑delà du salaire médian. »
L'impact dans les catégories socioprofessionnelles
La catégorie socioprofessionnelle dont le salaire a été le moins revalorisé ? Les cadres, avec une baisse de 1,2% en euros constants. Cela s'explique par le fait que ces professionnels gagnent en majorité plus que trois fois le Smic. Ils ont donc peu été concernés par les primes exceptionnelles, explique l'Insee.
Professions intermédiaires, employés et ouvriers ont quant à eux subi une baisse de 0,9% de leur salaire en euros constants. Une baisse limitée par les primes exceptionnelles pour les ouvriers et les professions intermédiaires et par l'indexation du Smic pour les employés.
Pour le salaire de base (SMB), qui n'inclut ni les primes habituelles ni les primes exceptionnelles, « la baisse a été moins forte qu'en 2022 pour chaque catégorie socioprofessionnelle, avec de nouveau de nettes différences : le SMB réel est resté quasi stable pour les ouvriers (+0,1% en euros constants), tandis qu'il a de nouveau nettement baissé pour les cadres (‑1,3% en euros constants) », signale l'Insee.
Salaire net : combien de salariés gagnent plus ou moins que vous ?