Dossier sur les SCPI santé, Pierval, etc
Les SCPI santé rattrapées par la crise de l’immobilier de bureau
Par
Jorge Carasso [lien réservé abonné]
Publié hier à 20:13, mis à jour hier à 20:13
L'immobilier de santé reste demandé, mais pourtant certains clients sont déjà sur le reculoir. ERIC - stock.adobe.com
DÉCRYPTAGE - Ces placements vedettes de l’après-Covid présentent des rendements moins attractifs qu’avant.
C’est l’effet boule de neige.
La crise profonde qui secoue l’immobilier d’entreprise [lien réservé abonné]n’en finit pas de faire des victimes dans le monde des SCPI, ces placements investis dans la pierre, prisés des Français qui cherchent à préparer leur retraite.
Après les bureaux [lien réservé abonné], plombés par la hausse des taux et le télétravail, c’est désormais l’immobilier de santé (
Ehpad [lien réservé abonné], petits centres médicaux…) qui souffre.
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Certains fonds, qui faisaient jusqu’alors office de placements refuges, car loin des remous du marché immobilier tertiaire, commencent à accuser le coup. Pierval Santé (3,2 milliards d’euros de capitalisation) a récemment annoncé une baisse de son dividende (- 15 %) au premier trimestre. Une première depuis son lancement, en 2014. Depuis trois ans, la SCPI a massivement investi dans des centres médicalisés sur plan (36 immeubles acquis neufs entre 2022 et 2023).
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Or, acheter de la sorte implique de payer des traites, sans qu’il y ait de locataire en face, donc de rentrées d’argent. Lorsque les souscriptions se sont taries (- 63 % au premier trimestre 2023 sur un an), il a fallu piocher dans les loyers existants.
« La SCPI a subi un ralentissement du rythme de sa collecte. Les engagements pris pèsent un peu plus sur le rendement », reconnaît Isabelle Clerc, directrice immobilier d’Euryale AM, la maison mère de Pierval Santé.
Les épargnants refroidis
Par ailleurs, les SCPI déjà installées, parmi lesquelles les fonds dédiés à la santé, subissent de plein fouet
la concurrence de nouvelles SCPI, qui profitent aujourd’hui de la crise de l’immobilier pour faire leurs emplettes [lien réservé abonné], et sont capables de délivrer 7 % à 8 % de rendement les premières années.
« Une rentabilité entre 4 % et 5 %, comme ce que les SCPI de santé proposent, ce n’est plus aussi attirant qu’avant », fait valoir Pierre Garin, directeur immobilier chez le courtier Linxea.
Le sous-jacent n'est pas en cause, car l'immobilier de santé reste demandé, mais pourtant certains clients sont déjà sur le reculoir
Le sous-jacent n’est pas en cause, car l’immobilier de santé reste demandé, mais pourtant certains clients sont déjà sur le reculoir.
« L’un d’entre eux m’a dit : “On vend tout” », raconte un conseiller en gestion de patrimoine (CGP). Ils craignent que la rentabilité du produit (5,10 % en 2023) en soit affectée, même si la société de gestion refuse de se prononcer pour l’instant.
« On n’en a vendu qu’une partie, car la SCPI détient de beaux actifs en portefeuille. Mais il y a de l’inquiétude c’est sûr », poursuit le courtier.
Les nombreux dégâts de la crise immobilière
D’autant plus que Pierval n’est pas le seul fonds spécialisé dans la santé à connaître des difficultés. La SCPI Primovie (5,2 milliards d’euros de capitalisation fin 2023) fait aujourd’hui figure d’épouvantail. Elle
pâtit des difficultés de la SCI Capimmo, [lien réservé abonné] le fonds star de la maison mère, Praemia Reim (ex-Primonial Reim), très présent en assurance-vie et dont la valeur a dégringolé de près 20 % en un an. La SCI a dû céder des centaines de milliers de parts de Primovie, qui sont aujourd’hui en attente, bloquant le marché. Praemia Reim n’a pas souhaité répondre à nos questions.
Mais ce n’est pas tout, la SCPI Primovie, pourtant spécialisée dans la santé, a aussi fait des mauvais choix de diversification. «
Ils avaient l’obligation de réinvestir leur collecte massive - 800 millions d’euros à elle seule en 2022 -, et ils l’ont fait en partie sur de grands bureaux en périphérie. C’est exactement le genre d’immeuble qui souffre en ce moment. Cette poche de tertiaire les a plombés l’an dernier lors des évaluations annuelles », indique Pierre Garin.
C’est ce qui a poussé la société de gestion à baisser le prix de sa part en février dernier (- 9 %). Et à plonger un peu plus les clients, qui ont souvent d’autres parts de SCPI notamment de bureaux, dans leurs portefeuilles, un peu plus dans l’incertitude. La crise de l’immobilier n’a pas fini de faire des dégâts.