Les consultations électroniques des obligataires par ClubFunding sont-elles suffisantes ? Le tribunal de commerce de Paris juge que non en référé. Je me demande si ClubFunding s'est vanté de cette décision auprès des obligataires concernés...
Copie exécutoire : XXX TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS
XXX
Copie aux demandeurs : 2
Copie aux défendeurs : 4 ORDONNANCE DE REFERE PRONONCEE LE LUNDI 19/08/2024
PAR M. AAA, PRESIDENT,
ASSISTE DE M. BBB, GREFFIER,
Par mise à disposition
RG 2024021083
31/05/2024
ENTRE : la MASSE DES OBLIGATAIRES représentée par la SAS CLUBFUNDING, N° Siren 807764980, dont le siège social est au 19, rue Cambacérès 75008 PARIS
Partie demanderesse comparant par Me CCC Avocat
ET : la SAS ATRIUM, N° Siren 804713618, dont le siège social est au 37, rue des Aciéries 42000 SAINT-ETIENNE
La SAS L'AVIATION, N° Siren 831647748, dont le siège social est au 37, rue des Aciéries 42000 SAINT-ETIENNE
Parties défenderesses : comparant par Me DDD Avocat
Pour les motifs énoncés en son assignation introductive d'instance en date du 13 mai 2024, à laquelle il conviendra de se reporter quant à l'exposé des faits, et par conclusions déposées le 28 juin 2024, la MASSE DES OBLIGATAIRES représentée par la SAS CLUBFUNDING nous demande de :
Vu l'article 873 du code procédure civile
Vu les articles 1103, 1104, 1217, 1343-2 et 2298 du code civil,
Vu l'article L210-1 du code de commerce,
CONDAMNER la société L'AVIATION à payer à la Masse des Obligataires représentée par CLUBFUNDING, à titre de provision, les sommes suivantes :
7.200.000 euros, au titre de l'émission obligataire, en remboursement du principal ;
1.404.000 euros au titre des intérêts échus et non réglés, sauf à parfaire ;
ORDONNER la capitalisation des intérêts de retard ;
CONDAMNER la société L'AVIATION à payer à la Masse des Obligataires représentée par la société CLUBFUNDING à titre de provision la somme de 432.000 euros à valoir sur l'indemnité conventionnelle égale à 6% (six pourcent) des montants échus ;
CONDAMNER la société ATRIUM à payer à la Masse des Obligataires représentée par CLUBFUNDING, à titre de provision, la somme de 8.109.000 euros au titre de la mise en œuvre de la garantie à première demande ;
CONDAMNER in solidum la société L'AVIATION et la société ATRIUM au versement au profit de la Masse des Obligataires représentée par la société CLUBFUNDING la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNER in solidum la société L'AVIATION et la société ATRIUM aux entiers dépens de l'instance, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions des articles 695 à 699 du code de procédure civile ;
RAPPELER en tant que de besoin que l’exécution provisoire est de droit.
L'affaire a été évoquée pour la première fois le 31 mai 2024 et renvoyée à l'audience du 28 juin 2024 et enfin en cabinet, à l’audience de ce jour.
La SAS ATRIUM et la SAS L’AVIATION déposent des conclusions motivées par lesquelles elles nous demandent de :
A titre liminaire :
JUGER qu'aucune délibération d’assemblée générale n’a été prise, donnant mandat au Demandeur d’introduire la présente action.
En conséquence :
JUGER que la présente action doit être déclarée d’office irrecevable.
A titre principal :
JUGER que le terme « Coupon » n’est pas défini dans le Contrat d'émission des obligations, de telle sorte qu’il est matériellement impossible de déterminer un tel vecteur référentiel, sauf à interpréter les termes du contrat.
JUGER que tout porte à croire qu’il semblerait d’une mensualité — il est fait mention de « Coupon mensuel » - sans pour autant qu’un tel élément puisse être établi avec certitude.
JUGER que cette clause est purement potestative
JUGER qu’il y a dès lors un défaut patent de lisibilité, qui induit nécessairement une notion d'interprétation des termes du contrat, faculté qui échappe au juge des référés.
JUGER que le juge des référés ne peut pas interpréter les clauses d'un contrat.
JUGER qu’il s’agit d’une contestation sérieuse
En conséquence :
DEBOUTER la société CLUB FUNDING de l'intégralité de ses demandes
JUGER que l'intégralité des demandes n’ont pas fait l’objet d’une mise en demeure préalable
JUGER qu’il s’agit d’une contestation sérieuse
En conséquence :
DEBOUTER la société CLUB FUNDING de l'intégralité de ses demandes
JUGER que la société ATRIUM ne pouvait concéder la moindre garantie à première demande.
JUGER que la garantie à première demande était parfaitement disproportionnée.
JUGER qu’il s’agit d’une contestation sérieuse sur le fond En conséquence :
DEBOUTER la société CLUB FUNDING de l'intégralité de ses demandes
Juger que l’ensemble des taux réhaussés prévus dans les avenants du 28 octobre 2021 et du 21 juillet 2021 sont parfaitement inapplicables.
En conséquence :
DEBOUTER la société CLUB FUNDING de l'intégralité de ses demandes En toutes hypothèses
CONDAMNER la société CLUB FUNDING à la somme de 5.000 € sur le fondement de l'Article 700 du Code de Procédure Civile à chacune des défenderesses
CONDAMNER la société CLUB FUNDING aux entiers dépens de l'instance.
Après avoir entendu les conseils des parties en leurs explications et observations, nous avons remis le prononcé de notre ordonnance, par mise à disposition au greffe, le 19 août 2024
SUR CE,
Sur la fin de non-recevoir
La défenderesse expose que CLUBFUNDING n’a pas qualité à agir, le pouvoir donné par la masse des obligataires devant obligatoirement être donnée en assemblée générale.
Elle vise à ce titre dans sa motivation l’article L228-54 du code de commerce qui dispose que seule l’assemblée générale a le pouvoir d’autoriser une action en justice et qu’à défaut l’action doit être dite irrecevable.
CLUBFUNDING rétorque qu’il convient de faire usage de de l’article L228-46-1 du même code, et qu’en conséquence la consultation dont la preuve est versée au débat est valable, de telle sorte que selon elle l’action est recevable.
L'article L228-46-1 susvisé dispose ainsi :
Les décisions de la masse des obligataires sont prises en assemblée générale. Toutefois, ces décisions peuvent également être prises à l'issue d'une consultation écrite, y compris par voie électronique, si le contrat d'émission le prévoit et selon les modalités de délai et de forme définies par celui-ci.
Il résulte donc de cet article que d’une manière générale, les décisions de la masse des obligataires peut être prise à l'issue d’une simple consultation, y compris par voie électronique, comme l’indique la demanderesse dans ses conclusions.
Quant à l’article L228-54 du même code, celui-ci dispose :
Les représentants de la masse, dûment autorisés par l'assemblée générale des obligataires, ont seuls qualité pour engager, au nom de ceux-ci, les actions en nullité de la société ou des actes et délibérations postérieurs à sa constitution, ainsi que toutes autres actions en justice ayant pour objet la défense des intérêts communs des obligataires, (…)
Toute action en justice intentée contrairement aux dispositions du présent article doit être déclarée d'office irrecevable.
Ainsi l’article L228-54, qui impose une autorisation de l'assemblée générale, ne concerne pas l’ensemble des décisions que pourrait prendre la masse des obligataires, mais seulement certaines de ces décisions, et notamment les actions en justice.
Il en résulte que les dispositions de l’article L228-46-1 du code de commerce, qui autorisent une simple consultation plus légère qu’une convocation d’assemblée générale, sont plus générales que celles de l’article L228-54 du même code.
Dès lors, le particulier dérogeant au général, il convient de faire application des dispositions de l’article L228-54 qui visent spécifiquement les actions en justice.
Or CLUBFUNDING reconnait elle-même qu’elle a consulté la masse par courrier électronique, conformément aux dispositions du contrat. Elle reconnait donc ne pas avoir organisé d’assemblée générale.
Dès lors, faisant application du troisième alinéa de l’article L228-54 du code de commerce qui s'applique donc au cas d’espèce, nous dirons l’action irrecevable.
L’équité le commandant, nous dirons n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du CPC.
Nous condamnerons la masse des obligataires, représentées par CLUBFUNDING aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant par ordonnance contradictoire et en premier ressort,
Disons la masse des obligataires représentée par CLUBFUNDING irrecevable en son action.
Disons n’y avoir lieu à article 700 du CPC
Condamnons en outre la masse des obligataires représentée par CLUBFUNDING aux dépens de l'instance, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 58.92 € TTC dont 9.61 € de TVA
La minute de l'ordonnance est signée par M. AAA président et M. BBB greffier.
Le greffier, Le président.
Signé électroniquement par Signé électroniquement par
M. AAA M. BBB