Bonjour
Petite contribution un peu tardive pour cause de panne de connexion de 24h00.
zian a dit:
Pourquoi le sujet de l'inflation serait réservé à la section bourse ?
Je partage cette interrogation avec @zian .
Si les marchés financiers sont largement influencés par l’évolution de l’inflation, il en va de même pour le marché immobilier, et par voie de conséquence, le crowd immo.
Un investisseur de ce secteur qui exclurait a priori et de manière générale toute donnée macro-économique de sa réflexion considérerait sa problématique «par le petit bout de la lorgnette» et s’exposerait sur le moyen terme aux conséquences d’un retournement de conjoncture; je précise sur le «moyen terme», car comme précisé et reprécisé il y a quelques pages, l’inertie du marché immobilier n’a rien de comparable avec la réactivité des marchés financiers; mais l’ampleur des mouvements peut y être tout aussi forte, comme l’a montré l’épisode du début des années 90.
J’inclus également dans la réflexion les faits conjoncturels de toutes sortes tels qu’une pandémie, qui peut modifier plus ou moins durablement les priorités des acteurs du marché immobilier (exode citadin, télétravail…) et les soubresauts géopolitiques modifiant nécessairement les circuits d’approvisionnement et les coûts des matières premières. Et j’en oublie, mais l’actualité est actuellement riche en événements pouvant faire basculer tel ou tel dossier déjà en cours, ou pouvant rendre franchement risqué des projets actuellement proposés à la souscription.
Nous vivons dans un pays où la culture économique et financière est – hélas! - encore largement le monopole d’une minorité; or, j’ai la faiblesse de penser que les forums de Moneyvox sont, de par leur qualité, des instruments uniques de partage et de diffusion de cette culture qui nous manque si cruellement, et ce forum «Crowd Immo» est l’un d’eux, que chacun en soit convaincu.
zian a dit:
leurs tergiversations sur l'augmentation ou non des taux :
si cette augmentation permet de freiner l'inflation des prix, ils savent déjà que leur influence sur l'inflation des salaires n'existe presque plus en Europe contrairement à ce qui se passe aux Etats-Unis : donc à aucun moment la spirale dont vous parlez pourrait être un problème en Europe.
Je ne partage pas complètement vos certitudes.
Une inflation des salaires peut être générée, comme actuellement aux USA et vous l’avez relevé, par une surchauffe de l’activité et un taux de chômage en chute libre; les entreprises n’ont d’autre choix, pour parvenir à embaucher, qu’augmenter leurs salaires. Je note également et accessoirement que certains secteurs de l'économie française cherchent désespérément à embaucher (curieusement, d'ailleurs, et je n'ai toujours pas compris qu'après la crise sanitaire, le taux de chômage se soit retrouvé plus pas qu'au début? Je ne peux que supposer que la fin tardive de la mise sous perfusion de notre économie pendant cet épisode n'a pas encore été suivie de la chute des canards boiteux).
Mais ce peut être aussi l’inflation des prix qui commande celle des salaires, d’où le début de la spirale, et il est certainement aussi dans l’optique de la BCE de tenter de l’enrayer préventivement en augmentant ses taux; quels effets réels en attendre? Sans doute minimes en l’occurrence… J'estime tout comme vous que la situation européenne, et plus particulièrement française, est particulièrement difficile, car les marges des entreprises déjà «au taquet» ne permettent plus complètement la restauration du pouvoir d’achat de leurs salariés; c’est pour cela que vous espérez que l’inflation revienne en deçà des 2% annuels, et ceux de la BCE à 0, avec possiblement la poursuite du «quantitative easing».
Mais il ne suffit pas d’invoquer le miracle pour que celui-ci survienne; si la crise ukrainienne dure des années, comme je l'imagine, les matières premières vont continuer à flamber – dont l’énergie à la base des matériaux utilisés dans la construction, la BCE va continuer à augmenter ses taux, la croissance va ralentir, s’arrêter, et pourquoi pas passer en négatif; vous évoquiez la stagflation? J’irai plus loin et parlerai de slumpflation. Dans le même temps, nos braves dirigeants politiques dont l'incompétence le dispute à la démagogie, trouveront toujours le moyen de faire augmenter les salaires, du secteur public d’abord, puis du privé, jusqu’à ce que leurs successeurs prennent la relève, et ne fassent surtout rien de mieux. Puis immanquablement, lorsque la machine sera définitivement grippée, les gilets jaunes deviendront rouges; le rouge était gratuit quand le jaune était acheté…
La suite? Elle est écrite depuis que le courage politique (tiens, moi aussi je donne dans l’oxymore) a déserté la France (et ça fait 50 ans que tout ça dure): elle va se passer dans la rue, et encore plus si le FMI vient s’occuper de nos petites affaires… On n’y est pas encore, mais...
Le lien avec l’immobilier et le crowd immo? La fiction continue... jusqu'à ce qu'elle rattrape la réalité.
Comme déjà relevé, l’immobilier a une inertie plus grande que les autres placements, mais dans quelle mesure si la situation ne fait que se détériorer? Les investisseurs peuvent eux aussi choisir d’anticiper les grands mouvements. Si le scénario-catastrophe ci-dessus se confirme (attendons la fin 2022 pour voir si - hors victoire militaire décisive assez improbable de l'un sur l'autre - Russie et Ukraine font seulement mine de revenir sur leurs positions intransigeantes respectives), le secteur de la promotion immobilière pourrait voir ses coûts exploser (c’est déjà parti!); les acheteurs suivraient, mais pas longtemps (pouvoir d’achat en baisse, coût du crédit en hausse); des acteurs disparaîtront (en entraînant leurs créanciers dans la débâcle), et une concentration aura lieu. Les MdB tireront leur épingle du jeu un certain temps, mais avec des marges rétrécies, fragilisant leurs positions et faisant courir un risque accru aux obligataires. Quant aux plates-formes de crowd immo... idem, disparition des plus faibles du fait de l'attrition du marché, et concentration.
Pour moi, plus que jamais, la sélection des dossiers est donc de mise, en privilégiant les dossiers de court terme, à forte marge, et en analysant attentivement et impérativement les grands postes des bilans prévisionnels pour la valider; et persiste et signe, les taux de capitalisation servant à la valorisation des biens vendus loués doivent être particulièrement scrutés.
On peut y croire, ou pas.
Mais l'objet de ce post était surtout de faire comprendre qu'on ne peut pas dissocier un secteur d'investissement comme l'immobilier et le crowd immo de l'environnement macro-économique, et que lors d'une décision d'investir, ce facteur doit être pris en compte au premier chef.
Si chacun ici l'a finalement compris, que mon roman-fiction se réalise ou pas (et je ne l'espère pas, mais...) n'a aucune importance: j'aurai apporté ma pierre.