Bonjour
Chris78 a dit:
Du coup, je serais curieux d'en savoir plus sur votre perception du business-model d'Anaxago.
La plupart des PF se rémunèrent en facturant à l’opérateur un forfait pour l’étude de son dossier, et un pourcentage sur les fonds levés à son profit; Wiseed et MyCapitalImmo facturent en plus aux obligataires un pourcentage sur leur investissement.
Le financement prend alors la forme d’un emprunt obligataire simple à taux fixe. Dans ce cas de figure - le plus courant, chaque partie, emprunteur, intermédiaire ou prêteur sait
dès le départ ce qu’il aura à débourser ou à encaisser. C’est simple, et le montage juridique est simple. Anaxago, concernant ses dossiers de financement en obligations convertibles en actions (OCA), les plus nombreux et les plus lourds (plusieurs M€), sort très largement de ce schéma.
Le principe de l’opération de financement proposée par Anaxago et vu du crowdfunder, c’est de disposer d’une rémunération qui se décompose en un fixe (5-6% annuels), puis en un éventuel bonus variable fonction de la marge finale au débouclage du projet; le TRI final dépend donc très largement de la performance de l’opérateur.
L’intérêt de l’opérateur, c’est qu’en cas de dépenses plus importantes que prévues ou de délais rallongés, il n’aura pas à supporter les charges d’intérêts plus élevées d’une plate-forme «standard»; et là aussi, c’est à double tranchant, car si tout se passe bien, il sera obligé de céder une partie de son résultat aux obligataires.
Quant à Anaxago, il peut proposer une offre originale, et accessoirement (ou principalement?) maximiser ses gains parce qu’il applique des frais à tous les étages… Il faut dès lors bien être conscient que les taux affichés sur les présentations de tels dossiers, qui traduisent en partie des anticipations d'événements non maîtrisables, ne sont que des
estimations non contractuelles.
Il va sans dire que le montage juridique est ici plus complexe que ce que l’on trouve habituellement ailleurs. Grosso modo,
- les crowdfunders financent une structure intermédiaire ad hoc créée par Anaxago (l’Emetteur, qui leur délivre les OCA en échange),
- qui elle-même s’associe avec l’opérateur et alimente dans la structure opérationnelle (la Cible) un compte courant d’associé (CCA) rémunéré;
- tout au long de l’opération, les remontées de la rémunération du CCA par la Cible (bénéficiant elle même des produits du projet) contribuent à servir l'emprunt obligataire;
- à la fin de l’opération, la part du résultat net revenant à l’Emetteur est ensuite remontée aux obligataires pour leur bonus variable.
- Si un événement imprévu survient, qui met l’opérateur dans l’incapacité d’honorer ses engagements, les OCA sont converties et la masse des obligataires prend de fait le contrôle de l’Emetteur, ainsi que le contrôle opérationnel de la Cible, et essaye de récupérer ce qui peut l'être.
Anaxago se rémunère:
- au niveau de l’Emetteur en levant des frais d’entrée et des frais annuels de gestion précomptés; sur un projet de 3-4 ans, ça équivaut à peu près au niveau de frais d’une plate-forme «normale», mais ici, ce sont les investisseurs qui payent;
- également au niveau de la Cible, histoire de faire raquer l’opérateur, mais c’est plus opaque et il faut directement s’adresser à Anaxago pour avoir le détail, qui ne figure pas dans les DIRE
- et enfin, si le TRI final de l’obligataire atteint un certain niveau, Anaxago prend encore un «carried interest» sous forme d’un pourcentage de la surperformance, pour se récompenser de nous avoir dégotté un bon cheval.
Ces projets sont longs – 3 ans ou plus, et je préfère actuellement les projets plus courts. Ils sont également, et surtout, bien plus complexes à analyser, en ce que tout ce qui peut impacter la marge du projet, comme sa durée, ses charges et les prix de vente des biens, impactera également le TRI de l’obligataire; il faudrait donc paramétrer soigneusement une feuille de calcul pour effectuer des simulations et déterminer le TRI final le plus probable, qui pourrait être bien différent de celui affiché par la plate-forme. Et voir enfin si le risque pris en vaut la chandelle, parce que le principe de sélection reste toujours le même: 1/ évaluer le risque, puis si l’on est prêt à l’accepter, 2/ déterminer s’il est correctement payé par le taux proposé, et 3/ prendre sa décision.