MAJ Septembre 2023 (1/2)
Bad news are good news ?
Le 18/08/2023, une large majorité d'économistes, 99 sur les 110 économistes interrogés par Reuters, ont fait le pari que la Réserve fédérale américaine (Fed) en avait probablement terminé avec les hausses de taux d'intérêt, et beaucoup d'entre eux estiment désormais que la banque centrale attendra au moins la fin mars 2024 avant de baisser le coût du crédit.
"Le président Powell a dit que la décision résulterait des données à venir sur la croissance et l'inflation, qui, selon nous, montreront suffisamment de signes de modération pour dissuader de nouvelles hausses de taux ", estime Sal Guatieri, économiste chez BMO Capital Markets.
Les dernières statistiques macroéconomiques en provenance des Etats-Unis sont mauvaises, et laissent anticiper une fin de hausse des taux de la part de la FED :
Bad news (macro-économiques) are good news (boursières).
Aux États-Unis, le département du Commerce a indiqué que l'indice des prix à la consommation "PCE", la métrique d'inflation préférée de la Réserve fédérale américaine, est resté stable en juillet par rapport au mois précédent. Sur une base annuelle, l'indice a augmenté de 3,3%, ce qui est en ligne avec les prévisions du marché.
Les économistes notent que 90% de l’inflation globale des prix à la consommation aux Etats-Unis est imputable au coût du logement, qui devrait encore baisser à mesure que la modération des loyers entrera dans le calcul de l’inflation. L’augmentation des prix en glissement mensuel est désormais compatible avec l’objectif de la Fed, à savoir une inflation annuelle de 2%.
Côté marché du travail :
D'après le dernier rapport d'ADP, les créations d'emplois dans le privé aux États-Unis au mois d'août se sont établies au nombre de 177.000, contre un consensus de 195.000. Ce qui porte le taux de chômage aux Etats-Unis en août à son plus haut niveau depuis février 2022. Le taux de chômage s'établit à 3,8%, contre 3,5% en juillet.
Bad news are good news !
Les taux à 10 ans des Etats-Unis qui avaient touché un pic de 16 ans à 4,37% ont reflué suite à ces chiffres de la macro pour revenir à 4,09%, ce qui a stimulé les valeurs de croissance.
Pour que les actions aient durablement le vent en poupe, il faudrait que la Fed prépare les esprits à une baisse de ses taux. Or cette perspective semble encore lointaine.
Par conséquent, le potentiel de hausse pour les indices boursiers dans leur ensemble semble limité.
Et ce, d'autant plus que la zone euro et la Chine ne cessent d'inquiéter et que des nuages noirs s'amoncèlent sur les Etats-Unis.
Europe :
En Europe, les indices PMI d’activité s’effritent mois après mois. Les derniers PMI ont retrouvé leurs plus bas niveaux, hors épisode pandémie du Covid, depuis la crise des dettes souveraines de 2011-2012, et plusieurs pays de la zone euro, dont l'Allemagne et les Pays-Bas, sont désormais en récession.
Les récentes publications des sociétés sont plutôt mitigées, notamment sur les perspectives pour lesquelles les entreprises affichent maintenant une grande prudence, alors qu'elles ne voyaient aucune ombre au tableau il y a encore peu.
Plusieurs entreprises ont indiqué des difficultés pour maintenir leur pricing power alors que l’environnement économique pèse de plus en plus sur la demande.
Même l'alimentation décroche. Pourtant, s'il y a un secteur ayant une grande résilience, c'est bien le secteur alimentaire.
Carrefour a perdu 4,55% en clôture du 29/08/2023, jour où le PDG Alexandre Bompard a alerté sur une baisse de la consommation en France, notamment sur les produits de première nécessité en raison des prix élevés. "
C'est un tsunami de déconsommation", a-t-il déclaré.
Chine :
La Chine, deuxième économie mondiale, voit sa croissance ralentir de plus en plus avec une crise de l'immobilier qui n'en finit pas de s'enfoncer dans le marasme.
Or, l'immobilier représente une part très importante du patrimoine des ménages chinois.
La valeur du patrimoine immobilier représenterait 78% de celle des actifs des ménages chinois en 2017, contre 35 % aux États-Unis et 57 % dans la zone euro (données du ministère de l'économie et des Finances de la France, août 2022).
Etats-Unis :
Des nuages noirs s'amoncèlent sur les Etats-Unis.
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Le surplus d’épargne accumulé par les Américains pendant la crise covid est à présent intégralement consommé. Selon la Réserve fédérale de San Francisco, moins de 10% de l’épargne excédentaire accumulée par les consommateurs pendant la pandémie de Covid subsistait en juin 2023. Ce sont ces dépenses faites par les ménages américains qui ont soutenu l'activité économique US.
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Le moratoire sur la dette étudiante qui a été mis en place durant la pandémie de Covid arrive à son terme. La Cour suprême a rejeté le projet d’annulation partielle porté par Joe Biden.
Aux États-Unis, 46 millions d’étudiants ont contracté une dette, pour un montant total de 1770 Mds$, dont quelque 217 milliards arrivent à échéance chaque année.
Un impact significatif sur leur budget et de moindres dépenses de leur part qui pourraient représenter une
perte de croissance du PIB allant jusqu’à 0,2% durant les trois derniers mois de l’année.
- Enfin,
les taux sur les cartes de crédit se sont envolés à plus de 22%, entraînant une hausse rapide des défauts de paiement sur ces crédits court terme à la consommation. Cela finit par impacter négativement les ventes, comme l’a souligné l’enseigne de grande distribution Macy's lors de la dernière publication de ses résultats trimestriels.
Et si les banques centrales étaient allées trop loin dans la hausse des taux ?
Certains économistes font remarquer que la hausse des taux est intervenue dans une période où les facteurs macro-économiques ont été largement conditionnés par la sortie de crise pandémique avec une forte reprise de la consommation sur fond d'importantes aides étatiques.
La hausse des taux a été tellement forte, la plus forte jamais enregistrée par les États-Unis sur une aussi courte période, que son réel effet a été longtemps masqué par la forte reprise post-pandémie.
Il se pourrait bien qu'en cet automne qui arrive, la réalité finisse par éclater aux yeux de tous, banques centrales, marchés financiers, et simples citoyens.
C'est le risque pour cette seconde partie d'année 2023.
L'atterrissage en douceur (soft landing) semble rester le scenario central pour les Etats-Unis avec une inflation revenant sous les 3%, une croissance économique s'établissant à environ 1% en annuel, et un chômage augmentant légèrement.
Un scenario presque idéal pour les Etats-Unis.
Il risque d'en être autrement pour la Chine et l'Europe.
Le directeur de l'INSEE a dit sur une radio financière qu'il faut s'attendre à une dégradation significative des données économiques au cours des prochains mois.
Le PDG de
Carrefour a parlé de "
tsunami de déconsommation".. Le titre perd 4,5% le jour-même.
Pernod Ricard annonce de très bons résultats annuels avec une hausse de 10% de son CA... Mais fait état de perspectives médiocres pour le premier trimestre de l'exercice 2023/2024, débuté en juillet, notamment aux Etats-Unis et en Chine. Le titre perd 6,74% le 31/08/2023; le jour de l'annonce de ses résultats.