Réponse @ Aristide & Pollux & Fred & Sven
Le choix d’un mode progressif ou dégressif d’amortissement
Le principe :
Dans un contrat à durée déterminée, le terme est réputé convenu dans l’intérêt commun des parties : il s’agit simplement, à l’issue de cette durée, de faire en sorte que la dette soit remboursée et les intérêts payés.
Ainsi, le taux a pour finalité de permettre en premier lieu de rendre le prêt et, de manière accessoire, de payer les intérêts : on ne peut donc dissocier ces deux fonctions du taux sans un accord exprès.
Cet accord est toujours possible mais suppose alors la délivrance d’une information loyale par le prêteur pour que l’emprunteur puisse opérer un choix.
Il n’y aurait donc rien de
« critiquable ou d’illégal » comme le relève justement Aristide à décider par exemple que tous les termes de paiements soient de chiffrage différents les uns des autres, le taux moyen du prêt ou le TEG demeurant inchangés par rapport à ce qui découlerait d’un chiffrage constant de chacun des termes ou de leur mode progressif ou dégressif de remboursement.
On peut donc parfaitement déroger au principe de calcul, puisqu'il n'est pas d'ordre public et, dans ce cas,
il existe une infinité de tableaux d’amortissement pouvant répondre à l’offre d’un prêt comportant un taux, une durée et un TEG déterminés.
Mais il apparait bien que le
mode dégressif d’amortissement est celui de
principe puisque c’est le seul qui réponde au principe fondamental « valeur présente – valeur future », chaque actualisation d’un paiement permettant de retrouver la partie du capital remboursée à l’échéance.
Là réside sa « légitimité ».
- Dans le mode progressif, les intérêts sont calculés sur la dette résiduelle (le capital restant dû).
- Dans le mode dégressif, les intérêts se calculent sur la fraction de dette que rembourse chaque échéance.
Dans ce dernier mode, en cas de remboursement anticipé, le montant alors restitué au prêteur doit supporter les intérêts qui s’y raccordent (intérêts composés) puisqu’ils n’ont pas été réglés, en sorte qu’un tel remboursement anticipé n’aura pas d’incidence sur la dette elle-même en principal et intérêts.
Le choix d’un mode dégressif serait donc
neutre sur l’évolution des taux, le maintien des marges bancaires et la position concurrentielle avec des établissements d’autre nationalité.
La différence portera sur l’assiette de calcul de l’indemnité de remboursement anticipée, sujet qui n’est pas vain puisqu’il apparait que plus d’un crédit sur deux n’arrive pas à son terme.
L’avantage de l’option :
Pourquoi, dès lors, choisir un remboursement suivant le mode dégressif plutôt que progressif ?
S’agirait-il d’un « artifice » ou d’un « exercice de style » comme l’écrivaient certains le 20/04/2009 ?
Un exemple concret contribuera à éclairer :
Une entreprise se crée et finance ses investissements (matériel, stock et fonds de roulement) par recours à l’emprunt et dépassera le seuil de pérennité de trois ans : les intérêts versés par elle sont déductibles de son résultat fiscal.
Dans le cadre d’un remboursement suivant le mode progressif :
Les intérêts sont maximalisés (étant calculés sur l’assiette de la dette elle-même)
Cela ne présente pas d’avantage pour cette entreprise puisqu’elle ne réalise pas ou peu de bénéfices sur sa période de démarrage, bénéfices sur lesquels elle aurait pu imputer ces intérêts déductibles.
Et plus elle fera de bénéfices au fur et à mesure de sa croissance, plus augmentera dans ses échéances de remboursement une part de capital qu’elle ne pourra pas déduire de son résultat soumis à l’impôt : elle va donc payer l'impôt sur le capital qu'elle rembourse, impact d'autant plus inadéquat que l'amortissement bancaire de la dette ne correspondra pas à l'amortissement fiscal des biens financés.
Dans le cadre d’un remboursement suivant le mode dégressif :
Peu d’intérêts sont inclus dans les premiers termes de remboursement,
étant calculés sur la fraction de dette que rembourse l’échéance : pas d’inconvénient pour l’entreprise puisque l’absence de bénéfices à son démarrage ne lui aurait pas permis de trouver avantage fiscal.
Mais, lorsqu’elle aura atteint sa « vitesse de croisière », plus elle avancera dans le temps et réalisera de bénéfices, plus elle pourra déduire d’intérêts de son revenu imposable et, maîtrisant ainsi sa fiscalité, dégager des liquidités et financer sa croissance.
On le voit, le choix d’un mode d’amortissement a une incidence directe sur la fiscalité de l’entreprise et celui mis en oeuvre dans la pratique n’est pas forcément le plus avantageux pour elle.
Sur les parts sociales et le TEG :
Le TEG, fixé à l’offre de prêt ou à l’acte réitératif de celle-ci, ne prend en considération que les éléments connus ou prévisibles au jour de sa détermination ; la rémunération des parts ne semble pas connue au jour de ce calcul mais, si elle l’était, elle devrait en effet être intégrée à celui-ci.
Et si la Cour de Cassation a sanctionné la pratique consistant à ne pas tenir compte de la souscription de telles parts lorsqu’elle est obligatoire, c’est simplement parce que la loi impose de prendre en considération tous les frais directs ou indirects raccordés à l’opération de crédit.
On peut d’ailleurs raisonner de la même manière avec d’autres frais tels que ceux
d’information annuelle à la caution : au jour d’émission de l’offre devant tenir compte de ces frais perçus annuellement, seule la rémunération courante est connue et doit être intégrée au calcul, celle des années postérieures ne l’est pas puisque la tarification bancaire est susceptible d'évolution.
Pour un prêt à taux indexé également, le TEG n’a évidemment pas à tenir compte d’une variation du taux qui ne peut être connue le jour où il est fixé.
Sur l’assiette des intérêts :
Si l’on emprunte une somme remboursable en une seule fois après un an au taux de 10%, les intérêts se calculent ils sur la somme remboursée ou sur celle empruntée ?
Evidemment, c’est la même chose ici et le calcul suivant le mode dégressif ou celui progressif donnera le même résultat s'il n'y a qu'une échéance.
Mais il est vrai que, juridiquement (en droit français), on considère que les intérêts ne sont pas autre chose que l’accessoire d’une dette.
En conséquence, chaque fois que l’on paye la dette ou une fraction de celle-ci, il parait cohérent que l’on règle les intérêts qui s’y trouvent raccordés et seulement ceux-là.
Dans cette veine, on observera d’ailleurs qu’un contrat de prêt comporte deux obligations principales :
• Non seulement la dette et les intérêts devront être totalement payés à l’issue de la durée du prêt lui-même.
• Mais encore (sauf exceptions tels que prêts « in fine ») des règlements périodiques doivent être honorés à bonne date (les échéances de remboursement).
Il semble donc cohérent de décider que la règle doit être la même quelque soient le nombre d'échéances à honorer, qu’il n’y en ait qu’une seule ou qu’il y en ait plusieurs ; dans ce cas, les intérêts se calculent sur la dette remboursée à l’échéance convenue plutôt que sur celle prêtée (le capital restant dû) sur laquelle ils continuent à courir.
D’un point de vue juridique, il n’y a pas d’incohérence dans cette manière de faire qui, au contraire, parait bien respecter l’orthodoxie.
Cette orthodoxie souligne le caractère imbécile de la notion « d’amortissement négatif » pendant la phase de remboursement d’un prêt : encore une fois, une échéance dite de « remboursement » a pour objet de «rembourser », c'est à dire de rendre à la bourse prêteuse, et non d’augmenter la dette.
Mais, à l’évidence, l’emprunteur reste convaincu qu’il n’existe pas d’autre méthode que celle courante pour rendre ce qu'on lui a prêté et cela révèle un défaut d’information qui parait manifeste.