La Cour d'appel de Troyes condamne la banque pour usage de l'année lombarde dans le calcul des intérêts d'un prêt immobilier !
(Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 26 mai 2020, n° 19/00964)
Cette décision est remarquable en trois points, que l'on retrouve régulièrement dans les affaires où l'usage du diviseur 360 est critiqué :
1) Les actions en nullité de la stipulation de l''intérêt conventionnel et en déchéance du droit aux intérêts sont distinctes : elles n''ont ni la même finalité, ni le même régime juridique. Ainsi, l''action tend à sanctionner, dans le premier cas, la méconnaissance d''une condition de formation de la clause d'intérêts, et dans le second cas, l''inexactitude d''une information pré-contractuelle due à l''emprunteur. En outre, les sanctions prévues, qui peuvent se chevaucher, sans se contredire, n'ont pas les mêmes caractères, dans un cas, la substitution de plein droit du taux d''intérêt légal au taux conventionnel par l'effet de l''annulation de la clause d'intérêts, dans l'autre, la déchéance facultative du droit aux intérêts soumise à l'aléa du pouvoir discrétionnaire reconnu au juge.
2) Le délai de prescription régissant les deux actions est régi respectivement par les articles 1304 et L.110-4 du code de commerce, leur point de départ demeure toutefois le même, à savoir le jour où l'emprunteur a eu connaissance de l'erreur affectant le taux d'intérêts. L'emprunteur étant profane, son action est recevable au-delà de la prescription de 5 ans.
3) Point le plus important, qui est conforme aux textes, même s'il va à l'encontre de la position de la Cour de cassation qui, comme on l'évoque souvent ici, s'est mise, depuis l'arrêt du 27 novembre 2019, à statuer contra legem (ce qui est inadmissible !) :
Le paragraphe III de cet article dispose que pour toutes les opérations de crédit autres que celles mentionnées au II, le taux effectif global est dénommé « taux annuel effectif global » et calculé à terme échu exprimé pour cent unité monétaires, selon la méthode d'équivalence définie par la formule figurant en annexe du présent article.
Il en résulte que cette annexe ne s'applique qu'aux opérations de crédit autres que celles mentionnées au paragraphe II et qu'elle ne concerne donc pas les prêts immobiliers.
Aussi, au cas présent, la cour relevant que le prêt dont s'agit étant un prêt immobilier, le mois « normalisé » ne lui est pas applicable. En effet, le taux d'intérêt n'a pas été calculé sur la base d'une année civile de 365 ou 366 jours.
La violation de cette règle a pour effet d'entraîner la nullité de la stipulation de l'intérêt nominal et la la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel initialement prévu.
Voilà un arrêt bien construit, détaillé, et qui va dans le bon sens.