L'essentiel
- La hausse des taux il y a trois ans a bouleversé le monde de l'assurance vie, profitant aux nouveaux entrants mais piégeant les anciens fonds euros.
- Deux nouveaux fonds se distinguent : « Euro + », assuré par Swiss Life proposé par Placement-direct, et le « Fonds Euro Nouvelle Génération », porté par Spirica.
- Ces fonds récents bénéficient d'un « timing parfait », fournissant plus de 3% de rendement et constituant une opportunité pour les investisseurs.
Le malheur des uns fait le bonheur des autres. La remontée des taux, il y a 3 ans, a bousculé le monde de l'assurance vie. Pour les nouveaux venus, c'est une véritable aubaine. À l'inverse, les anciens fonds euros se retrouvent piégés.
Pour les gestionnaires, c'est la triple peine : ils ont acquis depuis 10 ans des obligations très peu rémunératrices. Il est impossible de s'en débarrasser, car elles ont perdu toute valeur sur le marché. Et pour ceux ayant diversifié leurs investissements sur l'immobilier, la crise du marché des bureaux en rajoute une couche !
La situation est d'autant plus problématique pour les « petits » fonds du web, lancés au milieu des années 2010. Leur portefeuille a en été constitué pendant la période de taux bas. Leur taille faisait leur force : en saisissant des opportunités (immo, corporate...) ils pouvaient rapidement délivrer de belles performances. Sauf que la dynamique s'est retournée, et ces produits peinent désormais à suivre le marché.
Pour beaucoup d'anciens fonds, fermés à la commercialisation, le rebond sera très difficile. Pour ceux encore accessibles, il reste un espoir : que la collecte permette de moyenner à la hausse le rendement global.
Les « gagnants », ce sont les actifs plus récents, lancés depuis moins de cinq ans. Car ils bénéficient d'un « timing parfait » : ils peuvent constituer un stock d'obligations offrant un rendement de 3, 4 ou même plus de 5%. Parmi ces nouveaux fonds, deux acteurs en ligne se détachent.
D'un côté, « Euro + », contrat monosupport assuré par Swiss Life et proposé par le courtier en ligne Placement-direct. De l'autre, « Fonds Euro Nouvelle Génération », porté par Spirica et disponible chez divers distributeurs : Linxea, Meilleurtaux...
Ces produits récents prennent la relève, en livrant plus de 3%. De quoi se placer dans le Top 10 des taux annuels. Leur collecte s'accélérant dans ce contexte idéal, il y a fort à parier que leurs performances se maintiennent, voire s'améliorent, ces prochaines années. Mais comment les départager ? Voici leurs principales caractéristiques, pour vous aider dans votre choix.
1 - Tempo de lancement :
Nouvelle génération (Spirica) : septembre 2020
Euro + (Swiss Life) : novembre 2023
Le fonds de Spirica est arrivé juste avant la nouvelle donne obligataire, alors qu'Euro + a été lancé en plein boom des taux d'intérêt. Nouvelle Génération bénéficie donc d'une antériorité plus importante, qui peut rassurer sur la gestion. À l'inverse, Euro +, au « market timing » idéal, n'a connu à ce jour qu'une seule année complète. Ce qui invite à un peu de prudence.
« Il n'est pas souhaitable de ne regarder que le taux de la dernière année. Mieux vaut raisonner sur une tendance de 2/3 ans. »
D'ailleurs, Gilles Belloir, directeur général de Placement-Direct, rappelle une maxime importante du marché : qu'un fonds livre une mauvaise ou une très bonne performance annuelle, « il n'est pas souhaitable de ne regarder que le taux de la dernière année. Mieux vaut raisonner sur une tendance de 2/3 ans. »
Yves Conan, directeur général de Linxea, est sur la même ligne : « Il faut leur laisser le temps de grossir tranquillement. Une bonne gestion de fonds dépend de la qualité de l'assureur à maîtriser son produit. » L'enjeu est de voir comment la collecte sera pilotée, notamment quand les conditions de marché se dégradent.
Match nul. Nouvelle Génération rassure avec le bénéfice de l'ancienneté. Euro + est intéressant, car il est né au bon moment.
2 - Collecte et composition :
Euro + : L'actif est tout jeune. Son encours à fin mars s'élevait à 140 millions d'euros. Néanmoins, la collecte est vive : 95 millions sur l'année 2024, et 30 millions sur le seul premier trimestre 2025 ! Fin mars dernier, le portefeuille se composait à 85,8 % d'obligations, 13,9 % de fonds à l'esprit similaire (prêts aux entreprises, produits datés à haut rendement) et 0,3 % de fonds monétaires.
Fonds Euro Nouvelle Génération : l'encours a bien grandi sur les 3 dernières années. Au 31 décembre 2024, il a atteint 2,7 milliards d'euros. Et si Spirica reste discret, des bruits de couloir suggèrent que le fonds était « en dessous des 2 milliards » fin 2023. Soit plus de 500 millions d'euros collectés l'an passé, qui permettent aux actuaires d'investir massivement dans de bonnes obligations. Entre 2023 et 2024, leur pondération a ainsi basculé de 41% à 2/3 de l'allocation.
Mécaniquement, la proportion d'immobilier a fondu de 47 à 22%. « Dans ce timing parfait, cela permet une forte relution du portefeuille », glisse Yves Conan. D'autant que les gestionnaires privilégient les obligations « corporate », dont les taux dépassent les 5%, aux titres souverains.
Match nul. Le profil d'Euro + lui offre l'occasion de se créer une belle base de rendement. Pour Nouvelle Génération, la réorientation vers les obligations au détriment de l'immobilier permet un rebond qui peut asseoir les performances.
3 - Rendement
Euro + : 3,6% (2024), 4,10% (sur fin 2023).
Nouvelle Génération : 3,13% (2024 et 2023), 2,3% (2022), 1,65% (2021)
Pour sa première année complète, Euro + a frappé un grand coup ! Le fonds proposé par Placement-direct se classe 3e du palmarès 2024. Et même 2e, si l'on prend en compte les produits 100% accessibles. Bien évidemment, c'est un peu tôt pour tirer des conclusions définitives.
Nouvelle Génération, 9e du classement, bénéficie d'un petit historique de rendement. En grandissant progressivement au bon moment, sa performance a suivi l'évolution des taux. Très visible, il reçoit de plus en plus de capitaux, et peut donc se renforcer. Grâce à sa taille modérée réduite, cela tire rapidement le résultat vers le haut.
Léger avantage pour Euro +, au vu du taux de l'an passé. Mais à voir pour la suite !
4 - Garantie en capital
Euro + : 100%
Nouvelle Génération : 98%
Les approches sont différentes. Le contrat de Placement-Direct étant très orienté obligataire (qui rémunèrent tant qu'elles ne sont pas vendues), il peut se permettre la garantie totale. Le fonds de Spirica, plus diversifié, fait le choix du 98%, qui lui permet de prendre plus de risques, comme on peut le voir avec l'immobilier. Dans un cas extrême, cela peut provoquer une performance négative. Mais cette situation, au vu de la composition du portefeuille, reste peu probable.
Avantage Euro+. La garantie en capital à 100%, même si elle limite les prises de risques, a de quoi rassurer les épargnants.
5 - Conditions
Euro + : Plafond de versement de 50 000 euros. 0,6% de frais de gestion annuels sur le fonds euros. Accessible à 100% sans contraintes d'unités de compte. Pas de frais sur versement, hormis une adhésion de 10 euros. Plancher d'ouverture : 500 euros.
Nouvelle Génération : Plafond de 5 millions d'euros. Jusqu'à 2% de frais de gestion annuels sur le fonds. Pour les contrats internet : accessible à 100% sans contrainte d'UC, pas de frais sur versement. Plancher d'ouverture : 500 euros. À noter : pour les contrats Netlife, tout versement impose une contrainte de 25% d'UC.
Tout dépendra donc du patrimoine de chacun. Le plafond de 50 000 euros d'Euro + correspond déjà à une somme rondelette, d'autant plus dans le cadre d'un investissement vers un nouveau contrat. Par contre, pour les petits patrimoines, les 10 euros d'adhésion impactent la performance : cela correspond tout de même à 2% de « frais » sur 500 euros.
Si l'on a plus d'argent à placer, l'actif de Spirica est plus adapté. Mais dans les deux cas, les profils les plus « sécures » trouveront leur bonheur, puisque les deux actifs sont accessibles sans contraintes, sans frais sur versement. À noter : selon nos informations, Spirica n'a pas l'intention d'atteindre un jour les 2% de frais de gestions sur son fonds.
Match nul. Chaque contrat a ses avantages et ses inconvénients. Le choix se fera selon le montant à investir !
6 - Type de Contrat
Euro + : Monosupport
Nouvelle génération : Multisupport, avec 0,5% de frais de gestion sur les UC.
Voir apparaître Euro +, un contrat monosupport sur le marché en ligne est quelque chose d'étonnant. La tendance était plutôt à mettre à disposition un vaste champ d'unités de comptes, pour compléter son investissement ou arbitrer en cas de baisse du fonds euros. C'est ce qu'offrent d'ailleurs les contrats Spirica (Linxea, Meilleurtaux...), avec leur catalogue de centaines d'UC de catégories variées, aux frais très légers.
Avantage Nouvelle Génération. Euro + cible à 100% les profils sécures. Mais en cas de performance décevante, il n'existe pas d'alternative.
7 - Bonus en cours
Euro + : Plus d'offres boostées depuis 2024.
Nouvelle Génération : Pour les versements supérieurs à 100 000 euros, +1,1 à +1,5 point de bonus, selon la part d'unités de compte.
Après de gros bonus l'an passé, les assureurs ont réduit la voilure. Sauf, du côté de Spirica, pour les gros patrimoines. Car les versements supérieurs à 100 000 euros ont un double intérêt. Il est plus facile de gérer et investir de grandes sommes. Dans le même temps, les clients effectuant des versements importants ont moins tendance à quitter rapidement le navire.
Léger avantage pour Nouvelle Génération. Le boost reste réservé à un public limité.
8 - Perspectives
Euro + : Éviter le risque de dilution
Nouvelle Génération : Surfer sur les obligations.
Difficile de prédire l'avenir. Mais alors que ces deux fonds se renforcent, un retournement de tendance des taux pourrait avoir un impact inverse.
C'est d'autant plus le cas pour Euro +, dont l'exposition extrême aux obligations et la taille réduite le font comparer par un expert à un « un hors-bord qui peut être secoué en cas de houle ». Car la dilution peut être rapide, et en l'absence de réserves, la performance sera tout de suite impactée.
Du côté de Nouvelle Génération, « qui s'approche plus d'un gros bateau », la secousse serait réelle, mais le stock, bien plus important, lui laissera plus d'inertie avant de tanguer. Même si là encore, des réserves « ultra limitées », selon nos sources, ne permettront pas d'écoper trop longtemps. « Il ne faut pas mettre tout son argent dans ces nouveaux fonds, pour un écart de 0,3 ou 0,5 point. C'est sympa de tester... Mais il y a toujours un risque », estime notre expert.
Avantage Nouvelle Génération, un peu mieux armé dans la tempête.
9 - Le point de vue des spécialistes
« Cela vaut donc le coup d'investir dans ces deux fonds, pour un client qui recherche la sécurité. D'autant plus qu'il n'y a pas de frais d'entrée. »
Cyrille Chartier-Kastler, fondateur du site Good Value for Money : « Les nouveaux leaders se sont lancés sur la nouvelle donne obligataire. Les taux positifs risquent donc de durer, et offrent la capacité de servir un moment des rendements élevés. Si les taux baissent, ils seront mieux positionnés que les autres. Cela vaut donc le coup d'investir dans ces deux fonds, pour un client qui recherche la sécurité. D'autant plus qu'il n'y a pas de frais d'entrée : on a accès à une épargne sécurisée au taux positif net d'inflation. C'est presque une anomalie !
Les deux contrats se ressemblent. Mais attention : dans les conditions générales, Swiss Life s'autorise à fusionner Euro + avec d'autres fonds de la compagnie. La richesse pourrait alors être totalement diluée. Spirica, de son côté, peut avoir une tendance à la rotation des fonds. L'assureur peut décider, d'un coup, de lancer un nouveau produit. Ce qui pourrait nuire à ce fonds encore jeune. »
« À moyen terme, on peut être plutôt confiant sur leur capacité à produire un niveau de taux très correct. »
Philippe Crevel, économiste et directeur du Cercle de l'Épargne : « Les nouveaux fonds partent de plus haut que les autres. Les études montrent que nous sommes sans doute à un point haut obligataire : ils seront donc en plus-value en cas de baisse. Les risques sont donc assez faibles. D'autant plus quand on regarde les gestionnaires : de grandes structures qui ont l'habitude de gérer ces actifs. Il y a tout de même un risque théorique avec les dettes souveraines, car certains États sont en difficulté. Mais à ce stade, c'est le bon moment d'investir dans ces fonds, du fait de leur composition. Même si de petits fonds peuvent être tirés plus vite vers le bas si les obligations baissent, les spécialistes estiment que cela n'arrivera pas rapidement. À moyen terme, on peut être plutôt confiant sur leur capacité à produire un niveau de taux très correct. »
Verdict final : Match Nul
Les deux fonds ont beaucoup de similitudes. Dans le détail, quelques éléments permettront à chacun de choisir, selon son profil. Mais l'occasion semble parfaite pour tenter le coup. Finalement, n'est-il pas malin d'investir sur les deux contrats ?