Attention aux jolis taux annoncés par les gestionnaires de SCPI ! En réalité, ils oublient souvent de mentionner que la performance est amputée par de nombreux prélèvements. Pour l'achat de de parts en direct, deux types de frais sont à prévoir. Le plus connus, ce sont les commissions d'entrée. Il faut compter en général 10% de son investissement, sauf pour les quelques véhicules qui n'en facturent pas (Iroko Zen, Remake Live, Mistral Sélection...). 10%, cela correspond tout de même à plus d'un an de rentabilité !

Attention au délai de jouissance...

Mais il existe également un autre coût un peu plus « caché » : le délai de jouissance. La quasi-totalité des SCPI versent en effet les premiers loyers 3 à 6 mois après l'acquisition. Prenons un produit livrant 6% par an : cela amenuisera le rendement des 12 premiers mois de 1,5 à 3 points ! Et il ne faut pas omettre que les loyers touchés ensuite seront fiscalisés.

Pour les premières années, le calcul a de quoi effrayer ! Et même sur 10 ans, le placement sera en moyenne amputé de plus d'un point de rendement... avant impôts !

Les choses sont bien moins douloureuses pour les SCPI sans frais d'entrée. Car s'il existe un délai de jouissance de 3 à 4 mois... Il n'y aura plus que la fiscalité à prévoir. Le seul bémol : une pénalité de 5 à 6% en cas de sortie, selon les cas, avant 5 ou 6 ans.

Cela vous semble complexe ? Ce n'est rien à côté de l'assurance vie ! Car chaque contrat a ses propres règles, y compris chez un même assureur. Pour optimiser les choses, nous prendrons trois produits « jumeaux » supportés par Spirica, l'assureur en ligne du Crédit Agricole : Spirit 2 (Linxea), Liberté Vie (Meilleurtaux) et Neo Vie (Asac Fapes). Selon les courtiers, leurs frais sont considérés comme « les plus bas du marché ».

Dans le combat avec le direct, ils remportent quelques rounds. Déjà, dans le cas des SCPI avec commissions d'entrée, l'assureur offre une réduction : de 10%, cela passe à 7 ou 8%. De plus, Spirica ajoute un autre « cadeau » : il n'applique pas de délai de jouissance. Les loyers sont versés dès le mois suivant l'achat.

...et aux frais de gestion

Ces conditions semblent très avantageuses. Mais... il y a un mais ! « En assurance vie, il ne faut pas oublier les frais de gestion », tempère Pierre Garin, directeur du Pôle immobilier du courtier Linxea. Nos trois contrats « témoins » facturent 0,5% annuels sur les unités de compte. Cela semble peu, mais pour les SCPI, ces frais ne sont pas déduits des loyers : ils sont retirés du nombre de parts. Si les dividendes sont réinvestis dans les véhicules, c'est presque indolore : son stock de SCPI va grandir peu à peu.

Par contre, pour des produits fermés à la commercialisation, les loyers sont versés en argent, et les frais viennent grignoter les parts. « Si le prix des SCPI ne se revalorise pas, le capital va alors se réduire au fil de l'eau », détaille le spécialiste de Linxea. Dans ce cas, 0,5% de frais annuels, cela représente tout de même, au bout de 10 ans, près de 5% d'immeubles perdus ! « Et moins de parts, c'est moins de loyers, et ainsi de suite... » complète Pierre Garin.

D'autant que nous avons pris en exemple des contrats particulièrement économiques. Beaucoup de concurrents imposent 1% ou plus de frais de gestion, appliquent un délai de jouissance... Sur la durée, c'est encore plus problématique !

En plus, les assurances vie prévoient très souvent des pénalités de sortie. Chez Spirica, c'est 3% du capital pour toute vente avant 3 ans. C'est mieux que les SCPI sans frais d'entrée en direct... mais beaucoup moins bien que toutes les autres, qui n'en prévoient pas. Et encore, Spirica n'est pas le plus sévère.

Chez Generali, les cessions sont même bloquées pendant 4 ans, et l'assureur vient d'ajouter des frais de retrait de 4%, quelle que soit la durée de détention de la SCPI. D'ailleurs, Pierre Garin suggère que cette mesure risque s'étendre au marché. « Dans l'esprit des assureurs, cela peut être une façon de faire payer la garantie de liquidité. Et d'inciter à conserver le fonds le plus longtemps possible. »

Une « taxe » des assureurs sur les loyers

Un dernier élément : selon son assurance vie, on ne percevra pas l'ensemble des loyers. Suravenir n'en livre que 85%, Generali 90%... « Cette différence d'un assureur à l'autre est assez incompréhensible, commentent plusieurs distributeurs. Dans le cas d'une performance à 6%, ne toucher que 85% des loyers, c'est perdre un point de performance ! »

« Il est très important de lire les conditions avant de signer. Que ce soit en direct ou en assurance vie, l'impact des frais est très important sur le taux de rendement net. »

Pour Nicolas Tarnaud, directeur de programmes à Financia Business School, « il est très important de lire les conditions avant de signer. Que ce soit en direct ou en assurance vie, l'impact des frais est très important sur le taux de rendement net. » Il y a intérêt à être bon en calcul ! Mais au vu de la complexité, il préconise plutôt de « faire appel à un conseiller objectif et neutre. Mieux vaut payer ce service que regretter son choix. »

Verdict : match nul. Quoi qu'il arrive, les frais impactent durablement la performance, qui sera forcément plus faible que les jolis taux annoncés. Pour une SCPI classique, l'acquisition au sein d'un contrat vie bien construit et peu « chargé » sera sans doute le choix le moins douloureux. Pour un véhicule sans frais d'entrée, à long terme, le modèle de l'achat direct l'emporte largement. Dans tous les cas, une assurance vie qui ne livre pas l'intégralité des loyers et/ou facture plus de 1% de frais de gestion est à fuir pour l'investissement en SCPI !

SCPI en direct ou en assurance vie, le match