Membre39498 a dit:
Une amie m'envoie un article récemment paru dans La semaine juridique édition générale n° 26, 29 Juin 2020, p. 803 : Nullité du contrat en cas de défaut d'information du consommateur - Zoom par Mathilde Amiaud doctorante en droit privé, commentant un arrêt de la CA Angers, ch. civ. A, 2 juill. 2019, n° 17/00104 [lien réservé abonné] : JurisData n° 2019-012100 [lien réservé abonné].
J'en fais profiter les forumers, car il peut servir dans le contentieux lombard :
L’arrêt est intéressant, car il sanctionne par la nullité le contrat qui ne respecte pas l’article L 111-1 du code de la conso, alors que le code de la conso ne prévoit pas de sanction particulière ; or on sait que la clause lombarde est abusive, car elle induit un surcoût clandestin lorsqu’elle joue pour les intérêts intercalaires, et si elle est déclarée non écrite, le taux indiqué devient sans pertinence faute de mode d’emploi, l’article L 111-1 n’est pas respecté ; si on suit le raisonnement de la cour d'Angers, le contrat de crédit, ou a minima la convention de taux, est nulle...
L'article L. 111-1 du Code de la consommation peut-il servir de fondement à une action justifiée par l'irrégularité d'un taux stipulé ou communiqué par un prêteur dans le cadre d'un crédit ?
Mon cher Membre39498, nous vous remercions tous pour ce partage qui ouvre la voie à la réflexion.
Cet arrêt est intéressant pour cela, et je vous propose un arrêt similaire plus récent rendu sur les mêmes fondements, par la Cour d'appel de Bourges le 14 mai 2020 (
n° 19/00684).
Dans les deux affaires, les magistrats ont considéré que
les informations dispensées au consommateur profane étaient insuffisantes aux termes de l'article L. 111-1 du Code de la consommation, ce qui justifiait l'annulation du contrat.
On peut donc penser que l'obligation d'information qu'il contient est
une condition de validité du contrat de consommation.
Un parallèle pourrait être trouvé avec le fait qu'un prêteur aurait déterminé le taux conventionnel sur la base d'une année de 360 jours au lieu de l'année civile requise par les textes, et comme le souligne Membre39498 : «
la clause lombarde est abusive, car elle induit un surcoût clandestin lorsqu’elle joue pour les intérêts intercalaires, et si elle est déclarée non écrite, le taux indiqué devient sans pertinence faute de mode d’emploi, l’article L111-1 n’est pas respecté ; si on suit le raisonnement de la cour d'Angers (et donc également celui de la cour de Bourges), le contrat de crédit, ou a minima la convention de taux, est nulle. »
Nous nous situons en pareille hypothèse sur
le terrain du droit des obligations (ou si vous voulez, du droit des contrats), où l'information du consommateur doit être dispensée avec le plus de précision possible, de manière claire et intelligible, afin que celui-ci contracte en toute connaissance de cause, et consente à souscrire sans réserve. On parle alors de rencontre des volontés.
Notre consommateur-emprunteur as-t-il compris l'incidence de l'usage d'un diviseur 360 sur les intérêts qu'il devra payer pour son crédit, le surcoût clandestin prélevé sur les échéances brisées modifiant en effet en ce cas le coût du prêt. Son banquier lui a-t-il expliqué clairement cela, quand bien même la présence d'une clause qui le plus souvent apparaîtra comme illisible pour un emprunteur profane ?
La Chambre sociale de la Cour de cassation a déjà eu l'occasion de se prononcer sur les fondements de l'article L. 111-1 du Code de la consommation par un arrêt (publié) rendu le 13 décembre 2012 (
n° 11-27.766).
Pour la Cour, «
tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service qu'il propose. »
La Cour ajoute que celui qui se prétend libéré d'une obligation doit justifier qu'il a bien produit les documents et l'information exigée, c'est-à-dire les caractéristiques essentielles afin que le co-contractant s'engage en connaissance de cause (selon l'article 1315 du Code civil).
La Cour va également rappeler que «
en application de l'article L132-1 du Code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Seules les clauses abusives sont réputées non écrites. »
C'est donc par la combinaison de deux articles du Code de la consommation (L. 111-1 et L. 132-1) que la Haute juridiction va donner raison au consommateur en cassant dès lors la décision des magistrats d'appel.
Ces décisions appelle à une réflexion approfondie, et ouvrent le chemin d'une possible contestation d'un contrat de prêt qui ne s'appuierait pas que sur les seuls calculs mathématiques tendant à démontrer un préjudice.
C'est en effet l'information de l'emprunteur qui va constituer la cheville ouvrière de l'argumentation. Car l’information des contractants investit « l’avant-contrat » et se prolonge avec la mise en œuvre du contrat, avec une certitude :
«
l’information des contractants est justifiée par l’obligation de loyauté qui prévaut dans le contrat et même antérieurement au contrat. Résonance d’une nécessité de transparence, elle compense un déséquilibre contractuel entre les parties dont l’une a des informations que l’autre n’a pas ou auxquelles elle n’a pas accès. L’information ne se justifie que parce qu’un des contractants est « un ne-sachant-pas ». Ce déséquilibre a participé à mettre en exergue un devoir de coopération entre les contractants qui n’a fait que légitimer l’information précontractuelle ou un devoir d’information. » (extrait d'un article de Lextenso, publié le 30 avril 2019, auteur Marie Rakotovahiny, Maître de conférences HDR à l’université Toulouse III Paul Sabatier - voir document joint).
Pistes à suivre...