À propos des clauses dite abusives dans les contrats de prêts.
À plusieurs reprises, la notion de clause abusive a été évoquée dans notre Forum, jusque très récemment.
Un décision de la Cour d’appel de Lyon, en date du 20 février 2020, permet de refaire un point précis sur cette notion.
En effet, les Magistrats de Lyon ont bien travaillé, et ont “décortiqué“ dans le détail, si j’ose dire, tous les tenants et aboutissants de ce qu’il faut considérer comme une clause abusive (ou non). Je vous joins cette décision.
Dans les grandes lignes, voici ce que l’on pourrait retenir de cet arrêt :
1) Un premier arrêt avait été cassé car les Hauts Magistrats avaient considéré que la Cour d'appel avait omis «
de rechercher d’office si le risque de change ne pesait pas exclusivement sur l’emprunteur, et si, en conséquence, ladite clause n’avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur ». En effet, cette obligation du “rechercher d'office“ est imposé au juge par la Cour européenne.
2) La demande tendant à ce que soient réputées non écrites les clauses litigieuses ne s’analyse pas en une demande en nullité, de sorte qu’elle
n’est pas soumise à la prescription quinquennale. Moralité : si un emprunteur pense que son contrat contient une clause qu'il considère comme abusive, il peut saisir les juridictions à tout moment, même dix ans après avoir conclu son prêt.
3) L’article L.212-1 du Code de la consommation (devenu L.212-1) prévoit que
les clauses doivent être rédigées de façon claire et compréhensible (
article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13).
En d'autres termes, si une clause qui prévoit que les intérêts d'un prêt seraient calculés en année de 360 jours, alors il faudra que
le consommateur soit à même de comprendre ce que cela signifie, et les conséquences financières qu'un tel calcul engendre pour lui, sachant qu'un contrat de prêt est
un contrat d'adhésion dont les clauses sont imposées à l'emprunteur.
Celui-ci sera automatiquement considéré comme profane en la matière (en ce cas,
il y a obligatoirement déséquilibre significatif entre le sachant et le non averti, peu importe l'incidence forte ou pas sur le montant total du prêt). En effet, un tel contrat
n'a pas fait l'objet d’une négociation individuelle, le prêteur étant la partie forte, et l'emprunteur la partie faible, laquelle doit être protégée par des clauses lisibles et facilement compréhensibles. En tout état de cause, le déséquilibre visé à l’article L.132-1 du Code de la consommation
n’est pas d’ordre économique, mais juridique.
Car cela suppose que les établissements financiers doivent fournir aux emprunteurs des informations suffisantes pour permettre à ceux-ci de prendre leurs décisions avec prudence et en toute connaissance de cause.
4) La clause insérée dans un contrat de prêt doit être comprise par le consommateur à la fois sur le plan formel et grammatical, mais également quant à sa portée concrète, en ce sens qu’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, puisse évaluer les conséquences économiques d’une telle clause sur ses obligations financières (
CJUE, arrêt du 20 septembre 2017, G H I e.a., n° C-186/16, § 51).
J'espère que vous y verrez ainsi plus clair.
Néanmoins, s'agissant d'une action contre votre banque qui aurait fait usage d'un diviseur 360 pour calculer vos intérêts, vous trouverez toute une argumentation dans les posts que j'ai déjà publiés :
https://www.moneyvox.fr/forums/fil/jurisprudence-annee-lombarde.35089/page-216#post-337417
https://www.moneyvox.fr/forums/fil/jurisprudence-annee-lombarde.35089/page-203#post-335082