SCI soumise ou pas au code de la consommation ?
L’attraction des SCI dans le domaine du crédit immobilier
Sur le plan juridique, la transparence des SCI est parfois reconnue et l’assimilation avec les personnes physiques est opérée par certaines dispositions, notamment en droit du bail13 [lien réservé abonné].
Peut-il en être de même en matière de crédit immobilier ?
L’ordonnance du 25 mars 2016 permet de répondre à cette question par l’affirmative.
En principe, les SCI peuvent être attraites dans le domaine de ce crédit (I). Mais le critère retenu relativise toutefois très nettement cette réponse (II).
I – Le principe de l’attraction
5. La SCI n’est pas directement visée par le Code de la consommation.
Elle n’est pas une structure sociale spécifique et elle ne doit sa singularité qu’à sa récurrence pratique.
C’est donc sous l’angle de sa qualité de « personne morale de droit privé », selon l’article L. 313-1, 3°, qu’elle peut être soumise aux règles du crédit immobilier.
Si la formulation générale de cette disposition est quelque peu absconse, elle ne laisse néanmoins aucun doute.
La catégorie des personnes morales de droit privé, donc des sociétés, est concernée.
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En bref, le droit du crédit immobilier prévu par le Code de la consommation, s’appliquera à l’emprunt effectué par une SCI si celui-ci a pour objet le financement d’un immeuble d’habitation ou à usage mixte et s’il n’est pas destiné à financer une activité professionnelle14 [lien réservé abonné].
Objet du prêt et objet social constituent donc les deux critères permettant de se déterminer.
6. Cette rédaction n’est pas vraiment neuve.
La situation s’apparente à celle qui régissait le crédit immobilier avant l’ordonnance du 25 mars 2016.
Le champ d’application n’était pas dépendant de la notion de consommateur et les textes concernaient plus généralement l’acquéreur.
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Il reste qu’aujourd’hui les sociétés peuvent être concernées19 [lien réservé abonné], pourvu qu’elles satisfassent aux critères précités.
II – Le critère de l’attraction
9. Pour une personne morale, le critère principal d’application de la réglementation relative au crédit immobilier tient à la destination du prêt qui lui est octroyé.
Par principe, les SCI n’en sont donc nullement exclues22 [lien réservé abonné].
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L’objet social aura donc une importance considérable et sa rédaction doit être envisagée avec précaution.
En effet, si l’on reprend la formule de l’article L. 313-1, 3e, nombre de SCI correspondent à cette définition.
Lorsque l’objet social est classiquement libellé, c’est-à-dire évoquant, par exemple, « l’acquisition, l’administration et la gestion par la location de tous immeubles et bien immobiliers », sans guère plus de précisions, l’on peut sans doute considérer qu’une telle activité revient à procurer, sous quelque forme que ce soit, des immeubles ou fractions d’immeubles.
Cela ressort très nettement d’un arrêt de la première chambre civile rendu le 14 octobre 2015.
L’objet social de la SCI était l’acquisition, la rénovation, la reconstruction, la division par lots ou par appartements, la location, gestion par tous moyens de tous biens et ensemble immobiliers.
Pour la Cour de cassation, « au regard de l’objet social de la SCI et de la destination du prêt litigieux, celui-ci n’entrait pas dans le champ d’application des dispositions du Code de la consommation »23 [lien réservé abonné].
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Une cour d’appel est allée bien plus loin, démontrant qu’une SCI n’avait pas vraiment la possibilité d’être comprise dans le champ du code, tenant compte de la définition qu’elle adoptait du critère.
Selon cette décision, devait être considéré comme consenti à des fins professionnelles et donc exclu des dispositions relatives au crédit immobilier, le prêt accordé à une SCI « qui a pour objet l’acquisition, la gestion, l’amélioration, la location de tous biens et droits immobiliers, et généralement toutes opérations se rattachant, directement ou indirectement, à cet objet, peu important que l’activité de la société ne s’exerce que sur un seul immeuble et qu’il s’agisse de l’habitation de l’un ou plusieurs de ses associés »24 [lien réservé abonné].
10. À suivre cette jurisprudence, il ne reste plus guère d’espace pour qu’une SCI puisse être considérée comme contractant un emprunt non destiné au financement de l’activité professionnelle.
À vrai dire, il semble que seules les SCI de détention familiale pourraient être concernées par les règles relatives au crédit immobilier, c’est-à-dire des structures sociales dont l’objet est de conserver un patrimoine.
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11. La SCI n’est donc théoriquement pas exclue des dispositions relatives au crédit immobilier.
C’est ce qui résulte de l’ordonnance du 25 mars 2016.
Il reste que le critère d’attraction dans le domaine risque toutefois d’en écarter de nombreuses applications pratiques, pour ne conserver vraisemblablement que la seule SCI familiale et patrimoniale.
La plasticité du critère retenu laisse encore ouverte la porte d’une appréciation jurisprudentielle subjective et susceptible d’évoluer.
Gageons que certains établissements de crédit continueront26 [lien réservé abonné], en attendant, pour éviter les aléas d’une casuistique qui peut leur être préjudiciable, de soumettre conventionnellement le prêt aux règles du Code de la consommation27 [lien réservé abonné].
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