C’était il y a vingt mois.
Les taux d’intérêts amorçaient une remontée brutale, qui allait faire l’effet d’une bombe à fragmentation pour l’ensemble des acteurs constituant la chaîne de valeur du secteur immobilier après une activité 2020-2021 sur-vitaminée. Constructeurs, promoteurs, marchands de biens, financeurs, agences immobilières, même les offices notariaux…personne n’est épargné par la déflagration. La réalité est brutale, Vinci Immobilier, Nexity ou encore Bouygues Immobilier ont annoncé des plans sociaux.
Le diagnostic est simple sur le résidentiel : entre le durcissement des conditions d’accès au crédit et une solvabilité altérée par l’inflation, beaucoup de ménages ont dû renoncer à leur projet d’acquisition immobilière. Dès lors les professionnels du secteur font face à un redoutable effet ciseau : d’un côté des stocks qui ne se vendent pas, des marges d’opérations fortement affectées par la hausse des prix des matériaux comme des taux d’emprunt, de l’autre des créanciers sous haute tension, les professionnels se finançant par la dette... Concernant les marchands de biens, l’attentisme, les valorisations décorrélées des prix réels, et les blocages de financement ont enrayé les mécanismes.
Dans ce contexte, les plateformes de crowdfunding sont des victimes collatérales et nous observons actuellement un pic sans précédent de demandes de prorogation de remboursement. Vous êtes ainsi aujourd’hui nombreux et nombreuses à nous exprimer votre inquiétude face à cette situation. Plusieurs questions reviennent souvent : que se cache-t-il derrière cette vague de retards sur les remboursements ? Faut-il s’attendre derrière à une augmentation du nombre de défauts? Malheureusement, la réponse est oui très certainement, et 2024 sera une année charnière.
Chez WiSEED, chaque demande de prorogation de remboursement donne lieu à un audit sur pièces et à une analyse approfondie pour évaluer leur bien-fondé tant au niveau du projet financé qu’au niveau de la situation globale de l’entreprise. Chacun des dossiers demande des heures d’analyse de documents, de négociations avec les dirigeants mais aussi leurs conseils. Toutes ces démarches se font sur des avances de fonds propres WiSEED, tant en termes de ressources que de frais de procédures, que nous ne sommes jamais certains de recouvrer in fine, car il est de notre devoir de préserver les intérêts de nos investisseurs.
Nous sommes au combat, tous les jours, concentrés sur la tâche, focalisés sur le résultat. Car au final, c’est ce qui restera dans quelques années quand cette tempête sera passée.
La situation peut se résumer ainsi :
- Un besoin objectif pour les professionnels de faire le maximum pour maintenir un niveau de trésorerie suffisant le temps de l’écoulement des stocks. Nous observons aussi des situations d’entreprises en grande difficulté.
- Interviennent alors les mécanismes de garanties : la majorité des garanties fonctionne, mais pas toutes, et parfois il est trop tard (un dirigeant qui fait faillite et qui est caution personnelle, par exemple).
- La seule GAPD (Garantie à Première Demande) qui constituait un engagement formel par lequel un garant, souvent une société-mère, promettait de verser une somme d'argent en cas de défaut de paiement du bénéficiaire, est une mauvaise option.
- Les suretés dites « réelles » : hypothèques et plus récemment utilisées les fiducies semblent apporter plus de sécurité mais dans tous les cas, en cas d’activation cela prendra du temps.
Pour reprendre les termes d’un article récent de l’Agefi [lien réservé abonné] sur le crowdfunding immobilier, qui a vu le jour en 2012 sous l’impulsion de WiSEED, ce secteur traverse aujourd’hui « sa première crise d’adolescence », dont nous devons tous tirer quelques leçons :
- Les 10 à 12% de rendement brut annuel affichés par les plateformes à l’époque où les taux étaient à zéro, rémunéraient le risque d’assister un jour à ce qu’il nous arrive aujourd’hui.
- La clé d’un bon investissement en crowdfunding immobilier repose sur deux piliers : la diversification du portefeuille et la compréhension des actifs sur lesquels on investit.
- La rentabilité d’un portefeuille s’apprécie au global, et non pas ligne par ligne. Mieux vaut investir peu mais régulièrement et dans différentes typologies de projets en termes de risque, de maturité, de zone géographique, d’acteur.
Chez WiSEED nous avons :
- Fait encore évoluer notre politique d’investissement : aucun financement n’est accordé sans avoir en face soit une commercialisation sécurisée, soit des hypothèques, soit des fiducies-suretés.
- Renforcé les ressources et les process de traitement du suivi périodique des projets en cours, incluant visites sur site, pour détecter tout signal faible.
- Ajusté nos contrats pour améliorer notre marge de manœuvre sur l’exigibilité des emprunts.
- Doublé nos effectifs spécialisés (internes et externes) pour faire face aux demandes de reports en ayant un seul objectif en tête : défendre chaque centime prêté par nos investisseurs.
- Renouvelé notre confiance et continué de travailler avec les seuls professionnels du secteur qui respectent leurs engagements dans ce contexte difficile.
Chez WiSEED dès demain :
- Tous les contrats se feront par actes notariés, ce qui permettra une accélération des exécutions de titres, afin que nous ne soyons plus jamais soumis aux aléas de surcharge des tribunaux.
- Il n’y aura plus de prorogations contractuelles, mais systématiquement des protocoles homologués après du Tribunal, afin de gagner en agilité au moindre signal négatif.
- La mise en place de comptes de cantonnement de suivi des travaux sera systématique pour être à même de suivre les décaissements.
- Les expertises et valorisations des actifs seront davantage challengées, quel que soit le signataire de celles-ci. Le monde change, les prix s’ajustent et les évaluateurs seront de plus en plus soumis à une obligation de résultat, plus que de moyens.
- Un comité représentatif des investisseurs, mixte d’investisseurs expérimentés et géographiquement proches des opérations pourra être mis en place sur les opérations en difficulté.
- Seuls les professionnels de l’immobilier ayant démontré leurs capacités de gestion, de savoir-faire et de transparence continueront à être accompagnés.
Derrière ces ajustements, dont certains sont de bon sens, mais ne l’étaient pas dans un contexte de confiance et de croissance, c’est une nouvelle ère du crowdfunding immobilier qui s’ouvre, celle du passage de l’adolescence à l’âge adulte, nous y sommes prêts. |
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