Dans la suite logique de l’arrêt de la Cour de cassation du 22 mai 2019, évoqué dans mon précédent post : la Cour d'appel de Toulouse explique que l'emprunteur a le choix ente action en nullité ou déchéance
(Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 5 juin 2019, n° 18/00169)
Rappelez-vous de mon intervention concernant un arrêt majeur de notre Haute Cour :
nullité ou déchéance
Ainsi, prenant le contre-pied de toutes les décisions rendues par la Cour d'appel de Paris depuis 18 mois, les Magistrats de Toulouse nous gratifient enfin d'un arrêt qui est plus conforme au droit, et dans la droite ligne de la façon de voir de la Cour de cassation.
« La banque soutient que l’action en nullité engagée par Monsieur Y est irrecevable dès lors que seule la sanction de la déchéance du droit aux intérêts est applicable en présence d’une offre de prêt soumise aux dispositions du Code de la consommation.
Monsieur Y agit à la fois pour obtenir la nullité de la stipulation d’intérêts sur le fondement des articles 1128 et 1907 du Code civil pour faire sanctionner une règle relative à la formation du contrat et à la validité du consentement (mention d’un TEG erroné, défaut de mention du taux de période, recours à l’année lombarde pour calculer les intérêts conventionnels du prêt), et à titre subsidiaire, en déchéance du prêteur du droit aux intérêts.
En matière de prêt immobilier, deux sanctions sont susceptibles d’être encourues par le prêteur selon les circonstances.
La déchéance du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge, est prévue par l’article L.312-33 du Code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige.
Elle constitue une règle spéciale qui seule sanctionne l’inobservation du formalisme de l’offre prévu à l’article L.312-8 du Code de la consommation et spécifiquement de l’article L.312-8 3°, lequel renvoie concernant le TEG, à l’article L.313-1 qui en définit le contenu et pour son mode de calcul, à l’article R.313-1 du Code de la consommation et à son annexe.
Par contre la substitution du taux de l’intérêt légal au taux conventionnel est encourue sur le fondement de l’article 1907 du Code civil, lorsque le taux effectif global erroné est mentionné dans l’acte de prêt. Elle sanctionne alors une condition de formation du contrat. »
La Cour ajoute que la nullité de la stipulation d'intérêts n'est pas disproportionné car la sanction doit avoir un caractère dissuasif :
« Cette sanction n’est pas disproportionnée dès lors que la réglementation en matière de crédit pour les consommateurs ou les non professionnels est d’ordre public et que la sanction doit avoir un caractère véritablement dissuasif. »
L'arrêt est bien motivé. mais à y regarder de plus près, vous vous apercevrez que les Magistrats ne se sont pas prononcés sur la “partie lombarde“ du litige. En d'autres termes, on pourrait dire qu'ils “ont botté en touche“, ou en termes plus juridiques, qu'ils se sont refusés à statuer (omission de statuer), malgré l'argumentation circonstanciée de l'emprunteur.
La Cour ne s'est prononcée que sur l'absence de mention de taux de période (qui a fait gagner l'emprunteur), dont la sanction est certes identique à celle qui condamne l'usage du diviseur 360 (nullité de la convention d'intérêts, et substitution du taux d'intérêt légal au taux contractuel), mais ce n'était pas une raison, à mon sens, pour ne pas répondre à la demande de l'emprunteur.
Mais on sait bien que le contentieux lombard est un “patate chaude“ pour les juges et magistrats, qui n'hésitent pas à se défiler dès qu'ils le peuvent.
Curieuse manière de rendre la justice...