Indemnités pour licenciement abusif

Miles a dit:
Le propos n'est pas d'interdire le licenciement mais de le faire dans des conditions correctes. Aujourd'hui, il est plus rentable économiquement de le faire dans des conditions dégradantes (mise à pied, licenciement sans préavis, etc) que de le faire proprement, ce qui s'apparentrait d'ailleurs plus à une RC que vous semblez remettre en cause et dont c'était l'objectif initial.

Euh, parlez à n'importe quel DRH, il vous dira qu'on fait tout pour éviter les licenciements sec en France en raison de l'aléa que ça introduit (quand on est une petite société en particulier) ou des enjeux syndicaux (grand groupe). Je dis au contraire que la RC est très bien pour justement résoudre des cas de blocage soft où employeur comme employés ont intérêt à ce que leurs chemins se séparent, sans que cela justifie la violence (côté salarié) ou l'aléa (côté employeur) d'un licenciement.

Niveau ETI, les licenciements devaient représenter 10% du nombre de RC environ. Et réservés à des cas graves, pour faute avérée, avec dossier suffisamment sérieux et solide...

A savoir aussi, dans 94% c'est le salarié qui saisit les prudhommes, convaincu qu'il va gagner donc, mais ce n'est que dans 71% des cas que le salarié gagne. Donc c'est largement des demandes infondées, une sur trois environ, mais quoi qu'il arrive l'employeur doit se défendre et engager des frais.

Les chiffres de la DARES vont globalement dans ce sens aussi :
  • Les licenciements (non économiques) de CDI, c'est peanuts (c'est orange, le jaune c'est le total des sorties et le bleu c'est les licenciements CDD compris, fin anticipée de CDD)
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2. la RC remplace les licenciements. Je suis désolé le code couleur change mais le site de la DARES est vriament nul. En jaune les RC, devenus désormais supérieurs aux licenciements de CDI et permettent de limiter justement le recours au licenciement
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3. Je l'ai déjà dit, mais le marché est dynamique et ce qui tire les sorties des effectifs ce sont les démissions, en forte hausse
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=> Globalement on est sur un marché du travail qui se pacifie, et c'est très bien. On déconflictualise et on facilite les embauches. Et ça paie.
moietmoi a dit:
Justement, si on est aux prud'hommes, et que ces tribunaux donnent raison au salarié, c'est que c'est abusif.
Et lors d'un acte abusif, connaître la peine à l'avance, est une incitation à commettre

Plutôt que de caler une grille morale, il faut essayer de comprendre comment ça se passe de l'autre côté. Et plusieurs points me semblent importants à souligner :
  1. Un licenciement, c'est le dernier ressort. A nouveau personne n'aime ça
  2. Les entreprises privilégient les RC, encore plus codifiées, et ça plait aux salariés
  3. Les prudhommes, c'est beaucoup d'aléas. Déjà des juges non professionnels, des délais indécents, et des résultats imprévisibles. Savoir apporter de la visibilité (aux deux parties), c'est bien. L'aléa, ce n'est bon pour personne
  4. Quand les prudhommes donnent raison à l'employeur (3 fois sur 10), il faudrait demander aussi aux salariés d'aller rembourser l'employeur ?
 

Pièces jointes

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Maurice63 a dit:
Le code pénal est rempli de peines plafond
Idem le code de la route
Cela n’empêche pas les incivilités, délits ou plus.
Par contre une condamnation même aux prud’hommes n’est pas bonne publicité.
Je revenais pour éditer mon message mais je vois que quelqu'un a été plus intelligent que moi et a parlé du même sujet avant ;)

Clairement, le fait d'avoir une peine prévue pour un délit n'est pas plus un encouragement pour le cas des prudhommes que pour n'importe quel tribunal. C'est aussi voire surtout une façon d'encadrer l'arbitraire.
 
Axiles a dit:
Clairement, le fait d'avoir une peine prévue pour un délit n'est pas plus un encouragement pour le cas des prudhommes que pour n'importe quel tribunal. C'est aussi voire surtout une façon d'encadrer l'arbitraire.
Idéalement, ça serait ça, oui.
Ça n'est pas réellement le cas, dans les faits.

Le fait d'avoir des plafonds et des jurisprudences peut encourager l'employeur à planifier, voir à chiffrer de manière tout a fait cynique, les prud'hommes qu'il aurait a payer, avec des probabilités calculées... des cabinets de conseils/avocats, ont même des services dédiés pour ça.

Donc c'est ça aussi la vie réelle.

Tout comme les employeurs qui préfèrent payer les amendes et qui allouent des lignes prévisionnelles dans le budget annuel, plutôt que de satisfaire les quota d'emploi de travailleurs handicapés, par exemple.

Ce dernier exemple est un peu hors sujet, mais ça rappelle que parfois (souvent ? ) l'illégalité peut se chiffrer, se prévoir et juste se payer.

Mais à côté, l'humain trinque.
 
CyberOtter a dit:
Idéalement, ça serait ça, oui.
Ça n'est pas réellement le cas, dans les faits.

Le fait d'avoir des plafonds et des jurisprudences peut encourager l'employeur à planifier, voir à chiffrer de manière tout a fait cynique, les prud'hommes qu'il aurait a payer, avec des probabilités calculées... des cabinets de conseils/avocats, ont même des services dédiés pour ça.

Donc c'est ça aussi la vie réelle.

Tout comme les employeurs qui préfèrent payer les amendes et qui allouent des lignes prévisionnelles dans le budget annuel, plutôt que de satisfaire les quota d'emploi de travailleurs handicapés, par exemple.

Ce dernier exemple est un peu hors sujet, mais ça rappelle que parfois (souvent ? ) l'illégalité peut se chiffrer, se prévoir et juste se payer.

Mais à côté, l'humain trinque.
Cela peut même être une entente pour ne pas payer les cotisations sociales côté employeur et les impôts sur revenus côté employé.
(Voir KM et PSG)
 
CyberOtter a dit:
Idéalement, ça serait ça, oui.
Ça n'est pas réellement le cas, dans les faits.

Le fait d'avoir des plafonds et des jurisprudences peut encourager l'employeur à planifier, voir à chiffrer de manière tout a fait cynique, les prud'hommes qu'il aurait a payer, avec des probabilités calculées... des cabinets de conseils/avocats, ont même des services dédiés pour ça.

Donc c'est ça aussi la vie réelle.

Tout comme les employeurs qui préfèrent payer les amendes et qui allouent des lignes prévisionnelles dans le budget annuel, plutôt que de satisfaire les quota d'emploi de travailleurs handicapés, par exemple.

Ce dernier exemple est un peu hors sujet, mais ça rappelle que parfois (souvent ? ) l'illégalité peut se chiffrer, se prévoir et juste se payer.

Mais à côté, l'humain trinque.
Je confirme et je partage mon cas personnel. J'ai été victime d'un tel licenciement abusif où la société a simplement calculé que ce serait plus "rentable" pour elle de me licencier que de chercher une RC.

J'avais à peu près 6 ans d'ancienneté, tout se passait parfaitement bien, et pour faire simple ma société a racheté un concurrent, sur mon département en europe le concurrent était 3 fois plus gros, la direction du département fusionné à donc été confié au responsable du concurrent racheté qui a choisi de conserver tous ses managers et licencier tous nos managers à nous. En gros mon poste a disparu.
Mais ça n'est pas un motif de licenciement valable en France, si l'entreprise avait été honnête, elle m'aurait expliqué la situation et cherché une RC. Cependant, dans une telle situation qui va accepter moins de 6/9 mois de salaire avec une RC ?

Au contraire sur un licenciement dans ma situation, le barème aux prud'hommes était de 2 à 6 mois. J'étais jeune, facilement réemployable, la probabilité dans mon cas était d'obtenir de 3 à 4 mois.

Du coup, qu'est ce qu'ils ont fait, ils n'ont jamais partagé le motif réel du licenciement (je ne l'ai su que plus tard grâce aux collègues qui sont restés), mais ont inventé un faux motif de licenciement pour raison économique (je simplifie mais en gros l'entreprise était très rentable mais pratiquait l'optimisation fiscale pour faire rentrer tous les revenus europe au royaume-uni où les impôts étaient moins élevés, exemple dans mon cas mes prestations chez les clients étaient facturés par le royaume-uni alors que mes charges allaient dans mon entité d'origine en france, du coup forcément la france "perdait de l'argent", les difficultés économiques s'appréciant au niveau de la société et pas de l'entreprise --> licenciement possible pour raison économique en france).

Pour en avoir reparlé avec un collègue aux RH plus tard, j'ai compris que le calcul était très simple :
- au mieux je n'allais pas aux prud'hommes, tout bénef pour eux, ils économisent la RC.
- dans le cas où j'allais aux prud'hommes, vu que je pouvais obtenir entre 2 et 6 mois, ils ont jugé que ce serait facile de négocier quelques mois avec moi pour abandonner la procédure, ça leur coûterait dans tous les cas nettement moins cher que la RC.
- si j'allais au bout aux prud'hommes, ils avaient toujours une (très petite mais pas inexistante) chance de gagner si je n'arrivais pas à prouver l'optimisation fiscale
- et même s'ils perdaient, ça leur coûterait probablement 3-4 mois donc nettement moins qu'une RC


Je pense que le barème est une bonne chose car donnant de la visibilité à tout le monde et évitant les "jackpot" que pouvaient être des licenciements dans le passé pour certains salariés et les abus qui pouvaient en découler. Mais si le barème semble raisonnable pour les salariés avec une grande ancienneté, ils sont beaucoup trop faibles pour être dissuasifs sur les "petites" anciennetés. Dans le cas d'un licenciement jugé comme abusif, il faudrait un minimum qui répare vraiment le préjudice. Par exemple dans mon cas, un minimum de 2 mois c'est juste ridicule. Ne serait-ce que supporter la procédure aux prud'hommes qui dure des années va conduire un certain nombre de personnes à renoncer.
 
dragon-666 a dit:
Je pense que le barème est une bonne chose car donnant de la visibilité à tout le monde
Ton témoignage est très intéressant,
Je suis moins d'accord avec ta conclusion.

Dans la vie, la comparaison avec le code pénal n'est pas pertinente.
Je ne connais aucun gangster qui se dit: il y 30 millions dans le coffre de banque et si je suis pris je risque tant au maximum.
Ni un criminel qui se dit, je vais violer , car je ne risque que 5/10/20 ans.

Ce qui fait fonctionner les truands cols de bleus ou blancs, c'est : pas vu, pas pris.

Dans le domaine des prud'hommes, le simple fait d'avoir une borne à la punition incite aux calculs
 
Après c'est vrai qu'aucune solution n'est parfaite car comme le disait Axiles (je crois) il y a aussi l'énorme souci d'engorgement des procedures Prud'hommes à rallonge, et qu'il fallait quand même tester quelque chose pour simplifier et fluidifier.
Essayer en tout cas.

Mais comme toujours, il y a un revers de médaille, et un système est difficilement applicable pour tous les cas de situation.

M'enfin bon, si c'était déjà un peu moins le far west et qu'on freinait cette tendance à l'americanisation de la société, (que ça soit dans le travail, ou dans les moeurs d'ailleurs...) ça serait pas plus mal aussi et ça aiderait à assainir les bases.
 
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