Bonjour,
Pour être clair sur ce sujet récurrent que constitue la fraude à la carte bancaire : la directive sur les services de paiement, en vigueur en France depuis le 1er novembre 2009, a fixé un cadre légal clair :
- En cas d'utilisation non autorisée, signalée comme telle par le porteur de la carte, la banque (ou l'établissement émetteur de la carte) doit rembourser les sommes constestées, INTEGRALEMENT, et SANS DELAI.
- Le seul moyen pour la banque de ne pas rembourser est d'apporter la preuve que le porteur de la carte a été négligent ou tente de frauder. Attention, les banques s'arrogent parfois le droit de refuser le remboursement en affirmant au porteur "pour telle ou telle raison, vous avez été négligent", or ce n'est pas à elles, mais au juge, de décider ainsi. Concrétement, la banque doit rembourser, puis saisir le tribunal compétent qui au vu des éléments apportés par elle pourra éventuellement dire que le porteur a fait preuve de négligence. Dans ce cas, il devra rendre à la banque les sommes qui lui ont été remboursées. Ce point est bien souvent ignoré avec une superbe mauvaise foi par les banques, qui essaient de faire croire au porteur qu'elles ont le droit de ne pas rembourser et que c'est au client de saisir le juge s'il n'est pas content (alors que c'est exactement l'inverse)
- Il a été reconnu que les seuls élements enregistrés par le système informatique de la banque ne peuvent pas suffire à prouver la négligence du porteur de la carte. Autrement dit, ce n'est pas parce que la banque affirme que son système informatique montre que les opérations frauduleuses ont été effectuées avec saisie du code secret de la carte qu'il y a négligence.
Ci joint les articles relatifs à ces points :
Directive 2007/64/CE du Parlement Européen et du Conseil du 13 novembre 2007, dite "Directive Services de Paiement", transposée en droit français et entrée en application le 1er novembre 2009
Artcice 47 § 1.a : Après que le montant d'une opération de paiement individuelle a été débité du compte du payeur (...), le prestataire de services de paiement du payeur fournit à celui-ci, sans tarder (...) les informations suivantes:
a) une référence permettant au payeur d'identifier chaque opération de paiement et, le cas échéant, les informations relatives au bénéficiaire
Article 57 §1.a : Le prestataire de services de paiement délivrant un instrument de paiement a les bligations suivantes:
a) il s'assure que les dispositifs de sécurité personnalisés de tout instrument de paiement ne sont pas accessibles à d'autres parties que l'utilisateur de services de paiement autorisé à utiliser cet instrument (...)
Et §2 du même article : Le prestataire de services de paiement supporte le risque lié à l'envoi au payeur d'un instrument de paiement ou de tout dispositif de sécurité personnalisé de celui-ci.
Article 61 : Responsabilité du payeur en cas d'opérations de paiement non autorisées
1. Par dérogation à l'article 60, le payeur supporte, jusqu'à concurrence de 150 EUR, les pertes liées à toute opération de paiement non autorisée consécutive à l'utilisation d'un instrument de paiement perdu ou volé ou, si le payeur n'est pas parvenu à préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité
personnalisés, au détournement d'un instrument de paiement.
Concrètement : vous restez responsable des débits effectués avant la mise en opposition de la carte à concurrence de 150 euros.
2. Le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d'un agissement frauduleux de sa part ou du fait que le payeur n'a pas satisfait, intentionnellement ou à la suite d'une négligence grave, à une ou plusieurs des obligations qui lui incombent en vertu de l'article 56. Dans ce cas, le montant maximal visé au paragraphe 1 du présent article ne s'applique pas.
Concrétement : en cas de négligence grave ou de fraude intentionnelle, vous restez responsable de la totalité des débits
Article 61 § 4 : Sauf agissement frauduleux de sa part, le payeur ne supporte aucune conséquence financière résultant de l'utilisation d'un instrument de paiement perdu, volé ou détourné, survenue après la notification prévue à l'article 56, paragraphe 1, point b –c'est-à-dire après mise en opposition-
Article 61 § 5 : Si le prestataire de services de paiement ne fournit pas de moyens appropriés permettant, à tout moment, la notification de la perte, du vol ou du détournement d'un instrument de paiement, conformément à l'article 57, paragraphe 1, point c, le payeur n'est pas tenu, sauf agissement frauduleux de sa part, de supporter les conséquences financières résultant de l'utilisation de cet instrument de paiement
Article 60 : en cas d'opération de paiement non autorisée, le prestataire de services de paiement du payeur rembourse immédiatement au payeur le montant de cette opération de paiement non autorisée et, le cas échéant, rétabli le compte de paiement débité dans l'état où il se serait trouvé si l'opération de paiement non autorisée n'avait pas eu lieu.
Dans le cas précis dont est victime George06 : comme stipulé par la Directive, vous devez lister tous les paiements frauduleux et la banque doit vous rembourser sans délai. Cependant, ces débits ont commencés en 2007 et vous ne réagissez qu'en 2011, alors que, j'imagine, vous avez reçu des extraits de comptes à intervalle réguliers. C'est probablement un élément suffisant pour que la banque puisse valablement prouver votre négligence.
A mon avis, vous devez tenter le tout pour le tout : faire intervenir une association de consommateur, vous fendre d'un courrier précis, citer la Directive et rappeler que la banque doit rembourser sans délai, et surtout, qu'elle n'est pas qualifiée pour dire s'il y a eut négligence ou non. Puis espérer que votre banquier ne vous emmenera pas au tribunal et préférera vous rembourser. Mais sans garantie.
En cas de procès, tout le « jeu » de la banque consistera à prouver votre négligence, notamment par le fait que vraisemblablement vous n’étiez pas très regardant sur le contenu de vos extraits de compte, et de votre côté il faudra prouver que la banque a failli à ses obligations (en ne vous transmettant pas ces relevés de compte par exemple)
Quelques liens utiles :
Le texte complet de la directive :
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Les commentaires et le « décodage » du Minefi : [lien réservé abonné]
Cordialement