L'essentiel

  • Depuis quelques mois, la société JPME ne paie plus certains particuliers à qui elle rachète l'électricité produite via des panneaux photovoltaïques.
  • De nombreuses personnes, pour qui le préjudice représente plusieurs centaines d'euros, ont saisi le Médiateur de l'énergie, ou ont sollicité l'aide du GPPEP (Groupement des particuliers producteurs d'électricité photovoltaïque).
  • JPME attribue ses difficultés à un modèle économique initial mal adapté et à un afflux de clients supérieur à ses capacités opérationnelles, promettant de régulariser tous les paiements en attente d'ici la fin de l'année 2025.

Plus de 255 saisines en 2024 et déjà 200 en de début d'année 2025... Chez le Médiateur de l'énergie, des dossiers d'un nouveau genre s'accumulent. « Les particuliers nous contactent le plus souvent parce qu'ils rencontrent un problème pour la fourniture d'énergie. Là, il s'agit de la revente de leur électricité », explique Caroline Keller, cheffe du service information et communication.

Joël Mercy, le président du GPPEP (Groupement des particuliers producteurs d'électricité photovoltaïque), a aussi vu affluer les sollicitations : il en compte près de 600. Ces saisines concernent le même fournisseur : JPME. Ce dernier s'est engagé, en contractant avec de nombreux particuliers, à racheter l'électricité produite par leurs panneaux photovoltaïques qu'ils n'autoconsomment pas. Mais depuis plusieurs mois, ce fournisseur ne paie plus les factures et ne répondait plus au téléphone (selon JPME, le service téléphonique est à nouveau opérationnel depuis le mercredi 26 février). Résultat, des particuliers se retrouvent lésés de plusieurs centaines d'euros.

« Nous avons parfois donné un délai à JPME et cela a marché au départ, pour certains dossiers. Cela n'a ensuite plus été le cas, nous avons donc lancé des procédures judiciaires en référé, en regroupant les adhérents pour que le coût de la procédure ne soit pas trop important comparé au coût du préjudice », détaille Joël Mercy (GPPEP). Du côté du Médiateur de l'énergie, quelques dossiers réussissent aussi à récupérer leur dû, mais un nombre beaucoup plus important de nouvelles saisines arrivent sur la table.

Un paiement avant fin 2025

Il faut dire que, pour attirer les clients, le fournisseur avait frappé fort : 14 centimes étaient proposés par KWh vendus en 2022 et plus de 17 centimes en 2023, soit plus que les tarifs d'EDF OA. Depuis 2024, JPME a grandement réduit la voilure, avec d'abord 5,64 centimes par kWh et moins de 4 centimes, depuis 2025.

Sur son site internet, JPME reconnaît des difficultés, causées selon le fournisseur par « un modèle économique initial non adapté à l'évolution rapide des prix du marché énergétique, un afflux de clients supérieur aux capacités opérationnelles, entraînant des retards administratifs, des problèmes de gestion et un changement de propriétaire et de direction, suivi d'une phase de restructuration ».

« L'ancienne direction de l'entreprise a lancé une offre innovante, qui a attiré beaucoup de clients. La grosse erreur, c'est qu'économiquement, cela n'avait pas de sens et qu'en plus, l'entreprise n'était pas structurée et n'avait pas les outils pour gérer cela. Par exemple, les factures étaient faites à la main, il y avait des contrats format papier... Pour des milliers de clients, ce n'est pas possible », complète Harold Maarek, directeur marketing arrivé en novembre 2024 chez JPME.

Il assure que les problèmes seront bientôt résolus. « Je comprends les clients, à leur place j'aurais été aussi révolté, voire davantage. Ce n'est qu'une question de temps. Nous mettons en place un nouvel outil de facturation et le modèle économique a été repensé, grâce à la fourniture aux professionnels, ce qui a permis de redresser l'entreprise. Elle est aujourd'hui en capacité de payer les clients. C'est notre priorité, nous pouvons garantir que tous vont l'être, d'ici fin 2025 au plus tard. »

A qui peut-on revendre son surplus de production ?

JPME revendique quelques milliers de clients particuliers, auxquels il rachète le surplus de production, ou propose des offres incluant des batteries virtuelles. Aujourd'hui, une majorité des particuliers revendent l'énergie non autoconsommée à EDF Obligation d'achat. Les tarifs d'achat sont réglementés et ils peuvent ainsi bénéficier ainsi de la prime à l'autoconsommation. Par ailleurs, c'est l'assurance de pouvoir vendre l'énergie pendant une longue période à un prix fixe, puisque les contrats durent 20 ans.

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Il faut toutefois respecter certaines conditions : notamment avoir des panneaux en toiture et qu'ils soient installés par un artisan reconnu garant de l'environnement. C'est le fait de ne pas cocher toutes ces cases et / ou la promesse d'un tarif plus attractif qui poussaient jusqu'à maintenant les particuliers à se tourner vers un autre acteur. Pour l'instant, rares sont les fournisseurs à s'être lancés sur ce marché. Parmi eux, on retrouve JPME mais aussi Urban Solar Energy, Mylight Systems, ou encore Ekwateur.

Recrudescence de litiges à venir ?

Si peu d'acteurs proposent encore le rachat du surplus d'électricité des particuliers, et encore moins à des tarifs plus avantageux que ceux pratiqués par EDF OA, selon Harold Maarek, c'est surtout dû aux spécificités d'un marché complexe et peu rémunérateur. « C'est loin d'être la panacée, pour le client comme pour le fournisseur. Pour le client, vendre son kWh quelques centimes n'est pas forcément intéressant et pour le fournisseur, il y a énormément d'éléments administratifs à mettre en place ».

Reste que la dynamique pourrait changer, puisque le secteur va prochainement connaître un gros bouleversement, avec une très probable baisse du tarif de revente du surplus pour l'obligation d'achat, avec effet rétroactif pour les raccordements effectués depuis le 1er février 2025. Pour l'instant, un prix de vente du kWh à 4 centimes d'euros (contre plus de 12 centimes avant) est évoqué pour les installations de moins de 9 KWc.

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De quoi pousser les particuliers à la recherche de meilleurs prix vers d'autres fournisseurs ? Françoise Thiebault, coordinatrice énergie du Cnafal (Conseil national des associations familiales laïques) et également membre du CSE, craint une recrudescence de ce type de litiges et autres problèmes.

« Où vont aller les consommateurs qui vont se détourner d'EDF ? Peut-être vont-ils accepter des offres qui paraissent intéressantes de prime abord pour la revente de surplus, mais qui sont défavorables pour la fourniture d'électricité. La réglementation n'est actuellement pas assez protectrice ». Un constat partagé par Joël Mercy : « Il y a des règles précises pour la fourniture d'électricité, mais pas pour l'achat, Il faut absolument mettre des garde-fous. »