Ce qu'a dit le Premier ministre, François Bayrou ?
François Bayrou a annoncé mardi un gel du barême des impôts, des prestations sociales et des retraites en 2026. Concrètement, « on aura exactement le même montant des retraites pour chaque pensionné que celles qu'on avait en 2025 », a-t-expliqué. « L'ensemble des prestations sociales seront maintenues en 2026 à leur niveau de 2025 et il n'y aura pas d'exception », a-t-il ajouté. Enfin, « les barèmes de l'impôt sur le revenu et de la contribution sociale généralisée seront eux aussi maintenus à leur niveau de cette année ».
Par définition, cette piste d'économies est loin d'être actée. Elle est proposé par le gouvernement, mais devrait encore être adopté au Parlement à l'automne lors du vote du Budget 2026 qui a pour objectif de réaliser 40 milliards d'euros d'économies budgétaires, au global.
Quelles seraient les économies liées à une année blanche ?
Les économistes de l'Institut des politiques publiques (IPP) ont dévoilé une série d'estimations économiques pour donner du grain à moudre aux parlementaires. Dans leur chiffrage publié lundi 30 juin, en gelant à la fois retraites, prestations sociales et barème de l'impôt sur le revenu, cette piste d'une « année blanche des revalorisations » permettrait à l'État d'économiser 5,7 milliards d'euros : « Ce gel global aurait un effet distributif régressif, bien qu'il s'étende tout au long de la distribution des revenus », ajoute l'IPP, ce qui signifie que cette mesure creuserait les inégalités entre les plus riches et les plus modestes.
Mesure potentielle pour 2026 | Économies budgétaires pour l'État |
---|---|
Gel du barème de l'impôt sur le revenu | 1,8 milliard € |
Gel des retraites de base | 2,6 milliards € |
Gel des prestations sociales (allocations familiales, RSA, prime d'activité, APL, etc.) | 1,3 milliard € |
Année blanche 2026 au global | 5,7 milliards € |
Source : Effets budgétaires et redistributifs des mesures socio-fiscales, publié par l'IPP le 30 juin 2025
« 3,2% des ménages verraient leur niveau de vie diminuer d'au moins 1% »
Premiers perdants : les plus modestes
L'IPP mesure, en pourcentage du niveau de vie, l'impact de ce gel global 2026. En partant sur l'hypothèse d'une inflation légèrement supérieure à 1% en 2025, les auteurs de cette étude estiment qu'une « année blanche » des revalorisations aurait un impact « régressif » du point de vue de la redistribution des revenus. « Dans ce scénario, 3,2% des ménages verraient leur niveau de vie diminuer d'au moins 1% », relève l'IPP.
Principaux perdants selon les simulations de l'IPP : le quart de la population au niveau de vie le plus modeste, le seul à perdre plus de 0,5% de niveau de vie, à cause du gel des prestations sociales (AAH, RSA, Aspa, prime d'activité, APL, allocations chômage, etc.).
« Cependant », nuance l'IPP, ce gel global serait moins régressif « que dans le scénario d'un gel isolé des prestations sociales », car « le gel du barème de l'impôt sur le revenu introduit une certaine progressivité ». En clair, si le gel des prestations sociales touche nettement au niveau de vie des plus modestes, le gel de l'impôt sur le revenu vient lui toucher au portefeuille de la moitié de la population au niveau de vie plus confortable, même si dans leur cas la perte de niveau de vie serait dans l'ensemble inférieur à 0,38%.
« En pourcentage du niveau de vie, ce sont bien les ménages les plus modestes qui verraient leur revenu le plus réduit par une “année blanche” »
Autre étude, même conclusion : l'économiste de l'OFCE Pierre Madec a lui aussi planché sur les effets d'une année blanche dans un billet de blog. En mesurant l'impact par niveau de revenu par foyer, et en pourcentage d'érosion de ce niveau de vie, Pierre Madec fait ressortir les mêmes effets : « En pourcentage du niveau de vie, ce sont bien les ménages les plus modestes qui verraient leur revenu le plus réduit par une “année blanche”.
Les 5% de ménages les plus modestes perdraient ainsi près de 1% de revenu disponible comparativement à une situation de revalorisation usuelle. Pour les ménages du centre de la distribution, l'impact serait de l'ordre de 0,5% et pour les 5% de ménages les plus aisés inférieur à 0,3%. »
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Autres grands perdants : les retraités et les chômeurs
L'économiste Pierre Madec isole aussi l'impact de ces mesures pour différentes catégories socio-professionnelles : inactifs, au chômage, retraités, salariés et indépendants. En proportion des revenus actuels, les salariés et les indépendants seraient les moins durement touchés par un gel global : 0,25% de niveau de vie en moins en 2026, surtout à cause du gel du barème de l'impôt sur le revenu, ce qui augmenterait mécaniquement leur impôt à payer.
À l'opposé, les retraités perdraient plus de 1% de niveau de vie, surtout à cause de l'absence de revalorisation des pensions de base.
320 euros de moins par ménage retraité en moyenne en 2026
Pierre Madec va jusqu'à chiffrer l'impact en euros par ménage. En moyenne, pour les retraités, l'année blanche plomberait le portefeuille à hauteur de 350 euros sur l'année 2026. Faute de revalorisation annuelle 2026 des pensions de base, ce qui pèserait 320 euros en moins sur l'année, auxquels il faut ajouter 20 euros d'impôt en plus et 10 euros de prestations sociales en moins, en moyenne.
Derrière les retraités, ce sont les foyers dont la personne de référence est au chômage qui perdraient le plus au jeu de l'année blanche : 180 euros en moins dans le portefeuille en 2026, une perte en premier lieu due à l'absence de revalorisation des allocations chômage (-70 euros) et des prestations sociales (-60 euros).
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