Dire que le calcul de la taxe foncière est complexe est une lapalissade. Prenez une base de calcul reposant sur des loyers datant des années 1970. Ajoutez-y un ajustement de m2 en fonction des « éléments de confort » déclarés par vous-même ou détectés par le fisc. Puis les taux communal et intercommunal. Puis ajoutez les taxes « Gemapi » et ordures ménagères... sans oublier les éventuelles exonérations (quoique fortement conditionnées)... et vous obtenez votre taxe foncière !
C'est donc l'un des éléments listés ci-dessus, les « éléments de confort » (eau courante, électricité, chauffage central, toilettes, lavabos, douches...), qui va faire l'objet d'une mise à jour en 2026. Voici tout ce que l'on sait à ce stade, et ce qu'il faut retenir.
1 - Je suis propriétaire. Suis-je concerné ?
À ce stade, impossible de savoir si vous faites partie des propriétaires possédant les 7,4 millions de locaux touchés par la mise à jour révélée ce 19 novembre au matin par Le Parisien, puis confirmée par Bercy et la Direction générale des Finances publiques (DGFiP).
Potentiellement 10% des biens immobiliers sont concernés. En effet, quelque 32 millions de propriétaires paient la taxe foncière, en sachant qu'ils sont nombreux à posséder plusieurs biens. Après la mise à jour des données, 7,4 millions de logements seront concernés par la hausse de la taxe foncière, sur 71,4 millions de biens au total, selon la DGFiP. Cette opération représente selon Bercy, cité par l'AFP, 25% des maisons et 15% des appartements de métropole.
En revanche, la DGFiP promet que tous les foyers faisant l'objet d'une hausse significative suite à cette mise à jour des « éléments de confort » seront prévenus. Début 2026, un courrier général sera envoyé aux propriétaires concernés. En juin, un document résumant l'opération dans le détail sera disponible dans l'espace particulier des contribuables sur impot.gouv.fr.
L'opération cible les catégories de logement de « luxueux » à « ordinaire », « pour lesquels l'absence des éléments de confort est exclue de nos jours », explique la DGFiP, affirmant que les logements très délabrés et non réhabilités ne sont en revanche pas concernés.
2 - Cette hausse surprise et automatique va-t-elle s'ajouter aux augmentations classiques ?
Oui. Cette mise à jour automatique des « éléments de confort » de votre logement n'a rien à voir avec les revalorisations habituelles de taxe foncière. En 2026, la base de calcul des impôts locaux devrait progresser de 1%. À cela s'ajoutera la mise à jour des taux communaux et intercommunaux, qui sera probablement limitée puisqu'il s'agit d'une année d'élections municipales. Cette mise à jour automatique du fisc est donc une troisième strate dans la hausse potentielle de votre taxe foncière l'an prochain.
Un « point d'étape » à prévoir avant la mise en œuvre
« On se réserve le droit d'interroger la pertinence de cette mesure dans quelques mois, lors d'un point d'étape », a déclaré la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon lors du compte-rendu du Conseil des ministres. L'information, publiée mercredi 19 novembre dans Le Parisien, a en effet rapidement engendré un tollé politique.
« Il n'y a pas de “hausse” en soi, il s'agit d'une correction apportée sur le descriptif des biens »
3 - Pourquoi la DGFiP va revoir les « éléments de confort » de mon bien immobilier, sans me consulter ?
La DGFiP insiste à propos de la polémique du jour : « il n'y a pas de “hausse” en soi, il s'agit d'une correction apportée sur le descriptif des biens ».
Le descriptif de votre logement, ou de vos biens immobiliers, repose en théorie sur votre déclaration à chaque achèvement de travaux. Toutefois, « des logements rénovés ont pu ne pas donner lieu à réévaluation au fil du temps malgré l'évolution des équipements », explique la DGFiP.
« Que chacun paie selon le type de logement qu'il détient »
Le ministère de l'Économie et des Finances justifie cette modification par « une question d'efficacité et d'équité de l'impôt » : « que chacun paie selon le type de logement qu'il détient ».
4 - Pourrai-je contester les nouveaux « éléments de confort » de ma résidence principale ?
Oui. Et vous aurez tout intérêt à guetter les mises à jour à voir la réaction de la CGT Finances publiques : « La direction générale a décidé de faire une mise à jour automatique de l'évaluation foncière des locaux en ajoutant automatiquement à ceux qui n'en seraient pas pourvus les éléments de confort de base (chauffage central, baignoire...). Pas besoin de recherches préalables ni de demande d'information : on modifie en masse et les propriétaires mécontents viendront ensuite se plaindre si on les a taxés à tort ! Tant pis s'ils ne réclament pas ! »
« Les contentieux suite à cette décision seront sans aucun doute nombreux », réagit de son côté le syndicat Solidaires Finances publiques.
« Les propriétaires dont les logements ne seraient réellement pas équipés de ces installations pourront tout à fait contester leur imposition de taxe foncière et obtenir des dégrèvements correspondants »
« Les propriétaires dont les logements ne seraient réellement pas équipés de ces installations pourront tout à fait contester leur imposition de taxe foncière et obtenir des dégrèvements correspondants », assure la DGFiP.
La contestation se fera en deux étapes. La première, suite au « courriel général aux propriétaires concernés », début 2026 : ce courrier d'information vous invitera à vous « présenter avant avril aux services de la DGFiP, préalablement aux opérations de taxations à la taxe foncière 2026 », si vous estimez « ne pas disposer des éléments de confort visés », explique la DGFiP. « Ceci permettra de ne pas taxer par erreur les redevables qui se seront manifestés. »
Deuxième étape, suite à la mise à disposition « en juin » du « document résumant l'opération de façon plus détaillée », avec le descriptif de votre logement, les éléments de confort ajoutés, etc. : « Les propriétaires dont les logements ne seraient réellement pas équipés de ces installations pourront bien entendu contester leur imposition de taxe foncière et obtenir les dégrèvements correspondants s'ils ne s'étaient pas manifestés avant avril. » Dans ce deuxième cas de figure, vous recevrez vraisemblablement un avis d'impôt ne prenant pas en compte votre réclamation, qui sera traité dans un second temps.
« Le fisc a combien de temps pour traiter ma demande de remboursement de taxe foncière ? »
Exemple : l'impact des « éléments de confort » dans le calcul d'une taxe foncière
Quel sera l'impact de cette hausse automatique sur ma taxe foncière ? Impossible de répondre à cette question, évidemment, car ce sera du cas par cas. Mais la DGFiP a fourni à MoneyVox un exemple certes technique mais parfaitement évocateur du mode de fonctionnement de la taxe foncière.
La « base » imposable est le montant de la valeur locative divisée par deux. Cette valeur locative tient compte, le cas échéant, des abattements et exonérations applicables. Les taux votés par les collectivités territoriales s'appliquent à cette base d'imposition.
Exemple simplifié : M. X a un appartement 82 m² dans la commune AAAA situé rue Général de Gaulle dont la valeur locative/m² est de 20 EUR.
Ce bien possède l'eau (+4 m²), l'électricité (+2 m²), une douche (+4 m²), deux lavabos (+6 m²) et le chauffage (+ 2 m²)
Cela fait un total de 100 m² pour une valeur locative de 2 000 EUR. Sa « base imposable » est donc de 1 000 EUR à laquelle le taux voté par la commune sera appliqué.
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5 - J'ai entendu parler d'une réforme à venir des bases locatives cadastrales : ça a un rapport ?
Non. C'est encore autre chose ! Cela a évidemment un rapport indirect mais il s'agit de deux mises à jour différentes. La mise à jour des bases locatives cadastrales, base de calcul de tous les impôts locaux, aura un impact encore plus important ! Mais cet immense chantier, initialement programmé pour 2026, a été maintes fois repoussé. Prévu aux dernières nouvelles pour 2028, il doit à nouveau être reporté, à 2031 cette fois, via le budget 2026, du moins si l'article 47 du projet de loi de finances est voté en l'état.
La polémique du jour « met en lumière » selon le syndicat Solidaires Finances publiques « le calcul de la taxe foncière qui est basée sur les valeurs locatives cadastrales établies en 1960 pour le foncier non bâti et en 1970 pour le foncier bâti » : « Autant dire qu'elles sont obsolètes et qu'elles produisent de très fortes inégalités. Si une révision est bien prévue mais à ce jour une fois encore reportée, elle risque de trébucher sur les mêmes obstacles que la tentative faite en juillet 1990. En effet, faute d'une volonté politique d'assumer de forts transferts de charges entre les contribuables, cette révision avait été purement et simplement abandonnée... » Cette polémique-là attendra.
























