L'essentiel

  • Le médiateur national de l'énergie a noté que les principaux litiges énergétiques de 2024 concernaient les problèmes de facturation et le niveau de prix.
  • Certains fournisseurs d'énergie ont aussi été épinglés pour des pratiques trompeuses.
  • Les consommateurs peuvent se faire accompagner par le médiateur de l'énergie en cas de litige.

Un montant à payer qui vous semble trop élevé ? Des consommations trop importantes ? Une erreur de prix ? Vous vous êtes sûrement déjà interrogé devant votre facture de gaz ou d'électricité. Dans son rapport sur l'année 2024 publié mardi 20 mai, le médiateur de l'énergie est revenu sur les litiges les plus fréquemment remontés par les particuliers et les petits professionnels.

Parmi les 7 142 saisines recevables (1), « les litiges concernant le niveau de prix et des problèmes de facturation sont les principaux motifs des saisines du médiateur national de l'énergie en 2024. Les litiges avec certains gestionnaires de réseaux de distribution d'électricité sont également nombreux », constate d'abord le médiateur.

Le niveau des consommations facturées

Source de litige numéro 1 ? Les niveaux de consommation, avec 2 471 saisines recevables, soit 35% des dossiers instruits en médiation. En cause, souvent, « un rattrapage de consommations dont le consommateur n'a pas eu conscience », par exemple, parce que la facturation a été bloquée, qu'il n'y a pas eu de relève d'index ou après un rejet des index collectés.

Les cas relevés portent sur « des compteurs censés communiquer, mais qui, en fait, ne transmettent pas d'index pendant plusieurs mois, parfois même plus d'un an ». En cause, les gestionnaires de réseaux, GRDF pour des index sous-estimés, un retard dans la prise en compte d'un changement de compteur, ou encore des erreurs de facturation, mais aussi Enedis, à cause de compteurs Linky défectueux, détectés tardivement.

Fait notable, 135 saisines ont concerné des consommations sans fournisseurs. Cela arrive « lorsqu'un contrat de fourniture d'énergie n'a pas été activé, soit du fait du fournisseur, soit à cause d'une défaillance du distributeur ». Les consommations sont alors facturées par les gestionnaires, parfois de longs mois après et avec un tarif majoré.

En cause également, des problèmes de facturation, ou « des factures dont le montant est particulièrement élevé et dont les consommateurs ne comprennent pas l'origine ». Les mensualités sous-évaluées, ou une facturation qui a été bloquée pendant une longue période est souvent la raison de ce type de litige. Fournisseurs coutumiers du problème : Eni, mais aussi Primagaz et JPME. Le médiateur a d'ailleurs distribué un carton rouge à ces deux derniers fournisseurs, pour cette raison.

A noter : dans certaines situations, des consommations ne peuvent pas être facturées, car trop ancienne. « Dans plus d'un cas sur dix, le médiateur national de l'énergie met en évidence un lien avec l'article L. 224-11 du code de la consommation, qui limite les régularisations de facturation à 14 mois de consommations », précise le rapport.

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Le niveau des prix

Le niveau de prix représente quant à lui 30% des saisines recevables. Un nombre de saisines en baisse depuis la diminution des prix après la crise énergétique. « Les contestations des consommateurs ont principalement pour origine des souscriptions de contrats dont le niveau de prix élevé a été occulté du fait d'une information commerciale manquant de clarté », détaille le rapport.

Il arrive qu'au moment de la souscription, les prix ne soient pas présentés de manière compréhensible. Situation concrète présentée : « Engie avait proposé des offres peu claires pour lesquelles ses clients n'ont pas compris qu'elles prévoyaient des prix élevés », indique le rapport. Autre fournisseur concerné, Eni, avec des offres « dans lesquelles le prix appliqué sur les factures n'était pas toujours celui qui figurait dans sa grille tarifaire ».

Ou encore, « le fournisseur Ohm énergie, dont le prix des offres de fourniture de gaz variait chaque mois en fonction d'un barème de référence qu'il déterminait lui-même, n'informait pas suffisamment ses clients, se contentant de leur adresser un courriel comportant les nouveaux prix, sans les alerter en cas de hausses importantes. » Même problème au renouvellement des contrats.

Bon à savoir : en cas de modification du contrat, le fournisseur doit en informer son client au moins 1 mois avant et de manière « transparente et compréhensible ». Si cela n'a pas été fait, vous pouvez obtenir l'application des anciens tarifs. Le tribunal judiciaire de Valanciennes a ainsi condamné le fournisseur Dyneff, qui avait mal informé une consommatrice sur une évolution de tarif, de lui rembourser 4 653 euros, correspondant à l'écart entre anciens et nouveaux prix du KWh.

Autre source de litige moins fréquente en 2024, mais toujours récurrente : la sous-estimation des mensualités. Certains fournisseurs minorent volontairement la consommation annuelle et ainsi les mensualités, pour présenter des tarifs plus attractifs. Avec à la clef pour le client, des factures de revalorisation salées. Encore l'année dernière, plusieurs fournisseurs ont été épinglés pour cette pratique : Eni, Engie, Ohm énergie, Wekiwi ou encore EDF.

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Quels litiges pour les professionnels ?

Les professionnels, associations ou copropriétés n'ont pas été épargnés par les litiges. La majorité d'entre eux concernent la hausse des prix. « Leurs factures d'électricité et de gaz ont parfois été multipliées par cinq, parfois même par dix, et avec des durées d'engagement contractuelles pouvant atteindre trois ans. Ainsi, en 2024, plus de la moitié des saisines recevables par des consommateurs professionnels a porté sur un problème de prix (715 saisines recevables sur 1 376) », relève le médiateur.

Autre problématique fréquente : la facturation de frais à la suite d'une résiliation anticipée. Contrairement aux particuliers, des indemnités de résiliation anticipée (IRA) peuvent être demandées aux consommateurs non résidentiels. Problème, elles peuvent atteindre des milliers d'euros et ne sont pas toujours appliquées avec transparence.

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Pratiques commerciales abusives, problèmes avec Enedis...

Attention aussi aux pratiques commerciales trompeuses, cause de litiges en hausse en 2024 (+ 34% par rapport à 2023, avec 106 demandes). Wekiwi est souvent au cœur de ces saisines. Le médiateur donne plusieurs exemples : le non-affichage du prix du KWh, un contrat à prix fixe transformé en contrat indexé sans information du client, ou bien un contrat signé avec une consommatrice sans accès internet de 83 ans, qui n'avait jamais sollicité le fournisseur.

Le médiateur recense également « 476 saisines recevables pour des litiges concernant des raccordements au réseau et des ouvrages réseaux (...). 86% concernent le distributeur Enedis ». Parmi les problèmes, des délais de raccordement trop longs. Or, « sans raccordement, les projets de location, de vente ou d'occupation d'un logement sont repoussés, voire remis en cause, ce qui génère des frais ou des pertes de revenus ».

Les renouvellements de colonnes montantes dans les immeubles font aussi partie des motifs des contestations. Tout comme la qualité de fourniture de l'électricité, notamment après des coupures à cause de la défaillance d'un équipement du réseau de distribution ou d'une surtension. « Le nombre de ces litiges a augmenté en 2023 et 2024 du fait des fortes tempêtes, dont Ciarán qui a fortement touché la Bretagne », remarque le médiateur.

Des particuliers ont ainsi eu des difficultés pour obtenir l'indemnité prévue en cas de coupure durant une durée supérieure à 5 heures, ou pour recevoir des indemnisations justes, de la part d'Enedis, à la suite de dommages électriques.

Que faire en cas de litiges ?

Un doute sur votre facture ? Un problème avec votre fournisseur, ou bien le distributeur ? Il faut d'abord lui demander des explications. En cas d'absence de réponse, ou si la réponse ne vous convient pas, vous pouvez saisir le médiateur de l'énergie.

Plusieurs conditions : par exemple, vous devez être un particulier, une entreprise de moins de 10 salariés et avec 2 millions d'euros de chiffre d'affaires au maximum, une association, une collectivité ou un syndicat de propriétaires. Il faut également avoir adressé par courrier ou mail une réclamation au fournisseur, dans les deux mois et avant 1 an, pour déposer cette demande.

Si la demande est recevable (1), le médiateur de l'énergie propose une solution à l'amiable que les deux parties sont libres d'accepter. Il est ensuite possible d'engager une action en justice, « en sachant que la décision qui serait rendue par un juge peut être différente ».

Globalement, les fournisseurs ou distributeurs se conforment à la solution proposée : le taux de suivi des montants de dédommagements recommandés en médiation était de 90% en 2024. Et les sommes récupérées peuvent être conséquentes : en moyenne, 1 918 euros ont été accordés après une saisine (903 euros pour les particuliers et 6 069 euros pour les professionnels).

(1) Toutes les conditions sont détaillées sur le site du médiateur de l'énergie.