Prix, label... Les offres d'électricité et de gaz vertes, greenwashing ou vraiment écolos ?

Si « 80% de la population sait qu'il existe des offres d'électricité verte et 46% de gaz vert (...) seulement 60% des clients se disent prêts à souscrire à ces offres ». Et parmi eux, 45% ne le feraient que si l'offre est moins chère ou au même prix qu'une autre offre. Voilà les réponses reçues par le Médiateur de l'énergie lors de son dernier baromètre.

Pour autant, dans un rapport récent, la Commission de régulation de l'énergie soulignait que « les consommateurs sont de plus en plus nombreux à prendre en considération d'autres aspects que le niveau des prix et de la stabilité dans le choix de leur offre. Par exemple, les consommateurs montrent une appétence croissante pour les offres vertes qui n'existent pas dans les Tarifs réglementés de vente de l'électricité ».

C'est quoi une offre d'énergie verte ?

Pour l'électricité ou pour le gaz, on dit d'une offre qu'elle est verte à partir du moment où le fournisseur a acheté des certificats de garanties d'origine. Ces certificats ont deux fonctions : ils sont un complément de revenu pour les producteurs d'énergie renouvelable et ils servent à prouver qu'une quantité équivalente d'énergie produite grâce à des sources renouvelables a été injectée sur le réseau. Pour l'électricité, les garanties d'origine proviennent de producteurs du secteur hydraulique, éolien ou solaire. Le nucléaire ou les énergies fossiles sont exclus. Pour le gaz, elles viennent de la méthanisation.

Mais attention, pour autant, cela ne veut pas dire que le gaz ou l'électricité qui arrivent chez vous proviennent de ces énergies renouvelables, si vous avez souscrit une offre verte. Impossible de savoir d'où vient l'énergie que vous utilisez vraiment, à part si vous possédez des panneaux solaires en autoconsommation. Le gaz ou l'électricité, produit en France ou importé, est injecté sur le réseau et redistribué ensuite sur tout le territoire.

Par exemple, en France, lundi 2 décembre, 74% de l'électricité avait été produite via le nucléaire, 9% via l'éolien, 10% via l'hydraulique, 5% grâce au gaz, selon les données mises en ligne par RTE. « Pour faire une analogie avec une baignoire, tous les producteurs déversent de l'eau, mais nous ne savons pas de quelle source vient celle qui est puisée dans notre baignoire. L'électron, c'est pareil. En revanche, en tant que consommateur, si mon argent va aux producteurs d'énergie renouvelable, je fais en sorte qu'il y en ait davantage », explique Lancelot d'Hauthuille, directeur général d'Octopus Energy, fournisseur qui propose des offres vertes.

Les garanties d'origine sont-elles suffisantes ?

Le système des garanties d'origine est critiqué depuis plusieurs années. Dans un guide sur l'électricité verte et dépublié après les bouleversements provoqués par la crise de l'énergie sur le marché, Greenpeace pointait par exemple « l'entourloupe » des garanties d'origine. Ce qui est dénoncé, c'est la possibilité pour les fournisseurs d'acheter ces garanties d'origine, sans obligation pour autant d'acheter de l'énergie renouvelable.

La nuance est de taille. Selon les derniers chiffres d'EEX, la bourse européenne d'énergie qui gère le registre national des garanties d'origine, une garantie d'origine, qui correspond à 1 MWh d'énergie s'est vendue en moyenne entre 33 et 40 centimes d'euros pour l'électricité. En comparaison, le prix d'un MWh d'électricité s'échangeait sur les marchés contre plus de 116 euros, en France, lundi 2 décembre.

Par exemple, un fournisseur peut tout à fait acheter de l'électricité produite à partir d'énergie fossile ou nucléaire et vendre son offre comme étant verte s'il achète des garanties d'origine. D'autant que « la production d'électricité d'origine renouvelable est en général, pour l'instant, plus coûteuse que la production d'électricité d'origine fossile ou nucléaire », explique le médiateur de l'énergie sur son site.

Un système insuffisant ? Oui, selon l'Ademe : « Le qualificatif « d'offre verte » ne permet pas de différencier les offres ayant un réel impact sur le développement des énergies renouvelables en France », notamment parce le prix des garanties d'origine est très bas. Elle a donc lancé en 2021 le label Vervolt, pour les offres d'électricité. Le but, certifier que les fournisseurs s'approvisionnent vraiment auprès de producteurs nationaux utilisant des énergies renouvelables. Aujourd'hui, 12 offres sont labellisées au niveau engagé ou très engagé.

Enercoop, fournisseur dont toutes les offres sont labellisées au niveau le plus engagé, s'inscrit dans cet objectif. « Depuis le départ, nous prônons le dépassement du mécanisme des garanties d'origine, car il ne suffit pas pour assurer la traçabilité des factures des clients. Nous voulons montrer aux consommateurs à quoi sert leur facture et qui elle va rémunérer, puisque nous achetons l'énergie en direct à des producteurs », précise Julien Courtel, chargé du discours énergie chez le fournisseur qui a aussi la particularité de fonctionner en coopérative.

L'éternelle question du prix

Autre réflexion de Julien Maréchal, directeur des opérations chez Ohm énergie, dont certaines offres intègrent des garanties d'origine : « On ne veut pas que les consommateurs se disent « je suis en offre verte donc je peux consommer à fond les ballons ». On constate aussi que tous les consommateurs ne sont pas enclins à payer un supplément de prix pour une offre verte. L'énergie est une dépense obligatoire, tous n'en ont pas les moyens. On essaie surtout de présenter nos offres en insistant sur l'objectif de réduire sa consommation puisque l'énergie la plus verte, c'est celle qu'on ne consomme pas. » Une pratique partagée par Octopus Energy et Enercoop, qui proposent aussi des conseils et incitations pour consommer moins, notamment en cas de pics de consommation.

Reste que pour Caroline Keller, cheffe du service information et communication du médiateur de l'énergie, « les garanties d'origine sont déjà un premier pas ». Autre avantage, « la barrière de prix est moins présente ». Les offres intégrant uniquement des garanties d'origine se classent en effet souvent parmi les moins chères, comme le montrent les top 5 mensuels de MoneyVox. A l'inverse, les offres labellisées ont tendance à afficher des prix plus élevés, probablement entraînés par les coûts et contraintes pour l'obtenir.

Le prix est un argument de taille, puisqu'il reste le facteur de décision numéro 1 pour les consommateurs à la recherche d'une nouvelle offre. La preuve sur le comparateur du médiateur, Caroline Keller constate que l'écrasante majorité trient encore les offres par prix et que seuls 5% choisissent un classement par pourcentage d'énergie verte.

Lancelot d'Hauthuille (Octopus Energy) remarque tout de même que « l'énergie verte est un facteur de fidélisation ». Point de vue similaire pour Julien Courtel (Enercoop) « la dynamique commerciale est présente, les consommatrices et consommateurs recherchent de plus en plus un haut niveau exigence pour consommer mieux. Le fait que les aides institutionnelles soient davantage présentes est aussi un plus. Le label Vertvolt permet de constater que toutes les offres vertes d'électricité ne se valent pas ».