Alerte sur l'épargne réglementée ! Comme chaque année à la même époque, les taux du Livret A, LDDS et LEP sont susceptibles d'être actualisés le 1er août prochain. François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France a jusqu'au 15 juillet, c'est-à-dire lundi prochain, pour faire connaître sa position.
Disons-le tout net : il n'y a aucun espoir qu'il propose d'améliorer leur rendement. On sait déjà que celui du Livret A, et par extension du LDDS, ne va pas bouger. Leur taux va rester scotché à 3% jusqu'en 2025, en vertu de la décision prise il y a un an par le (futur) ex-ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, de le geler. Un choix défavorable aux intérêts des épargnants, mais qui ne devrait pas être remis en cause. Un futur gouvernement, issu de la nouvelle Assemblée nationale élue dimanche dernier, aurait pu s'y essayer, mais les délais sont trop courts : il n'y a aucune chance qu'il soit nommé d'ici à l'échéance du 15 juillet.
Taux du Livret A : une bonne et une mauvaise nouvelle à partir du 1er août 2024
Tout l'enjeu, finalement, concerne le Livret d'épargne populaire (LEP). Son taux à lui n'est pas gelé. Durant les dernières années, il a évolué au gré des chiffres de l'inflation, atteignant des sommets (6,10%) au plus fort de la séquence de flambée des prix, avant de refluer en début d'année. Qu'en sera-t-il le 1er août prochain ? Voici les scénarios possibles.
* Source : Banque de France
© MoneyVoxScénario n°1 : l'application de la formule
C'est, en principe, le cas de figure par défaut. Tous les 6 mois, mi-janvier et mi-juillet, la Banque de France est chargée d'appliquer une formule de calcul, inscrite dans la réglementation, afin de déterminer le taux du LEP pour le semestre suivant. Ce nouveau taux s'aligne soit sur la moyenne de l'inflation au cours du semestre précédent, soit sur le taux « technique » (celui issu de la formule de calcul) du Livret A augmenté d'un demi-point. La valeur la plus élevée des deux l'emporte.
Cette année, c'est le second cas de figure qui pourrait s'appliquer. Explication. L'inflation moyenne du 1er semestre va atterrir autour de 2,4% (1), en baisse de près de 2 points. Le taux « technique » du Livret devrait lui atteindre 3,10%. Après l'ajout du demi-point de bonus, celui du LEP serait de 3,60%, ce qui représenterait une baisse de 1,40 point par rapport à l'actuelle rémunération.
Il n'est pas certain, toutefois, que le gouverneur de la Banque de France fasse ce choix, très défavorables aux ménages équipés de LEP, souvent modestes. Elle représenterait, en effet, un manque à gagner de 70€ d'intérêts sur les 6 prochains mois pour un compte crédité de 10 000€.
François Villeroy dispose d'un recours, prévu dans la loi : proposer à l'exécutif de ne pas appliquer cette formule et de fixer le rendement à sa guise.
Scénarios n°2 et 3 : le statu quo ou le freinage
Si le choix de la dérogation s'impose, plusieurs choix sont ensuite possibles. Le gouverneur de la Banque de France peut proposer au ministre de l'Economie le statu quo, c'est-à-dire le maintien à 5%. Une manière, donc, de renvoyer la responsabilité d'une baisse au prochain gouvernement, qui pourrait être dirigé par le Nouveau Front populaire, la coalition de gauche arrivée en tête des récentes élections législatives.
Une autre option serait de freiner la baisse du taux du LEP. Cette dernière est, à terme, certaine, puisque la flambée d'inflation est désormais contenue : le rythme de la hausse des prix à la consommation est revenu, depuis 4 mois, autour des 2% annuels, ce qui était l'objectif visé par la Banque centrale européenne (BCE). Les pouvoirs publics pourraient choisir de retarder l'inéluctable en optant pour un palier à 4%. C'est précisément ce qui s'est passé en janvier dernier, lors de la précédente échéance d'actualisation du taux du LEP. Attendu à 4,10%, le taux avait finalement été fixé à 5%.
Un rendement réel largement positif
Ce passage de 5% à 4%, évidemment, serait un coup dur pour les ménages équipés. Toutefois, si on élargit la perspective au paysage de l'épargne dans son ensemble, le LEP resterait un produit attractif.
Il faut le rappeler : le rendement d'un produit d'épargne doit aussi s'apprécier par rapport à l'inflation, qui grignote le pouvoir d'achat des revenus générés. Or de ce point de vue, la situation continue de s'améliorer. En février 2023, le rendement réel, c'est-à-dire corrigé de l'inflation, du LEP était encore négatif, alors que son taux facial n'avait jamais été aussi haut (6,10%). Avec une inflation proche des 2%, il est désormais largement positif (plus de 2,8% en mai, par exemple) et le resterait, même en cas de baisse à 3,60 ou 4%.
* inflation mensuelle hors tabac
En rouge : rendement réel du LEP négatif par rapport à l'inflation
En vert : rendement réel du LEP positif par rapport à l'inflation.
(1) Il s'agit d'une estimation, dans la mesure où le taux d'inflation du mois de juin n'est pas encore définitif. Il est estimé par l'Insee à 2,10%.