Voulant « encourager l'investissement productif », cet impôt ne se superpose toutefois pas totalement à l'ex-ISF, et son périmètre exact comme son rendement restent à préciser.
Nouvelle assiette
Porté par Jean-Paul Mattei (MoDem), l'amendement au projet de budget 2026 actuellement examiné à l'Assemblée nationale a été voté par le RN, le PS, le MoDem et les députés du groupe centriste Liot. Des modifications y ont été apportées par le PS.
Cet « impôt sur la fortune improductive » modifie l'IFI, qui avait lui-même remplacé l'ISF en 2018, en restreignant l'assiette, la base sur laquelle est calculée l'impôt, aux seuls biens immobiliers d'une valeur supérieure à 1,3 million d'euros net.
« Par rapport à l'assiette immobilière actuelle de l'IFI, (la nouvelle version) est restreinte. Par rapport à l'assiette financière de l'ISF, elle est aussi restreinte », relève auprès de l'AFP Rayan Nezzar, qui enseigne les finances publiques à Sciences Po, un temps conseiller de Gabriel Attal.
Biens « improductifs »
L'assiette du nouvel impôt inclut biens immobiliers, objets précieux, voitures, yachts, œuvres d'art, avions, actifs numériques (cryptomonnaies), liquidités, placements financiers non investis dans les entreprises ou produits d'assurances-vie - sauf celles en unités de comptes, à savoir des placements non garantis plus risqués que les fonds euros. Il ne vise pas les biens professionnels, comme en principe l'ISF.
« Ce qui est certain, c'est que ce n'est pas l'ISF que nous avions avant 2017. (...) C'est une forme de fiscalité un peu hybride », a relevé vendredi la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin. Le gouvernement est opposé au rétablissement de l'ISF.
Résidence principale exclue
Est exonérée « la résidence principale ou unique » jusqu'à 1 million d'euros. L'IFI prévoyait un abattement de 30% de la valeur de la résidence principale.
En revanche, comme c'est déjà le cas pour l'IFI, les biens loués sont concernés, un sous-amendement PS ayant modifié celui de Mattei qui prévoyait d'exonérer ceux loués pour une durée de plus d'un an répondant à des critères environnementaux.
Taux unique
Autre nouveauté, le barème progressif de l'IFI est remplacé par un taux unique de 1% (contre 0,5% à 1,5% actuellement). Le seuil de paiement de l'impôt est maintenu à 1,3 million d'euros en vertu d'un sous-amendement socialiste, alors que le député Mattei entendait le relever à 2 millions.
Sur X, le député socialiste Philippe Brun voit dans ce « nouvel ISF » une « vraie victoire » en faveur d'une « fiscalité plus équitable ». La gauche avait peu avant échoué à faire voter l'emblématique taxe Zucman visant à instaurer un impôt minimum de 2% sur les patrimoines de 1 800 contribuables possédant au moins 100 millions d'euros de patrimoine, y compris professionnel.
Rendement inconnu
L'IFI a rapporté 2,2 milliards d'euros en 2024, acquittés par 186 000 foyers, moins que l'ISF en 2017 (4,2 milliards d'euros pour 358.000 déclarations).
Le nouvel impôt a un rendement incertain. Le PS revendique 2 milliards de plus, alors que LFI, très remontée contre la mesure, craint plutôt une baisse. « Le choix d'un taux unique à 1% conduit à réduire potentiellement le rendement du nouvel IFI pour les patrimoines les plus élevés », souligne Rayan Nezzar.
Selon le ministère de l'Économie et des Finances, un chiffrage est en cours. « Vous dire si on est entre 1 et 3 milliards ne m'est pas possible à l'instant où je parle. On est dans cette fourchette là », a indiqué Amélie de Montchalin vendredi soir.
Long parcours
Le parcours parlementaire est loin d'être fini pour l'impôt sur la fortune improductive. Si la partie recettes du projet de budget est votée à l'Assemblée nationale, il doit encore passer l'étape du Sénat et d'une éventuelle commission mixte paritaire. « Evidemment, ce n'est qu'un début et ce nouvel ISF est très perfectible », souligne Philippe Brun.
« Aujourd'hui, il est extrêmement hasardeux de porter un jugement, parce que ce que l'on a, c'est une maquette », juge Philippe Bruneau, président du Cercle des fiscalistes, à l'AFP. Il s'interroge aussi sur l'articulation de cet impôt avec la taxe sur les holdings votée à l'Assemblée.