C'est l'effet papillon version Bercy : un simple ajustement budgétaire, et c'est tout l'écosystème de la location saisonnière qui se retrouve chamboulé.
Jusqu'ici, les loueurs en meublé échappaient à la TVA tant que leurs recettes annuelles restaient sous 85 000 euros. Ce plafond, désormais abaissé à 37 500 euros, pourrait faire basculer des milliers de particuliers dans le champ de la taxe.
« Un chalet loué quelques semaines pendant la saison hivernale pourrait facilement franchir le seuil », illustre Grégoire Person, avocat fiscaliste au cabinet Cyplom, auprès des Échos.
En principe, la location meublée, qu'elle soit à l'année ou de courte durée, reste exonérée de TVA. Mais elle y entre dès que le bailleur fournit au moins trois des quatre prestations hôtelières : le petit-déjeuner, le linge de maison, le ménage régulier et l'accueil des locataires.
Vers la fin des draps et serviettes dans les Airbnb ?
« Le critère de l'accueil est très large pour l'administration. Quant au ménage, il suffit de le faire à l'arrivée du locataire, une fois par semaine, pour que cela soit considéré comme un service », précise le fiscaliste. De même, la mise à disposition de draps et serviettes à l'arrivée coche déjà la case « fourniture de linge », même sans renouvellement pendant le séjour.
Résultat : nombre de propriétaires pourraient, sans le réaliser, remplir trois conditions qui font basculer leur activité dans le champ de la TVA. Et dès que les recettes dépassent les 37 500 euros, le fisc pourrait réclamer son dû. Pour échapper à la taxe, certains bailleurs songent déjà à limiter les prestations : pas de linge fourni, pas de petit-déjeuner, voire un accueil sans contact.
Les touristes devront peut-être, demain, venir avec leurs propres draps et serviettes. D'autres envisagent de structurer leur activité autrement. « Le seuil de TVA s'apprécie par entité juridique, pas par foyer fiscal », rappelle Grégoire Person. Un investisseur possédant plusieurs logements pourrait donc répartir ses biens entre plusieurs SCI ou une holding patrimoniale, afin d'éviter de franchir le seuil dans une même structure.
Paradoxalement, entrer dans le régime de la TVA n'est pas forcément une mauvaise nouvelle. Les loueurs soumis au régime réel d'imposition peuvent récupérer la taxe sur leurs achats, travaux ou mobilier. « C'est particulièrement intéressant lors de l'achat d'un logement neuf, car la TVA sur le prix d'acquisition peut être partiellement ou totalement récupérée », souligne Grégoire Person.
En revanche, les bailleurs qui n'ont ni projet d'investissement ni charges élevées risquent d'y perdre. L'administration n'a pas encore détaillé les modalités exactes de ce nouveau seuil, mais la philosophie du texte est claire : rapprocher le statut des meublés touristiques de celui des locations traditionnelles, et limiter les effets d'aubaine liés à la fiscalité avantageuse du secteur. En attendant les décrets d'application, mieux vaut donc vérifier si les draps sont vraiment inclus.