Trois jours après la dégradation de la note de la dette française par Fitch, François Villeroy de Galhau a insisté, dans un entretien au Parisien, sur la nécessité de résoudre le problème budgétaire « aggravé » par la crise politique, afin de ramener le déficit public à 3% du produit intérieur brut (PIB) en 2029. « On ne peut plus attendre », a-t-il déclaré, déplorant les « querelles politiciennes ».
Le gouverneur a défendu « un effort partagé » entre Etat, collectivités locales et Sécurité sociale, qui doit porter aux trois quarts sur une maîtrise des dépenses publiques. Mais cet effort ne doit pas pour autant « exclure certaines mesures fiscales ciblées et exceptionnelles, jusqu'à un quart de l'effort total », a-t-il développé.
« La vérité, c'est qu'il n'y a jamais d'impôt indolore, ni d'impôt magique qui rapporterait énormément en France alors qu'il ne s'applique pas chez nos concurrents », a-t-il déclaré, interrogé sur la taxe dite « Zucman » sur les très hauts patrimoines réclamée par les socialistes au nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu.
« La vérité, c'est qu'il n'y a jamais (...) d'impôt magique qui rapporterait énormément en France alors qu'il ne s'applique pas chez nos concurrents »
Pour M. Villeroy de Galhau, les mesures fiscales doivent épargner les classes moyennes et les PME, et durer jusqu'au retour du déficit sous 3% du PIB.
« Pour citer un exemple, des mesures anti-optimisation fiscale sur les hauts patrimoines seraient justifiées » afin que l'effort de redressement soit « ressenti comme juste », a-t-il indiqué. Il a estimé à ce titre que le canevas de budget présenté en juillet par l'ex-Premier ministre François Bayrou « peut être amélioré ».
Troisième Premier ministre en un an, Sébastien Lecornu multiplie les consultations depuis sa nomination le 9 septembre pour préparer un budget et éviter d'être renversé comme ses prédécesseurs. Alors qu'un nouveau gouvernement se fait attendre, le projet de budget doit être présenté avant la mi-octobre au Parlement pour être adopté avant la fin de l'année.
Prévision de croissance relevée
Concernant la croissance, celle-ci résiste, quoique ralentie par rapport à 2024 (+1,1%). La Banque de France a relevé lundi à 0,7% sa prévision pour 2025, contre 0,6% auparavant.
Portée au premier semestre par les variations de stocks, la croissance « devrait être suivie par un mouvement de déstockage et un net rebond des exportations dès le troisième trimestre », a-t-elle expliqué en actualisant ses prévisions macroéconomiques.
En 2026 et 2027, la croissance devrait s'accélérer, mais de façon moins marquée qu'escompté. Elle est révisée en baisse de 0,1 point à respectivement 0,9% et 1,1%.
Risque d'attentisme
A l'instabilité nationale, source potentielle d'attentisme chez les ménages et les entreprises, s'ajoute un environnement international plus défavorable : renchérissement de l'euro qui pénalise la compétitivité européenne, moindre demande externe et prix du pétrole plus élevé.
Concernant l'impact de la hausse des droits de douane américains, « les exemptions dont bénéficient certains secteurs (en particulier l'aéronautique) compensent (...) les hausses additionnelles pour les autres biens », a souligné la Banque de France.
A partir de 2026, elle anticipe une reprise de l'investissement privé et un raffermissement de la consommation des ménages (0,4% en 2025, puis 1,0% et 1,1%), dont le pouvoir d'achat bénéficierait d'une progression des salaires supérieure à celle des prix.
« Une des plus faibles de la zone euro », l'inflation resterait contenue, mesurée selon l'indice harmonisé (IPCH). Elle atteindrait 1% en 2025 avant de remonter à 1,3% en 2026 et 1,8% en 2027. Quant au taux de chômage, il se stabiliserait autour de son niveau actuel de 7,5%.
Malgré les récents remous politique, la Banque de France estime que le pays est en mesure de réduire son déficit public à 5,4% cette année, après 5,8% en 2024. C'est plus incertain pour l'objectif de 4,6% qui était affiché par le précédent gouvernement : les consultations autour du budget pourraient conduire à alléger l'effort budgétaire de 44 milliards d'euros initialement visé sans forcément de croissance supplémentaire.
Jeudi, l'Insee avait aussi relevé sa prévision annuelle, à 0,8%, pointant toutefois un « singulier manque de confiance » des agents économiques.