66 422 entreprises ont souffert d'une défaillance l'an dernier, soit 28% de plus qu'en 2019, l'année qui a précédé la succession de crises (Covid, inflation...), un plus haut niveau depuis au moins 15 ans, l'âge de cette étude. Les défaillances ont même accéléré au 4e trimestre de 2024, avec un total de 17 966, contre 16 712 sur la même période un an plus tôt.

Et, ce que BPCE L'Observatoire qualifie de « signal d'alerte majeur », les défaillances ont touché l'an dernier 5.265 PME et ETI, soit une hausse de 51% par rapport au niveau d'avant-Covid, dont +57% pour les entreprises de plus de 100 salariés (170 défaillances l'an dernier).

260 000 emplois menacés

Au total, 260 000 emplois ont ainsi été menacés en 2024 par ces défaillances. La situation est due à « un environnement économique des entreprises qui se dégrade depuis quelques mois », selon l'étude. En dépit d'une croissance qui résiste (+1,1% en 2024) et d'un taux de chômage qui reste modéré, les entreprises « semblent particulièrement fragilisées par une activité économique et des marges plus contraintes que la moyenne », tandis que « les stigmates des chocs précédents » demeurent. S'y ajoute l'incertitude politique qui pèse sur les décisions d'investissements déjà en net repli depuis plusieurs trimestres.

« En soi le nombre de défaillances n'est pas un sujet de préoccupation majeur », a nuancé mercredi lors d'une conférence de presse Alain Tourdjman, directeur études et prospective du Groupe BPCE. « Ce qui est grave est qu'elles soient concentrées sur les PME-ETI », a-t-il souligné. « Une taille critique importante et une certaine maturité, habituellement critères de résilience pour une entreprise, ne le sont plus actuellement », a poursuivi Julien Laugier, économiste du groupe.

Nouvelle hausse en 2025 ?

Les mesures du quoi-qu'il-en-coûte avaient évité de nombreuses défaillances de 2020 à 2022. Selon l'étude, 37% de celles évitées se sont désormais manifestées, et le rattrapage atteint, voire dépasse, 100% pour les PME-ETI, jusqu'à 130% pour les entreprises de plus de 100 salariés.

Pour 2025, BPCE L'Observatoire envisage une légère augmentation des défaillances, à environ 68 000, « un plus haut historique », et +2% par rapport à 2024, avant une possible décrue en 2026. Cette année, ce sont les plus petites structures qui subiraient le rattrapage, par « contagion » de la défaillance des PME-ETI à leurs petits sous-traitants.

En 2024, observe BPCE Le Laboratoire, la construction et l'immobilier ont été très affectés par la hausse des taux d'intérêt et des prix des matières premières : 17 538 entreprises ont ainsi été en défaillance, une hausse de 36% par rapport à 2019. Le pire est revenu aux agences immobilières, dont le nombre de défaillances a augmenté de 225% par rapport à 2019 (1 232 défaillances), « très au-delà des points hauts de 2010-2015 », relève l'étude, qui impute la situation à la langueur des transactions immobilières des ménages.

Cinq régions très affectées

Du point de vue géographique, cinq régions sont très affectées par les défaillances : Rhône-Alpes, Poitou-Charentes, Ile-de-France, Midi-Pyrénées et Aquitaine, où leur nombre a augmenté de 34% à 43% en 2024 par rapport à 2019. Lorraine, Champagne-Ardenne et Limousin (8% à 11%) semblent épargnées en revanche.

Dans un communiqué séparé, l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) a signalé mercredi une hausse de près de 20% de ses bénéficiaires en 2024, à quelque 250.000. Au total, elle a déboursé plus de 2,1 milliards d'euros, soit des dépenses en progression de plus de 23% par rapport à 2023.

Ce « chiffre record » de salariés bénéficiaires « témoigne de la gravité de la situation économique actuelle » et « les projections sur l'année 2025 laissent présager un niveau similaire de mobilisation du régime », a indiqué Christian Nibourel, président de l'AGS.