La réforme est « stoppée » mais pas « abrogée », elle est toujours « nécessaire », pointe-t-on au sommet de l'Etat : si le président n'est pas forcément très « heureux » d'avoir dû faire ce geste, il espère bien ne pas enterrer ce marqueur de son deuxième quinquennat, quitte à le revisiter.
De l'aveu du prix Nobel d'Economie 2025, Philippe Aghion, le chef de l'Etat réfléchirait même à un référendum sur la retraite à points, à laquelle il avait renoncé en 2023 pour finalement reculer l'âge légal de départ. Non sans regret. « On en a justement parlé. Il m'a très gentiment donné une décoration il y a une semaine, et justement il pensait à l'idée d'un référendum sur la réforme à points », a lâché sur RTL l'économiste, décoré le 6 octobre du titre d'officier de l'Ordre national du Mérite.
A l'Elysée, personne ne s'aventure publiquement sur ce terrain. Mais le président a concédé en 2024 que la réforme des retraites par points, plombée par la crise des gilets jaunes, aurait refondé « plus fondamentalement le système » et « changé en profondeur les choses ».
Il attend désormais beaucoup de la Conférence sur les retraites et du travail initié par le Premier ministre Sébastien Lecornu pour dégager de nouvelles pistes de réflexion sur ces sujets.
« Pas évident »
Et si les partenaires sociaux arrivent à trouver un accord, un référendum, outil à la main du chef de l'Etat, pourrait constituer une voie de passage. Emmanuel Macron a lui-même envisagé à plusieurs reprises d'organiser des consultations directes des Français, sans toutefois préciser sur quels sujets et sans passer juqu'ici à l'acte.
En attendant, il encaisse la suspension de la réforme des retraites, condition sine qua non posée par les socialistes pour ne pas censurer le gouvernement de Sébastien Lecornu dès sa nomination alors que l'examen du budget 2026 se fait attendre. « C'était loin d'être évident pour le président », comme pour son camp, relève une macroniste de la première heure. « Mais c'était la seule voie de passage. La seule. On ne pouvait pas y arriver à moins », concède-t-elle.
Le « désordre et l'instabilité » auraient coûté « encore plus cher », veut-on également se convaincre au sommet de l'Etat alors que marchés et institutions financières scrutent avec nervosité la situation politique en France. Très attendu sur sa gestion de la crise depuis la nomination de Sébastien Lecornu, sa démission et sa reconduction cinq jours plus tard, Emmanuel Macron continue de se faire discret.
Article 40
Tout juste a-t-il appelé à la « responsabilité » de tous pour « oeuvrer à la stabilité » du pays, lundi, depuis l'Egypte où il assistait à la signature de l'accord de paix pour Gaza.
Comme s'il était en cohabitation, Emmanuel Macron assure vouloir rester en surplomb, concentré sur son rôle de chef des armées, pilote de la politique étrangère et garant des institutions, en laissant son Premier ministre en première ligne.
Mais Sébastien Lecornu est un fidèle de la première heure et il n'est pas question de « faire n'importe quoi » sur les retraites, comme l'a martelé le Premier ministre, mardi, lors de sa déclaration de politique générale.
Avec à la clé plusieurs outils de riposte, dont l'article 40 de la Constitution, qui stipule que les propositions et amendements des parlementaires ne peuvent être « recevables » s'ils conduisent à aggraver les déficits publics, rappelle-t-on du côté de l'exécutif.
D'ici là, Emmanuel Macron fait le pari que, devant la menace d'une nouvelle dissolution de l'Assemblée, les partis continueront à trouver des compromis et à jouer le jeu de la stabilité.
« Les désaccords sont estimables, mais ils ne sont acceptables que si des compromis sont possibles », a-t-il martelé mercredi lors du premier Conseil des ministres du gouvernement Lecornu, en rappelant que les Français étaient « fatigués du fracas » politique.
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