Difficile de faire plus déroutant. En septembre dernier, les retraites de base devaient suivre leur rythme habituel de revalorisation annuelle, au 1er janvier 2025. Début octobre, était annoncé un « simple » report de six mois... à un taux un peu moins généreux car l'inflation est attendue en baisse d'ici là. Puis le « compromis Wauquiez » a inséré encore plus de complexité : hausse « moitié d'inflation » en janvier pour tous, attendue à 0,9%, et rattrapage en juillet pour les plus modestes. Puis le compromis des sénateurs et députés en commission mixte paritaire était encore moins favorable aux retraités : 0,8% en janvier avec un rattrapage à l'été pour les retraites inférieures au Smic afin d'atteindre 1,6%.

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2,2%, résultat de la formule de calcul réglementaire habituelle

Et finalement, maintenant que la censure du gouvernement Barnier est votée, et surtout maintenant que le projet de loi portant cette hausse différenciée est considéré comme rejeté ? Eh bien retour à la case départ : la revalorisation classique basée sur les douze derniers indices d'inflation (1), comme le prévoit le Code de la Sécurité sociale. C'est-à-dire 2,2%. Cette revalorisation réglementaire doit s'appliquer à l'Assurance retraite mais aussi aux pensions de base des fonctionnaires de l'Etat (SRE), à celles de la CNRACL, ou encore à la complémentaire des anciens contractuels Ircantec qui suit les évolutions du régime général.

Retraite : scénario catastrophe ou bonne surprise du 1er janvier 2025 en cas de censure ?

« Les retraités seraient effectivement gagnants, si on peut dire qu'il y a des gagnants, parce qu'effectivement (...) ils verraient leurs pensions indexées sur l'inflation. »

Sans le projet de loi de financement de Sécurité sociale (PLFSS), la loi prévaut. Interrogée sur France Info ce mercredi 4 décembre, la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet l'a confirmé : « Les retraités seraient effectivement gagnants, si on peut dire qu'il y a des gagnants, parce qu'effectivement (...) ils verraient leurs pensions indexées sur l'inflation ». La ministre ajoute tout de même : « On ne peut pas se dire qu'il y a des perdants, des gagnants. La situation de l'endettement, si elle s'emballe, elle ne sera bonne pour personne. » Et que cette indexation par défaut crée « un océan de difficultés ».

Au-delà du cercle politique, où cette désindexation a été fortement critiquée par les oppositions, et dont le RN avait fait une « ligne rouge » motivant la censure, la revalorisation différenciée était aussi critiquée au niveau syndical. « La CGT revendique plus que jamais l'indexation des retraites sur la hausse constatée des salaires », écrivait la centrale dans une communiqué mi-novembre. Le même jour, la CFDT Retraités demandait « l'application de l'augmentation des pensions au 1er janvier telle que prévue par le Code de la sécurité sociale et la mise en place d'un minimum de pension égal au Smic pour tout salarié ayant une carrière complète. » C'est finalement ce qui va se passer, sauf nouveau retournement de situation de dernière minute.

Quelle hausse pour une pension nette de 1 500 euros ?

Combien cela représente, ces 2,2%, en euros ? Afin de montrer l'ensemble des évolutions récentes et à venir, prenons le cas le plus courant des ex-salariés du privé percevant une pension de base de l'Assurance retraite (Carsat, Cnav, CGSS) et la complémentaire Agirc-Arrco. Et prenons une retraite globale de 1 500 euros, en net, après CSG et CRDS, en octobre dernier soit avant la revalorisation annuelle de l'Agirc-Arrco. Pour un tel montant, la pension de base représente environ les deux tiers de la retraite globale.

Évolution d'une retraite globale de 1 500 € net
Pensions du mois de...Pension de base
Assurance retraite (Carsat, etc.)
Complémentaire
Agirc-Arrco
Retraite globale
Octobre 20241 000 €500 €1 500 €
Novembre 20241 000 €508 €1 508 €
Janvier 20251 022 €508 €1 530 €

Simulations simplifiées réalisées par MoneyVox, pour des pensions nettes, donc après prélèvement de la CSG-CRDS-CASA.
Augmentation de 1,6% pour l'Agirc-Arrco, en novembre 2024. Hausse de 2,2% pour l'Assurance retraite en janvier 2025 (non officialisée à ce stade).

Quelle revalorisation pour une « petite retraite » ?

Pour cet exemple de pension modeste, à peine au-dessus du minimum vieillesse (Aspa), le poids l'Agirc-Arrco est mécaniquement faible par rapport à la pension du régime général. L'augmentation de 1,6% de la complémentaire, effective sur les versements déjà effectués début novembre et début décembre, ne pèse que 5 euros. Avant un « boost » limité à 18 euros par mois en janvier, soit 23 euros au total.

Évolution d'une retraite globale de 1 100 €, en net
Pensions du mois de...Pension de base
Assurance retraite (Carsat, etc.)
Complémentaire
Agirc-Arrco
Retraite globale
Octobre 2024800 €300 €1 100 €
Novembre 2024800 €305 €1 105 €
Janvier 2025818 €305 €1 123 €

Simulations simplifiées réalisées par MoneyVox, pour des pensions nettes, donc après prélèvement de la CSG-CRDS-CASA.
Augmentation de 1,6% pour l'Agirc-Arrco, en novembre 2024. Hausse de 2,2% pour l'Assurance retraite en janvier 2025 (non officialisée à ce stade).

Quelle augmentation pour une retraite plus confortable ?

Pour une retraite plus conséquente, de 2 500 euros, celle d'un ancien cadre par exemple, la complémentaire peut représenter près de la moitié de la pension globale.

Par définition, cette situation financière ne concerne qu'une minorité : selon les données de la Drees, moins de 15% des retraités perçoivent une pension brute de 2 500 euros ou plus. Avec cet exemple-ci, les hausses cumulées s'approchent d'une augmentation d'environ 50 euros.

Évolution d'une retraite globale de 2 500 €, en net
Pensions du mois de...Pension de base
Assurance retraite (Carsat, etc.)
Complémentaire
Agirc-Arrco
Retraite globale
Octobre 20241 300 €1 200 €2 500 €
Novembre 20241 300 €1 219 €2 519 €
Janvier 20251 329 €1 219 €2 548 €

Chiffres arrondis. Simulations simplifiées réalisées par MoneyVox, pour des pensions nettes, donc après prélèvement de la CSG-CRDS-CASA.
Augmentation de 1,6% pour l'Agirc-Arrco, en novembre 2024. Hausse de 2,2% pour l'Assurance retraite en janvier 2025 (non officialisée à ce stade).

Combien pour une retraite moyenne ?

Selon la dernière étude de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), la retraite moyenne s'établit en France à 1 662 euros net en 2022. Il s'agit d'une moyenne « tout compris » : pension de base, du privé ou du public, pension complémentaire, pension de réversion, majoration pour 3 enfants ou plus, etc.

Évolution d'une retraite moyenne nette de 1 662 €
Pensions du mois de...Pension de base
Assurance retraite (Carsat, etc.)
Complémentaire
Agirc-Arrco
Retraite globale
Octobre 20241 108 €554 €1 662 €
Novembre 20241 108 €563 €1 671 €
Janvier 20251 132 €563 €1 695 €

Simulations simplifiées réalisées par MoneyVox, pour des pensions nettes, donc après prélèvement de la CSG-CRDS-CASA.
Augmentation de 1,6% pour l'Agirc-Arrco, en novembre 2024. Hausse de 2,2% pour l'Assurance retraite en janvier 2025 (non officialisée à ce stade).
Précision. Pour l'Agirc-Arrco, la pension due pour novembre est versée début novembre. En revanche, pour l'Assurance retraite, une pension due pour janvier 2025 est versée début février 2025.

(1) Article L161-25 du Code de la sécurité sociale : « La revalorisation annuelle des montants de prestations (...) est effectuée sur la base d'un coefficient égal à l'évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels de ces prix publiés par [l'Insee] l'avant-dernier mois qui précède la date de revalorisation des prestations concernées. » Le résultat arithmétique de cette moyenne sur douze mois est de 2,2%.