C'est un serpent de mer qui refait surface à intervalles réguliers : notre épargne peut-elle financer les programmes de défense, et à quelles conditions ? En novembre 2023, le ministre de l'Économie d'alors, Bruno Le Maire, avait expliqué souhaiter la création d'un nouveau produit d'épargne consacré à la défense.
De son côté, début 2024, le Conseil constitutionnel avait déjà rejeté deux fois un amendement prévoyant le fléchage d'une partie des encours du Livret A et du LDDS pour financer les entreprises du secteur de la défense. Plus que sur le fond, c'est sur la forme que ce rejet avait été motivé, cet amendement ayant été considéré comme un cavalier législatif.
Épargne : Le Livret A pour financer la défense, le sujet est de nouveau sur les rails
Jeudi 20 février, Emmanuel Macron a donc remis l'idée sur la table lors d'un échange avec des internautes. Le président a annoncé qu'il n'excluait pas de « lancer des produits d'épargne » et de « faire appel à la nation » pour « financer certains programmes » de défense. « On rentre dans une époque où chacun d'entre nous doit se demander ce qu'il peut faire pour la nation française et la République », et dans ce contexte un tel produit d'épargne serait « une très bonne idée », a-t-il argué.
Sous quelle forme, et quel intérêt pour les épargnants ?
Mais alors, sous quelle forme imagine-t-il cet appel à la nation ? Fléchage du Livret A et du LDDS, ou création d'un produit d'épargne à part entière, à l'image du « Livret d'épargne défense souveraineté » proposé par des sénateurs en 2024 mais finalement rejeté par le Parlement ? Pour le moment, Emmanuel Macron n'a pas donné plus de détails.
Qu'en pensent alors les spécialistes de l'épargne ? Interrogé par TF1, l'économiste Philippe Crevel estime que « l'idée est de permettre à l'État de moins dépenser, en faisant financer la politique de défense par les épargnants, qui se substituent aux contribuables. On pourrait penser à un livret défense, sous la forme d'un Livret A ». Mais ce dernier doit être rentable pour les épargnants : « Il faut de la rémunération derrière : ce n'est ni un impôt, ni un don, les gens voudront un rendement », confirme l'économiste.
Un avis partagé par Guillaume Lasconjarias, professeur associé à Sorbonne-Université et spécialiste des questions de défense également interrogé par TF1 : « Si la démarche d'épargner doit être volontaire, il y a le risque que les gens ne s'y intéresse pas si le produit est mal vendu. Il faut un gros effort pédagogique et politique pour préparer les esprits, que les épargnants n'aient pas l'impression que l'on leur confisque quelque chose »