« Où vivent les pauvres ? » Dans sa vaste enquête publiée ce mardi, l'Observatoire des inégalités réalise une cartographie des territoires où se trouvent les 9,1 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté fixé à 60% du niveau de vie médian. Soit 1 216 euros net par mois pour une personne seule en 2022, selon l'Insee.

Près des deux tiers de ces Français (62,9%) vivent dans les pôles urbains qui regroupent au moins 10 000 emplois, alors que seulement 6,4% d'entre eux se situent dans les zones rurales isolées.

Une très grande pauvreté en Outre-Mer

Premiers territoires touchés par une extrême pauvreté, les départements et régions d'Outre-Mer, où « la situation est d'un tout autre niveau », s'alarme l'Observatoire des inégalités. « Mayotte et la Guyane subissent une misère étendue à une grande part de la population », mais le manque de données ne permet pas de mesurer son ampleur.

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Actuellement, c'est La Réunion qui est - de très loin - le département le plus pauvre de France, avec 36,7% de la population vivant avec moins de 1 216 euros net chaque mois. Cinq communes de l'île de plus de 20 000 habitants se retrouvent, ainsi, dans le Top 7 des villes avec le taux de pauvreté le plus élevé : Saint-Benoît (2e, 46%), Saint-André (3e, 44%), Saint-Louis (5e, 43%), Saint-Joseph (6e, 43%) et Le Port (7e, 43%). Le Tampon, également à La Réunion, est 13e (38%).

Dans ces territoires, les niveaux de pauvreté sont jusqu'à trois fois plus élevés que la moyenne en France, à près de 15%. En plus « des difficultés de logement et de consommation des plus modestes », s'ajoute le coût de la vie avec des « prix bien plus élevés qu'en métropole », explique l'Observatoire des inégalités.

L'Île-de-France très représentée

Juste devant les communes d'Outre-Mer, on trouve Roubaix. Près d'un habitant sur deux (46%) vit sous le seuil de pauvreté. Dans son précédent rapport, paru en 2020, l'observatoire soulignait déjà « le déclin industriel de ce territoire, avec pour conséquences une forte augmentation du chômage et la paupérisation d'une partie de sa population déjà modeste ».

L'Île-de-France n'est pas épargnée, puisqu'elle abrite 10 des 20 villes les plus pauvres de France, dont sept situées en Seine-Saint-Denis. À savoir Aubervilliers (42% de la population en dessous du seuil de pauvreté), La Courneuve (42%), Clichy-sous-Bois (42%), Pierrefitte-sur-Seine (38%), Stains (37%), Saint-Denis (36%) et Bobigny (36%).

Ces territoires abritent un plus grand nombre de logements sociaux, de familles monoparentales et de personnes immigrées très souvent touchées par la pauvreté. Le taux de chômage y est, aussi, plus élevé.

Les plus riches concentrés dans les Yvelines et les Hauts-de-Seine

À l'autre bout de l'échelle, Gif-sur-Yvette, dans l'Essonne, affiche un taux de pauvreté de 5% (1), ce qui en fait la ville de plus de 20 000 habitants avec le taux le moins élevé... Alors que quelques kilomètres plus loin se trouve Grigny, l'une des communes les plus pauvres de France : 44% de la population vit sous le seuil de pauvreté.

1 216 euros par mois, voici le nouveau seuil de pauvreté en France

La situation dans la région francilienne est paradoxale. En effet, 11 des 20 communes avec le plus faible taux de pauvreté s'y trouvent, particulièrement dans les Yvelines et les Hauts-de-Seine. Certaines de ces grandes villes concentrent, par ailleurs, le plus de richesse. Le niveau de vie des 10% les plus riches dépasse 7 019 euros net à Saint-Cloud pour une personne seule, 6 682 euros à Saint-Mandé et 6 014 euros à Maisons-Laffitte.

Des communes moins pauvres proches des grandes villes

La majorité des autres communes les moins pauvres sont situées proches des grandes villes, comme Vertou et La Chapelle-sur-Erdre, proches de Nantes ; Allauch, près de Marseille ; Saint-Médard-en-Jalles, dans la banlieue bordelaise ; ou encore Olivet, près d'Orléans.

« La proximité de métropoles qui concentrent les emplois de cadres supérieurs explique certainement en partie ces faibles taux de pauvreté. Certaines de ces communes ont aussi fait le choix de limiter l'offre de logements sociaux sur leur territoire, avance l'Observatoire des inégalités comme explications. Les populations les plus démunies y sont donc moins nombreuses car repoussées vers d'autres communes limitrophes. »

(1) En réalité, le taux de pauvreté dans cette commune pourrait être plus bas. Car, quand il est en dessous de 5%, l'Insee le remplace par... 5%. Ainsi, le taux de pauvreté de Gif-sur-Yvette pourrait être de 2%, par exemple.