D'après la juridiction financière, le déficit du système de retraites atteindra environ 15 milliards d'euros à horizon 2030 et 30 milliards à horizon 2045. Des chiffres proches de ceux du COR mais très éloignés de ceux évoqués mi-janvier par le Premier ministre François Bayrou, qui avait estimé le déficit à 55 milliards. Dans son sillage, quelques experts, très minoritaires, avaient pointé un « déficit caché ».
Question : Après des semaines de débat politique sur le « vrai » déficit des retraites et les critiques qui ont été faites au COR, comment réagissez-vous à ce rapport ?
Gilbert Cette : « Ce rapport de la Cour des Comptes reprend la convention (méthodologie de calcul, ndlr) retenue pas le COR, qui est conforme aux textes de loi en vigueur. Il faut maintenant espérer que cette polémique inutile sur le calcul des recettes et du solde du financement des retraites est définitivement éteinte. »
« Le principal perdant du fait de cette mauvaise polémique est la confiance du citoyen dans les chiffres qui lui sont présentés et les institutions qui les produisent. Or, la confiance est rapide à détruire, mais longue à reconstruire. Arrêtons ce gâchis et tournons maintenant cette page pour réfléchir plus sereinement sur l'avenir des retraites. »
Q : Au vu de la situation financière, les partenaires sociaux ont-ils réellement des marges de manœuvre pour revenir sur la réforme de 2023 ?
R : « Le Premier Ministre a invité les partenaires sociaux à se concerter et faire des propositions sur le financement et l'amélioration du système de retraites (...). Il revient donc aux partenaires sociaux de construire ensemble de telles propositions, sur la base des évaluations et messages du rapport de la Cour des Comptes, ces messages étant d'ailleurs également ceux du dernier rapport du COR. »
« Un de ces messages est qu'il y a un déficit à financer. Un autre, implicite, est que, parmi les modes de financement, une augmentation des contributions retraites employeurs ou salariés ou une désindexation partielle des retraites sont récessives et appauvrissent le pays, tandis qu'à l'inverse l'augmentation de l'âge de départ à la retraite et du taux d'emploi des séniors sont expansionnistes et enrichissent le pays... Ce rapport montre aussi qu'un retour sur les 64 ans aggraverait le déficit et appauvrirait le pays. »
Q : Au-delà des syndicats, même François Bayrou et certaines organisations patronales n'ont pas exclu un bouger sur les 64 ans. Qu'en pensez-vous ?
R : « Il ne me revient pas de commenter les déclarations des uns et des autres. Chacun est libre de choisir entre des modèles économiques et sociaux contrastés, mais le rapport de la Cour des Comptes éclaire bien les implications de ces choix. La France pâtit d'un taux d'emploi des seniors assez bas comparée à d'autres pays comme les Pays-Bas, l'Allemagne et les pays nordiques et scandinaves. Une conséquence de ce taux d'emploi plus bas est une soutenabilité plus difficile de nos finances publiques et des difficultés récurrentes à financer nos ambitions économiques et notre modèle social. »
Q : Quel sera le rôle du COR dans les travaux des partenaires sociaux ?
« Le rôle du secrétariat général du COR sera de fournir à la délégation paritaire permanente toutes les expertises techniques qu'elle lui demandera. Il revient donc aux partenaires sociaux de formuler ces demandes, le secrétariat général du COR y répondra du mieux qu'il le pourra, avec son expertise reconnue de tous. »