Les marchés : La Fed au centre du jeu

À l'équilibre sur la semaine, le CAC 40 termine la séance dans le rouge, en légère baisse de 0,09% à 8 115 points, dans un climat étonnamment serein pour une séance pourtant décisive. Toute la journée a été rythmée par l'attente de la mesure d'inflation fétiche de la Fed. Un chiffre de septembre, publié avec 43 jours de retard à cause du long shutdown américain mais qui reste le dernier indicateur majeur avant la réunion de politique monétaire de mardi et mercredi prochains. Après plusieurs données indiquant un net ralentissement du marché du travail, les investisseurs espèrent massivement une nouvelle baisse des taux la semaine prochaine, qui agirait comme un soutien immédiat pour les actions. Et finalement, ce grand rendez-vous se transforme en non-événement. L'indice PCE ressort exactement comme prévu à +2,8% sur un an, +0,3% sur un mois. Rien de plus, rien de moins. Mais une petite surprise positive vient de l'indice de confiance des ménages de l'Université du Michigan. Il rebondit, porté par une progression des revenus plus forte qu'attendu (+0,4%). De quoi installer une ambiance positive à Wall Street, où la hausse domine et où les indices américains renouent tranquillement avec leurs records historiques. Désormais, le marché estime à 87% la probabilité que la Fed baisse ses taux, contre seulement 68% il y a un mois. Autant dire que les espoirs sont élevés et que la déception pourrait être forte en cas de statu quo... Dans la suite de cette édition, nous revenons sur une actualité importante : Washington pourrait acter plus tôt que prévu son désengagement militaire du terrain européen.

Les valeurs : Derichebourg, Airbus, Saab et Balyo

Derichebourg Derichebourg rassure les investisseurs en dévoilant des résultats meilleurs que prévu. Le groupe, spécialisé dans le recyclage des métaux et les services aux collectivités, voit son bénéfice net bondir de 63% à 122 millions d'euros sur l'exercice. Cette forte progression s'explique surtout par la contribution croissante de sa filiale Elior, active dans la restauration collective, une participation qui devrait devenir encore plus déterminante dans les prochaines années. En revanche, l'activité recyclage souffre d'une baisse des volumes de métaux. Malgré cela, Derichebourg a réussi à maintenir sa rentabilité grâce à une gestion stricte de ses coûts. Son EBITDA (voir lexique) dépasse même les estimations initiales, grâce à de fortes livraisons de matières premières recyclées en fin d'exercice, qui ont généré plus de marge que prévu. Pour l'exercice suivant, le groupe se montre confiant : il anticipe un chiffre d'affaires au moins équivalent à celui de cette année et prévoit un EBITDA en légère hausse, compris entre 320 et 350 millions d'euros. Cette visibilité contribue à renforcer la confiance des investisseurs dans la capacité de Derichebourg à traverser un contexte de marché moins porteur pour le recyclage. En tête du SBF 120 ce soir, le titre s'envole de 16,44% à 7,36€ (+35% en 2025).

Airbus et Saab Airbus et le groupe suédois Saab discutent d'un partenariat pour développer de futurs avions de combat sans pilote. Les deux groupes veulent créer des drones capables d'accompagner les chasseurs actuels, comme l'Eurofighter ou le Gripen, afin de renforcer leurs capacités sans remplacer immédiatement les avions pilotés. Ces échanges interviennent alors que l'industrie européenne de la défense est très fragmentée et que le grand projet commun SCAF (censé créer l'avion de combat du futur pour la France, l'Allemagne et l'Espagne) rencontre de fortes difficultés. C'est le moins que l'on puisse dire, le projet est pratiquement à l'arrêt pour des raisons politiques... Même si Saab et Airbus assurent que leurs discussions ne sont pas liées au SCAF, certains experts y voient une alternative possible si ce programme échoue. Les dirigeants des deux groupes estiment que les drones, conçus pour voler aux côtés des avions pilotés, seront une pièce maîtresse des forces aériennes de demain. La question de la coopération internationale reste donc ouverte. L'Europe réfléchit encore à la manière d'organiser la prochaine génération de chasseurs, qui façonnera les alliances militaires pour les décennies à venir. Ce soir, Airbus perd 0,16% et Saab gagne 3,29% en Bourse (respectivement +27% et +109% en 2025).

Balyo C'est une petite valeur que presque personne ne suit... et pourtant, elle signe aujourd'hui l'un des plus grands coups de théâtre boursiers de l'année. Balyo, discret spécialiste de la robotisation des entrepôts, s'offre une envolée spectaculaire. Son action flambe de 94,74% à 0,59€, après l'annonce d'une offre publique de retrait lancée par SoftBank. Le géant japonais, déjà présent à plus de 91% du capital, veut racheter les dernières actions au prix de 0,60€ avant de retirer Balyo de la cote. Une sortie en fanfare pour une valeur que le marché avait longtemps ignorée. Une prime qui valorise l'entreprise, pionnière dans la robotisation des chariots de manutention. Balyo transforme des chariots élévateurs traditionnels en engins autonomes capables de se déplacer seuls dans les entrepôts, un marché stratégique avec l'explosion du e-commerce et de l'automatisation logistique. SoftBank accompagne cette sortie de la cote d'un prêt de 12 millions d'euros, essentiel pour assurer la trésorerie de Balyo jusqu'en 2026. Depuis le début de l'année, le titre éligible au PEA-PME progresse de 110%.

Le résultat du vendredi : Fin de la protection américaine ?

Les États-Unis poussent l'Europe à prendre en main, d'ici 2027, l'essentiel de la défense conventionnelle de l'OTAN, c'est-à-dire tout ce qui concerne les forces non nucléaires : troupes, armements, renseignement, missiles, surveillance. Selon plusieurs sources, Washington estime que les progrès européens depuis l'invasion russe de 2022 restent insuffisants. L'idée serait que les Européens remplacent progressivement des capacités aujourd'hui fournies par les Américains, au risque, en cas d'échec, que les États-Unis se désengagent de certains mécanismes clés de coordination militaire. Mais cette échéance est jugée irréaliste par des responsables européens. Même si les budgets de défense augmentent fortement, l'Europe manque encore de moyens essentiels : défense aérienne, drones, cybersécurité, munitions, sans parler des capacités de renseignement très avancées que seuls les États-Unis possèdent. En outre, les délais de production des équipements militaires, y compris américains, rendent impossible un renforcement rapide. L'Union européenne vise déjà une autonomie plus lointaine, autour de 2030, et cet objectif est considéré comme ambitieux. À Washington, toutes les voix ne s'accordent pas non plus sur le degré de retrait américain souhaitable en Europe. Officiellement, l'OTAN reconnaît que les Européens assument progressivement davantage de responsabilités, sans confirmer la date de 2027. Les États-Unis, eux, réaffirment que le partage du fardeau doit évoluer, et que cette fois, ils attendent de l'Europe une prise en main réelle de sa propre sécurité. Ce désengagement est réclamé de longue date par Donald Trump et pourrait devenir une réalité plus tôt qu'attendu. Washington souhaite en effet se concentrer quasi-exclusivement sur l'Asie, et singulièrement sur la Chine. La décision doit encore être actée mais soutiendrait potentiellement le secteur européen de la défense. Affaire à suivre de près !

Le monde d'après : Le pari fou de Netflix

Hollywood vient de basculer dans une nouvelle ère. Netflix, longtemps considéré comme le disrupteur venu casser les codes du cinéma, est sur le point de devenir... l'un de ses propriétaires. Le géant du streaming a conclu un accord définitif pour racheter Warner Bros, le studio centenaire derrière Casablanca, Batman ou Harry Potter, ainsi que son service de streaming HBO Max. Prix de l'opération : 72 milliards de dollars hors dette, près de 83 milliards en valeur d'entreprise. Un coup de tonnerre qui écrase les offres de Paramount et de Comcast, et qui ouvre un chantier titanesque pour l'ensemble de l'industrie mondiale du divertissement. Si l'opération passe les contrôles antitrust, un « si » à ne pas sous-estimer à Washington, Netflix mettra la main sur un catalogue mythique, des franchises cultes et un parc combiné qui frôlera les 450 millions d'abonnés. L'objectif est clair : proposer une offre fusionnée, plus attractive que les abonnements séparés, tout en rationalisant les coûts. Le management promet 2 à 3 milliards de dollars d'économies en trois ans et insiste sur la complémentarité des deux univers. Signe fort pour calmer Hollywood, Warner continuera de sortir ses films en salles, un compromis inédit pour Netflix, jusqu'ici adepte du streaming. Mais ce rachat est aussi un signal politique et financier. Le dernier deal de cette ampleur remonte au rachat de Fox par Disney en 2019. Netflix, qui s'était toujours tenu à l'écart des acquisitions XXL, bascule dans la cour des super-conglomérats, un empire mêlant technologie, streaming et cinéma. Reste une étape cruciale, l'aval du Département de la Justice. Dans le monde d'après, la bataille du streaming ne se joue plus seulement en ligne, mais dans la création d'un écosystème complet !

Le lexique : L'EBITDA

On vous parle souvent de cet indicateur financier incontournable. L'EBITDA désigne le résultat d'une entreprise avant la prise en compte des intérêts, des impôts, des dotations aux amortissements et des provisions. Il mesure la performance opérationnelle pure en isolant la rentabilité générée par l'activité courante de la fiscalité et des politiques comptables liées aux amortissements. Cet indicateur permet ainsi de comparer plus facilement des entreprises entre elles et d'évaluer leur capacité à générer du cash.