« On a expulsé les très pauvres, puis les pauvres, et maintenant les classes moyennes ! », s'est indigné dans un mégaphone Thierry Vincent, journaliste qui est devenu l'un des leaders du mouvement de protestation, alors que des actionnaires, arrivant au Palais de la Bourse (IIème arrondissement) pour assister à l'assemblée générale annuelle, se faisaient huer.
Les locataires ont été informés fin janvier par Gecina, le plus grand bailleur privé parisien, qu'il allait vendre appartement par appartement les immeubles qu'il détient rue Pradier dans le XIXème arrondissement près du parc des Buttes-Chaumont.
« Logique d'investissement »
« Gecina se désengage progressivement du logement par la vente en bloc (d'immeubles à des investisseurs) et par lots pour se renforcer dans les bureaux, les résidences étudiantes et de santé. C'est une logique d'investissement », a expliqué Bernard Michel, le PDG de Gecina, lors de l'assemblée générale des actionnaires.
Spécialiste des bureaux, Gecina prévoit de céder un milliard d'euros d'actifs en 2012 pour se désendetter, dont 500 millions d'euros de logements en bloc et 200 à 300 millions, comme chaque année, de logements par lots. « Cela pose un problème aux locataires mais nous sommes ouverts au dialogue », a ajouté le PDG, qui a « condamné fermement ceux qui commettent des dégradations » dans un des immeubles mis en vente.
« Hors de prix »
Les locataires sont prioritaires pour acheter (6.916 euros le mètre carré), mais s'ils ne le souhaitent ou ne le peuvent pas, ils devront quitter leur appartement lorsque leur bail arrivera à échéance. « Je ne peux pas acheter l'appartement, c'est hors de prix pour moi. Quand je devrai partir, je ne retrouverai pas même la moitié de la surface que j'occupe actuellement (50 m2), ou alors je dois aller très loin en banlieue », a expliqué Laure, une locataire au chômage de 46 ans qui n'a pas souhaité donner son patronyme.
Dans un communiqué, la candidate écologiste à l'élection présidentielle Eva Joly a soutenu les locataires, affirmant qu'« il faut en finir avec les ventes à la découpe ». « On peut agir face à la spéculation immobilière. Les sénateurs écologistes ont déposé une proposition de loi le 22 mars pour interdire la pratique de congé pour vente, indispensable à une vente à la découpe. Comme en Allemagne, il faut les interdire, pour protéger les locataires ».